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C’est après celle de Louise de Savoie, survenue en 1531, qu’Amboise va retrouver le silence. Le roi construit Fontainebleau et, en pays de Loire, l’étourdissant Chambord pour un sourire de Mme de Châteaubriant. Puis, c’est l’heure noire entre toutes.

Alors que le frêle François II, l’époux de Marie Stuart, séjourne au château, une conspiration protestante éclate. Elle est menée officiellement par La Renaudie mais en sous-main par le prince de Condé. Le roi est en danger et la cour vit des jours d’angoisse, mais bientôt c’est la délivrance. Le mot, malheureusement, signifie massacre. Durant treize jours, du 17 au 30 mars 1560, on pend, on décapite, on écartèle à Amboise et le balcon de fer qui borde la salle des États porte ces mêmes fruits atroces que porteront quatre siècles plus tard les balcons de Tulle. La mort fauche impitoyablement les conjurés et le jeune couple royal assiste, impassible, aux pires exécutions. Quand la cour se retire, au lendemain de l’horreur, elle laisse en souvenir quatre têtes de meneurs exposées sur la place du Grand-Carroi. C’en est fini d’Amboise demeure de plaisance. Commencera bientôt le temps d’Amboise prison d’État.

Le surintendant Fouquet, arrêté à Nantes, y séjournera quelques jours sur le chemin de Vincennes et de son procès. Plus tard, ce sera Lauzun, retour de Pignerol. Par don royal, le château passe à divers propriétaires : Gaston d’Orléans, la duchesse de Berry, Choiseul, le duc de Penthièvre, mais la Révolution apporte ses ravages et quand, enfin, la duchesse d’Orléans récupère le château, il y a beaucoup à faire. Un temps, le château redevient prison pour Abd el-Kader, le vaincu d’Algérie. À présent, il est la propriété de la fondation Condé.

HORAIRES D’OUVERTURE

Du 2 janvier au 31 janvier 9 h-12 h 30 et 14 h-16 h 45

Du 1er février au 28 février 9 h-12 h 30 et 13 h 30-17 h

Du 1er mars au 31 mars 9 h-17 h 30

Du 1er avril au 30 juin 9 h-18 h 30

Du 1er juillet au 31 août 9 h-19 h

Du 1er septembre au 1er novembre 9 h-18 h

Du 2 novembre au 15 novembre 9 h-17 h 30

Du 16 novembre au 31 décembre 9 h-12 h 30 et 14 h-16 h 45

Fermé le 1er janvier et le 25 décembre.

On peut aussi visiter le logis royal et la chapelle avec la tombe de Léonard de Vinci.

http://www.chateau-amboise.com

Angers

Le Faucon noir

Le faucon rompt l’étreinte

Et fond au loin, rapide, orgueilleux, solitaire.

William FAULKNER

Il s’appelait Foulques, comte d’Anjou, issu de la puissante famille des Ingelger mais, autant à cause de son teint basané que de sa crinière noire, on l’a tout de suite surnommé Nerra, le Noir. C’est en effet le temps où un nom de prince s’accompagne toujours d’un sobriquet. Pour son père Geoffroy, c’était Grisegonelle en raison du manteau gris qu’il affectionnait. Pour son grand-père Foulques, c’était le Bon à cause de son courage car, le bon, cela signifie alors le brave.

Foulques n’a pas connu que les grosses tours de schiste noir et de calcaire blanc telles que l’on peut toujours les admirer. Les traces de ce qui fut sa forteresse se perdent dans les fondations du château. Mais son ombre plane, depuis tant de siècles, sur la ville, le château et même sur tout ce pays de Loire où s’érigent toujours, défiant les siècles, les donjons terribles qu’il fit, le premier, dresser entre terre et ciel : Langeais, Loches, Montbazon, Buzançais, Montrésor, Montrichard. Moitié génie, moitié forban, le Faucon noir fut un maître impitoyable, un conquérant, un bâtisseur mais aussi un chrétien prosterné. Pour les gens de son temps – il prend le pouvoir en 967 – il préfigure les monstres de cette Apocalypse dont les admirables images tissées sont aujourd’hui la gloire du château d’Angers. Il ne craint ni homme né de femme ni diable né de l’enfer. Devant Dieu seul il tremble et courbe l’échine. Une échine singulièrement raide.

