— Je sais que je n’ai pas été très sympa avec vous, dit Elena. Je vous dois des excuses, mais, en même temps, je suis tellement heureuse… Si on oubliait tout ça, et qu’on repartait à zéro ?
— C’est quand même la moindre des choses de nous présenter des excuses ! bougonna Bonnie en l’embrassant.
— Ouais… Tu te rends compte que t’es partie avec Tyler Smallwood ? renchérit Meredith.
— Ça m’a donné une bonne leçon… admit Elena.
L’espace d’un instant, le souvenir des événements assombrir son humeur. Mais l’éclat de rire de Bonnie vint le chasser :
— T’as vraiment décroché le gros lot ! Stefan Salvatore ! C’est dingue ! Quand je t’ai vue avec lui, j’ai cru que j’avais une hallucination ! Comment il a fait ?
— Rien. Il est juste apparu… disons, un peu comme Zorro…
— Pour défendre ton honneur… , termina Bonnie d’un air rêveur. C’est super romantique…
— Je vous raconterai tout, promis, mais avant je devrais passer chez Vickie. Vous venez avec moi ?
— T’as qu’à tout nous raconter en te préparant. Ça ne nous gêne pas si tu te brosses les dents et que tu te coiffes même temps, affirma Bonnie, qui bouillait d’impatience Et t’as pas intérêt à oublier le moindre détail, ou alors, ce sera le tribunal de l’inquisition direct.
— Comme tu vois, les cours de Tanner ont fini par porter leurs fruits… Bonnie sait maintenant que l’inquisition espagnole n’est pas un groupe de rock, plaisanta Meredith.
Malgré ses traits tirés, la mère de Vickie fit entrer les adolescentes.
— Vickie se repose. Le médecin a ordonné qu’elle garde le lit, expliqua-t-elle avec un sourire triste.
Elle les accompagna jusqu’à la chambre de sa fille et tapa doucement à la porte.
— Vickie, ma chérie, tes amies du lycée sont venues te voir. Ne restez pas trop longtemps, ajouta-t-elle à leur adresse.
La pièce était joliment décorée dans des tons bleu lavande. Vickie reposait contre d’épais oreillers, un édredon remonté jusqu’au menton. Elle avait le teint livide, et les yeux au regard fixe avaient du mal à rester ouverts. Elle était déjà comme ça, hier soir chuchota Bonnie.
Elena s’approcha du lit.
— Vickie dit-elle doucement. Vickie, est-ce que tu m’entends ? C’est moi, Elena Gilbert. Vickie n’eut aucune réaction.
— Ils ont dû lui filer des calmants, dit Meredith.
Pourtant, Mme Bennett n’avait pas parlé de calmants, pensa Elena. Elle prit un air dubitatif, avant de faire une nouvelle tentative.
— Vickie, c’est moi, Elena. Je voulais juste te dire que je te crois, pour hier soir.
Elle ignora le regard interrogateur de Meredith, et continua :
— Et je voulais te demander…
— Nooon !
Vickie était agitée de violents soubresauts, secouant la tête dans tous les sens, les cheveux lui couvrant le visage, et battant l’air des bras.
— Nooon ! Nooon ! hurla-t-elle.
— Faites quelque chose ! s’écria Bonnie. Madame Bennett ! Madame Bennett !
Elena et Meredith tentèrent de maintenir Vickie sur son lit Enfin, sa mère accourut et prit sa fille dans ses bras après avoir repoussé les deux autres.
— Qu’est-ce que vous lui avez fait ?
Vickie, agrippée à celle-ci, parut se calmer un peu. Mais, par-dessus son épaule, elle aperçut Elena de plus en plus belle.
— Toi aussi, tu es l’une des leurs ! s’écria-t-elle diable ! Va-t’en, ne m’approche pas !
Elena était stupéfaite.
— Vickie, je suis juste venue te demander…
— Vous feriez mieux de partir, interrompit Mme Bennett en serrant sa fille contre elle. Laissez-nous tranquilles. Vous ne voyez pas dans quel état vous la mettez ?
Elena sortit de la pièce sans un mot, suivie de Meredith et Bonnie.
