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« Dans ce cas, je demande à partir bientôt », dit Frodo.

« Dans sept jours nous partirons, dit Aragorn. Car nous vous accompagnerons loin sur la route, aussi loin que le pays de Rohan. Dans trois jours, Éomer reviendra chercher Théoden pour le porter dans la Marche au lieu de son dernier repos, et nous chevaucherons avec lui en l’honneur du défunt. Mais pour l’heure, avant que vous partiez, je vais confirmer la sentence prononcée par Faramir, et je vous déclare à jamais libre de circuler par le royaume du Gondor ; et tous vos compagnons pareillement. Et si j’avais pour vous des cadeaux à la mesure de votre accomplissement, je vous en comblerais ; mais vous prendrez avec vous tout ce que vous désirez, et vous chevaucherez dans l’honneur, harnachés comme des princes du royaume. »

Mais la reine Arwen dit : « Moi, je vais vous offrir un cadeau. Car je suis la fille d’Elrond. Je ne le suivrai plus à présent, quand il ira aux Havres ; car mon choix est celui de Lúthien, et j’ai choisi comme elle ce qu’il y a de plus doux, et de plus amer. Mais vous irez à ma place, Porteur de l’Anneau, quand l’heure viendra, et si tel est alors votre désir. Si vos blessures vous tourmentent encore et que le souvenir de votre fardeau vous pèse, vous pourrez alors passer à l’Ouest, jusqu’à ce que soient guéris tous vos maux et votre lassitude. Mais portez ceci maintenant, en mémoire de la Pierre-elfe et de l’Étoile du Soir dont les vies ont entretissé la vôtre ! »

Et elle prit une gemme semblable à une étoile qui reposait sur sa poitrine au bout d’une chaîne d’argent, et elle lui passa la chaîne au cou. « Quand vous serez hanté par le souvenir de la peur et de l’obscurité, dit-elle, ceci vous prêtera secours. »

Trois jours plus tard, comme le Roi l’avait annoncé, Éomer du Rohan arriva à cheval dans la Cité, et avec lui vint une éored des plus beaux chevaliers de la Marche. On l’accueillit chaleureusement ; et quand tous furent attablés à Merethrond, la Grande Salle des Festins, il vit la beauté des dames qui étaient présentes et s’en émerveilla. Et avant d’aller à son repos, il fit appeler Gimli le Nain et lui dit : « Gimli fils de Glóin, votre hache est-elle à portée ? »

« Non, seigneur, répondit Gimli, mais je puis vite l’aller chercher si besoin est. »

« Je vous laisse juge, dit Éomer. Car il y a encore entre nous certains propos inconsidérés prononcés au sujet de la Dame du Bois Doré. Or je l’ai vue aujourd’hui de mes yeux. »

« Fort bien, seigneur, répondit Gimli, et qu’en dites-vous à présent ? »

« Hélas ! dit Éomer. Je ne puis vous concéder qu’elle soit la plus belle des dames. »

« Dans ce cas, je vais chercher ma hache », dit Gimli.

« Mais j’invoquerai d’abord cette excuse, dit Éomer. L’aurais-je vue en d’autre compagnie, que j’aurais dit tout ce que vous voudriez entendre. Mais dans les circonstances, c’est la reine Arwen, Étoile du Soir, qui reçoit ma plus haute faveur, et je suis prêt à me battre pour défendre ce parti contre quiconque souhaite me démentir. Dois-je réclamer mon épée ? »

Alors Gimli s’inclina bien bas. « Non, pour moi vous êtes excusé, seigneur, dit-il. Vous avez choisi le Soir ; mais mon amour est voué au Matin. Et mon cœur m’avertit qu’il passera bientôt à jamais de ces terres. »

Vint enfin le jour du départ, et une grande et belle compagnie s’apprêta à quitter la Cité pour chevaucher au nord. Alors, les rois du Gondor et du Rohan se rendirent au Sanctuaire et vinrent aux tombeaux de Rath Dínen, et ils emportèrent le roi Théoden sur un brancard d’or et passèrent en silence à travers la Cité. Puis ils posèrent le brancard sur un grand chariot entouré de Cavaliers du Rohan et précédé de sa bannière ; et Merry, en tant qu’écuyer du roi, monta dans le chariot et veilla sur les armes du roi.

