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Cette fois, les Chariotiers passèrent en nombre au sud du Mordor, s’alliant aux hommes du Khand et du Proche-Harad ; et, pris d’assaut au nord comme au sud, le Gondor fut bien près d’être anéanti. En 1944, le roi Ondoher et ses deux fils, Artamir et Faramir, tombèrent au nord de la Morannon, et l’ennemi se déversa en Ithilien. Mais Eärnil, Capitaine de l’Armée du Midi, triompha sur lui en Ithilien du Sud, écrasant les troupes du Harad qui avaient franchi le fleuve Poros. Se hâtant vers le nord, il rassembla tout ce qu’il put des débris de l’Armée du Nord qui battait alors en retraite, puis ils tombèrent sur le premier campement des Chariotiers alors qu’ils célébraient et festoyaient, croyant le Gondor vaincu et le butin prêt à être cueilli. Eärnil prit le campement d’assaut et mit le feu aux chariots, et il bouta l’ennemi en déroute hors de l’Ithilien. Une grande partie des fuyards périrent dans les Marais Morts.

« À la mort d’Ondoher et de ses fils, Arvedui du Royaume du Nord revendiqua la couronne du Gondor en tant que descendant direct d’Isildur et époux de Fíriel, seule survivante des enfants d’Ondoher. Sa revendication fut rejetée. Pelendur, l’Intendant du roi Ondoher, eut la plus grande part dans cette décision.

« Le Conseil du Gondor répondit : “La couronne et la royauté du Gondor reviennent aux seuls héritiers de Meneldil, fils d’Anárion, à qui Isildur a abandonné ce royaume. Au Gondor, cet héritage n’est reconnu qu’aux fils ; et nous ne sachions pas qu’il en soit autrement en Arnor.”

« Arvedui eut cette réplique : “Elendil eut deux fils, Isildur étant l’aîné et l’héritier de son père. Pour ce que nous en savons, le nom d’Elendil figure encore en tête de la lignée des Rois du Gondor, car il était reconnu comme le grand roi de toutes les terres des Dúnedain. Du vivant d’Elendil, ses fils se virent confier le gouvernement conjoint du Sud ; mais quand Elendil tomba, Isildur partit assumer l’autorité suprême de son père, confiant à son tour le gouvernement du Sud au fils de son frère. Il n’est pas dit qu’il abandonna la royauté du Gondor, pas plus qu’il ne souhaitait que le royaume d’Elendil fût à jamais divisé.

« “Non seulement cela, mais, dans l’ancienne Númenor, le sceptre passait à l’aîné des enfants du roi, homme ou femme. Il est vrai que cette loi ne fut pas observée dans les terres d’exil toujours en proie aux guerres ; mais telle était la loi de notre peuple, que nous invoquons à présent, puisque les fils d’Ondoher sont morts sans postérité29.”

« À cela, le Gondor ne fit aucune réponse. La couronne fut revendiquée par Eärnil, le capitaine victorieux ; et elle lui fut concédée avec l’assentiment de tous les Dúnedain du Gondor, puisqu’il appartenait à la maison royale. Eärnil était le fils de Siriondil, fils de Calimmacil, fils d’Arciryas frère de Narmacil II. Arvedui se garda de réitérer sa demande, car il n’avait ni le pouvoir ni la volonté de s’opposer au choix des Dúnedain du Gondor ; toutefois, ses descendants n’oublièrent jamais cette revendication, même quand leur royauté eut passé. Car l’heure approchait où le Royaume du Nord ne serait plus qu’un souvenir.

« Arvedui fut en vérité le dernier roi, comme son nom l’indique. On dit qu’il lui fut donné à sa naissance par Malbeth le Voyant, qui dit à son père : “Tu l’appelleras Arvedui, car il sera le dernier en Arthedain. Mais les Dúnedain seront placés devant un choix, et s’ils choisissent la voie qui semble la moins prometteuse, ton fils prendra un nouveau nom et deviendra maître d’un grand royaume. Autrement, bien des souffrances et des générations se succéderont, avant que les Dúnedain ne se relèvent et soient de nouveau unis.”