— Ça doit être les médicaments, dit Bonnie lorsqu’elles eurent quitté la maison. Elle déraille complètement…
— Tu as senti ses mains ? demanda Meredith à Elena. Quand on a essayé de la calmer, j’en ai attrapée une. Elle était gelée.
Elena, encore sous le choc, avait du mal à admettre les événements. Toute cette histoire était insensée. Mais elle était déterminée à ne pas se laisser gâcher la journée. Elle devait trouver quelque chose qui lui permettrait de retrouver sa bonne humeur.
— Je sais, dit-elle soudain. Je vais aller à la pension.
— Quoi ?
— J’ai demandé à Stefan de m’appeler, aujourd’hui, mais on pourrait aller directement chez lui. Ce n’est pas très loin.
— Tu parles, c’est à vingt minutes à pied ! fit remarquer Bonnie. Mais, en même temps, je suis bien curieuse de voir à quoi ressemble sa chambre…
En fait, je pensais que vous pourriez attendre en bas toutes les deux… Comme ses amies lui adressaient un regard lourd de proches, elle ajouta :
— Mais je ne resterai que quelques minutes !
À dire vrai, elle n’avait aucune envie de partager Stefan avec quiconque pour l’instant : elle voulait profiter un peu de leur toute nouvelle intimité.
Mme Flowers leur ouvrit la porte. C’était une petite femme à la peau fripée mais aux yeux noirs étonnamment brillants.
— Tu dois être Elena, devina-t-elle. Je le sais parce que je t’ai vue sortir hier soir avec Stefan, et je lui ai demandé comment tu t’appelais quand il est rentré.
— Vous nous avez vus ? Pas moi, pourtant.
— Non… , confirma-t-elle avec un petit rire. Comme tu es mignonne ! ajouta-t-elle en lui tapotant la joue. Très, très mignonne, vraiment !
— Heu… merci, répondit Elena, un peu mal à l’aise. Est-ce que Stefan est ici ?
— Je crois, oui… À moins qu’il ne soit sorti par le toit…
La logeuse s’esclaffa à nouveau, et Elena l’imita par politesse.
— Nous, on va tenir compagnie à Mme Flowers, suggéra Meredith.
Bonnie leva les yeux au ciel d’un air affligé, retenu un sourire, Elena se dirigea vers l’escalier.
« Quelle étrange vieille maison ! » pensa-t-elle tandis qu’elle s’engageait dans le deuxième escalier. Les voix à l’étage inférieur, ne lui parvenaient que dans un murmure. En approchant de la chambre de son petit ami, elle eut la sensation d’avoir pénétré dans un autre monde.
Elle frappa timidement.
— Stefan ?
Elle avait beau tendre l’oreille, aucun bruit ne perçait de l’autre côté. Soudain, la porte s’ouvrit toute grande. Elle eut à peine le temps de remarquer le visage fatigué de Stefan. Les bras du jeune homme la serraient déjà convulsivement.
— Elena… Oh, Elena…
Pourtant, lorsqu’il s’écarta, Elena eut exactement la même impression que la veille : le fossé entre eux se trouvait toujours là. Plus que jamais déterminée à le faire disparaître, elle l’attira aussitôt vers lui pour l’embrasser. Pendant quelques instants, il ne réagit pas. Puis, une sorte de tremblement le parcourut, et un baiser passionné répondit enfin à son étreinte. Ses doigts se perdirent dans les cheveux d’Elena, et elle sentit l’univers basculer à nouveau autour d’eux. Plus rien n’existait en dehors de Stefan, de ses bras autour d’elle, et du feu de ses baisers sur sa bouche.
Une éternité sembla s’écouler avant que leur étreinte prît fin, les laissant frissonnants. Les yeux dans ceux de Stefan, Elena remarqua à quel point ses pupilles étaient dilatées. Il semblait sur le point de s’évanouir et ses lèvres étaient enflées.
— Il faudra qu’on se maîtrise, la prochaine fois qu’on s’embrassera…
Il faisait visiblement un effort pour contrôler sa voix chevrotante. Elena approuva d’un hochement de tête : elle aussi se sentait faible. « Ça ne doit pas nous arriver en public, pensa-t-elle. D’ailleurs, on aurait dû éviter de s’embrasser alors que Bonnie et Meredith attendent. Mais il ne faudrait pas non plus qu’on soit complètement seuls, à moins que… »