Aux autres Compagnons, on fournit des coursiers qui convenaient à leur stature ; et Frodo et Sam chevauchèrent au côté d’Aragorn, et Gandalf monta Scadufax, et Pippin alla avec les chevaliers du Gondor ; et Legolas et Gimli, comme toujours, chevauchèrent ensemble sur Arod.

À cette chevauchée se joignirent également la reine Arwen, et Celeborn et Galadriel avec les leurs, et Elrond et ses fils ; et les princes de Dol Amroth et d’Ithilien, et de nombreux capitaines et chevaliers. Jamais aucun roi de la Marche n’avait eu si grandiose compagnie sur la route que celle de Théoden fils de Thengel regagnant la terre de ses ancêtres.

Sans hâte et en paix, ils passèrent en Anórien et parvinrent au Bois Gris sous l’Amon Dîn ; et là, ils entendirent un son comme celui de tambours battant dans les collines, bien qu’il ne se vît pas un seul être vivant. Aragorn fit alors sonner des trompettes ; et les hérauts crièrent :

« Voyez, le roi Elessar se tient parmi vous ! À Ghân-buri-Ghân et à son peuple, il cède la Forêt de Drúadan, qui sera à jamais leur territoire ; et que nul homme n’y entre désormais sans leur consentement ! »

Sur ce, les tambours roulèrent puissamment, et se turent.

Enfin, après un voyage de quinze jours, le chariot de Théoden traversa les prés verts du Rohan et parvint à Edoras ; et tous s’y reposèrent. La Salle Dorée fut décorée de belles tentures et elle fut remplie de lumière, et l’on y tint le plus somptueux festin jamais vu sous son toit depuis les jours de sa construction. Car après trois jours, les Hommes de la Marche préparèrent les funérailles de Théoden ; et il fut enseveli dans une maison de pierre avec ses armes et beaucoup d’autres belles choses qu’il avait eues en sa possession, et une grande butte fut élevée au-dessus de lui, recouverte de gazon vert et de mémoires éternelles aux fleurs blanches. Et il y eut alors huit monticules sur le côté est du Champ de Tertres.

Alors, les Cavaliers de la Maison du Roi, montés sur des chevaux blancs, défilèrent en cercles autour du tertre et chantèrent ensemble un chant à la mémoire de Théoden fils de Thengel composé par son ménestrel Gléowine, et ce fut le dernier chant qu’il composa. La voix lente des Cavaliers suffit à remuer le cœur de ceux qui ne connaissaient pas la langue de ce peuple ; mais les mots allumèrent une flamme dans les yeux des gens de la Marche tandis que remontaient lointainement à leurs oreilles le tonnerre des sabots du Nord et la voix d’Eorl s’élevant au-dessus de la mêlée du Champ de la Celebrant ; et l’histoire des rois se déroula de suite, et le cor de Helm retentit dans les montagnes, jusqu’à ce que vînt l’Obscurité, que le roi Théoden se levât et chevauchât à travers l’Ombre jusqu’au feu, et mourût dans la gloire, au moment même où le Soleil revenait contre tout espoir, et luisait au matin sur le Mindolluin.

Par-delà la pénombre et par-delà le doute,

il vit poindre le jour et l’espoir se lever,

chantant sous le soleil et dégainant l’épée.

L’espoir il ranima et dans l’espoir finit ;

porté outre la mort, la peur et le malheur,

et par-delà le deuil, dans la gloire éternelle.

Mais Merry se tint au pied du tertre vert, et il pleurait ; et quand le chant fut achevé, il se leva et cria :

« Théoden Roi ! Théoden Roi ! Adieu ! Vous fûtes pour moi comme un père, pour une brève période. Adieu ! »

Quand la cérémonie fut terminée, les pleurs des femmes apaisés, et Théoden enfin laissé seul dans son tertre, alors les gens s’assemblèrent dans la Salle Dorée pour le grand festin et se détournèrent de leur peine ; car Théoden avait atteint sa pleine vieillesse et connu une fin honorable qui n’avait rien à envier au plus illustre de ses ancêtres. Et quand vint le temps de boire à la mémoire des rois, comme le voulait la coutume de la Marche, Éowyn la Dame du Rohan s’avança, dorée comme les rayons et blanche comme la neige, et elle porta une coupe pleine à Éomer.