Quand il succède à son père, il n’a que quinze ans. Mais ce siècle est le siècle des géants et Foulques va montrer qu’il entend y tenir sa belle place. En effet, un peu plus haut vers le nord, en pays franc, un autre personnage hors mesure est en train, cette année-là, de prendre le pouvoir. Il s’appelle Hugues Capet et il fonde un État destiné à faire carrière dans le monde, un État qui sera la France. Bientôt, dans quelques années, une belle Normande accouchera d’un gamin que l’on appellera Guillaume le Bâtard en attendant qu’on l’appelle Guillaume le Conquérant… d’Angleterre. Foulques, de son côté, fonde un État d’importance car l’Anjou, à son avènement, ce n’est pas grand-chose. Il fonde aussi une race peu commode : celle des Plantagenêts qui sera, pour les Capétiens, l’ennemie perpétuelle quand elle plantera ses serres sur l’Angleterre.

À peine assis sur son trône, Foulques se trouve confronté à ses deux voisins les plus puissants : Eudes, comte de Blois, Tours et Chartres, et Conan, comte de Rennes. Autant le dire tout de suite, il est impossible de suivre ici pas à pas la vie tumultueuse de Foulques. Il y faudrait un volume. Il s’agit en effet d’un règne de cinquante-trois années pleines de bruit et de fureur, d’une longévité exceptionnelle qui aura, du moins, pour le comte d’Anjou, l’avantage de lui offrir en spectacle les funérailles de ses ennemis les plus gênants. Mais revenons à la prime jeunesse.

Celui des voisins qui ouvre le feu le premier, c’est Eudes, qui tente de s’emparer d’Amboise et de Loches. Le comte de Blois pense avoir facilement raison d’un jouvenceau encore imberbe. Or, non seulement il n’a pas raison, mais il se fait battre à plate couture gardant tout juste assez de forces pour rentrer chez lui et respirer un peu. Reste Conan, le barbare breton.

Celui-là n’est peut-être pas très civilisé mais c’est un malin à qui les mésaventures d’Eudes servent d’exemple. Il préfère prendre d’abord la mesure du jeune faucon. Or, à Orléans, Hugues Capet réunit ses grands féodaux, tous ceux qui viennent d’apprendre qu’il existe à présent un roi de France et qu’il faut compter avec lui. Et d’abord lui rendre hommage.

Conan s’y rend. Foulques aussi et l’on commence par se saluer correctement. Mais, en traversant une salle que coupe une grande tapisserie, le comte d’Anjou surprend une conversation entre le Breton et un personnage dont le rôle dans l’Histoire se borne au fait qu’il a écouté ses confidences. Et il entend ceci : « Dans quatre jours, dit Conan, j’accablerai mon voisin d’Anjou et serai maître d’Angers. »

Un homme prévenu en vaut deux. Homme exceptionnel, Foulques vaut la demi-douzaine. Filer discrètement d’Orléans, regagner Angers ventre à terre et mettre sa ville en défense, voilà ce qu’il faut faire et ce qu’il fait d’ailleurs sans plus tarder.

Rentré chez lui, il abat si bonne besogne que lorsque le comte de Rennes se présente avec ses gens, la surprise qu’il escomptait est pour lui. Le combat, violent, tourne vite à son désavantage car Foulques est partout à la fois. Le comte de Rennes voit tomber ses deux fils et un si grand nombre de ses hommes, massacrés avec ardeur par les Angevins, que, durant des siècles, l’une des tours du château s’appellera Ecache-Breton ou Écorche-Breton.