« De même, au Gondor, il y eut seulement un roi après Eärnil. Peut-être la royauté eût-elle été maintenue, et de grands malheurs évités, si la couronne et le sceptre avaient été unis. Mais Eärnil était un homme sage, et nullement arrogant ; encore que, pour lui comme pour la plupart des hommes du Gondor, le royaume d’Arthedain parût chose négligeable, malgré le noble lignage de ses seigneurs.

« Il manda à Arvedui qu’il ceindrait la couronne du Gondor suivant les lois et la nécessité du Royaume du Sud ; “Mais, dit-il, je n’oublie pas la royauté de l’Arnor, et je ne renie pas notre parenté, pas plus que je ne souhaite la désunion entre les royaumes d’Elendil. J’enverrai pour vous des secours quand vous en aurez besoin, dans la mesure de mes capacités.”

« Toutefois, il fallut longtemps avant qu’Eärnil n’ait suffisamment assuré sa propre sécurité pour tenir sa promesse. Le roi Araphant, toujours s’affaiblissant, continua de repousser les assauts de l’Angmar, et Arvedui, quand il lui succéda, fit de même ; mais enfin, à l’automne 1973, des messages parvinrent au Gondor disant que l’Arthedain était à toute extrémité, et que le Roi-Sorcier s’apprêtait à livrer sa dernière offensive. Eärnil mit alors son fils Eärnur à la tête d’une grande flotte, et, distrayant toutes les forces dont il pouvait se passer, les envoya au nord avec la plus grande célérité possible. Trop tard. Avant qu’Eärnur n’eût atteint les havres du Lindon, le Roi-Sorcier avait conquis l’Arthedain et Arvedui avait péri.

« Mais l’arrivée d’Eärnur aux Havres Gris suscita la joie et l’émerveillement, tant chez les Elfes que chez les Hommes. Sa flotte était si nombreuse, et ses bâtiments si imposants qu’ils eurent peine à trouver leur mouillage, bien que le Harlond et le Forlond fussent aussi à pleine capacité ; et il en débarqua une armée toute-puissante, avec tout l’armement et les provisions pour une guerre de grands rois. Telle fut du moins l’impression des gens du Nord, encore que ce ne fût là qu’un petit détachement, au regard de l’ensemble des forces du Gondor. On loua spécialement les chevaux, car nombre d’entre eux étaient des Vaux de l’Anduin, montés par de beaux et grands cavaliers et par des princes du Rhovanion. »

« Círdan appela alors tous ceux qui voudraient bien se joindre à lui, du Lindon à l’Arnor, et quand l’armée fut enfin prête, elle franchit le Loune et marcha sur le Nord contre le Roi-Sorcier de l’Angmar. Celui-ci, disait-on, s’était désormais établi à Fornost, qu’il avait rempli de choses maléfiques, usurpant la maison et l’autorité des rois. Dans son orgueil, il n’attendit pas l’assaut de ses ennemis dans sa forteresse, mais alla plutôt à leur rencontre, croyant pouvoir les repousser, comme d’autres avant eux, dans les eaux du Loune.

« Mais l’Armée de l’Ouest fondit sur lui depuis les Collines du Crépuscule, et une grande bataille se déroula sur la plaine entre le Nenuial et les Coteaux du Nord. Les forces de l’Angmar battaient déjà en retraite vers Fornost quand le gros de la cavalerie qui avait contourné les collines les assaillit par le nord et les mit en déroute. Alors le Roi-Sorcier, rassemblant tous ceux qu’il put sauver de la débâcle, s’enfuit vers le nord, cherchant à rallier son propre royaume d’Angmar. Avant qu’il n’ait pu gagner la sécurité de Carn Dûm, la cavalerie du Gondor le rattrapa, menée par Eärnur en personne. Au même moment, une force dirigée par le seigneur elfe Glorfindel arriva de Fendeval. La défaite de l’Angmar fut alors si totale qu’il ne resta plus un homme, ni un seul orque de ce royaume à l’ouest des Montagnes.