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Pendant tout le temps que Juve avait parlé, celui qui passait pour être M. Mix était demeuré impassible… Toutefois son visage avait quelque peu pâli !

En l’espace de quelques secondes, en effet, le célèbre inspecteur de la Sûreté avait démasqué le bandit et prouvé de la façon la plus formelle que M. Mix et Fantômas ne faisaient qu’un !

Juve, dès lors, se précipitait vers Fantômas, lequel s’était reculé jusqu’au mur. Il braquait sur lui son revolver. Le bandit fouilla sa poche, comptant y trouver une arme… Ce fut en vain !

Fantômas aussitôt devint blafard !

— Malédiction ! grommela-t-il, Juve m’a volé !

Le policier n’abaissait point son arme.

— Je vous ai volé, en effet, fit-il, et je m’en vante ! J’ai acquis une certaine habitude du vol à la tire, dans un milieu que je fréquente depuis quelque temps ! Je me félicite d’avoir débuté par des exercices, par des vols commis sur la personne de Fantômas !

« Vous voilà donc hors d’état de nuire ! Tenu en respect sous la menace de mon revolver…

« Le vôtre est dans ma poche. N’essayez point de venir l’y prendre ! Je possède également votre portefeuille, Fantômas ! Allons ! allons ! tout va bien !…

« Il ne vous reste plus qu’à vous rendre !

— Jamais ! commença Fantômas.

Mais à ce moment le bandit poussait un cri rauque. Il trébuchait en arrière ; le mur contre lequel il s’était appuyé venait, semblait-il, de s’effondrer sous la poussée ! En réalité, c’était la porte dissimulée dans la boiserie qui s’ouvrait, et M. Havard surgissait !

Le chef de la Sûreté n’était pas de ces hommes qui dédaignent d’agir par eux-mêmes !

Profitant du désarroi de Fantômas et de la chute qu’il faisait en arrière, aidé de Juve qui bondissait sur lui à son tour, M. Havard, en l’espace d’un clin d’œil, passait au célèbre inspecteur des menottes et un cabriolet, qui servaient à Juve pour immobiliser Fantômas !

Désormais le redoutable bandit était pris ! réduit à l’impuissance ! presque à l’immobilité !

Juve et Havard l’avaient obligé à se relever, ils le considéraient les yeux dans les yeux, haletants.

Nul ne proférait une parole. Au surplus qu’auraient-ils pu dire, dans ce tragique tête-à-tête où trois hommes se trouvaient en présence, parmi lesquels deux implacables adversaires, Juve et Fantômas ?

Il semblait toutefois que le bandit était capturé… bien capturé, et que désormais on pouvait être assuré que les précautions les plus grandes seraient prises pour qu’il ne s’échappât point !

Les trois hommes frémissaient. Fantômas toutefois, après son émotion première, laissait errer sur ses lèvres un sourire railleur.

— Eh bien, interrogea-t-il, que faisons-nous ici ?

M. Havard toutefois félicitait le policier :

— Je comprends, maintenant, fit-il, tout votre plan ! Vous aviez démasqué Fantômas depuis quarante-huit heures, et vous vouliez l’arrêter ici, chez moi ! C’est bien, Juve ! Je vous félicite ! Je comprends également, ajoutait le chef de la Sûreté, pourquoi vous avez fait venir cette voiture cellulaire qui doit être actuellement à la porte de ma demeure. C’est pour lui confier Fantômas ?

— Confier, n’est pas le mot ! fit Juve. Je me propose, monsieur le chef de la Sûreté, d’accompagner notre prisonnier jusqu’à la Santé dans cette voiture cellulaire !

« Fantômas est un homme habile… Je me plais à le reconnaître, et je tiens à le surveiller jusqu’au cachot !

M. Havard exultait.

— Je vous accompagnerai Juve, et peut-être ne serons-nous pas trop de deux pour surveiller le bandit !

Havard se précipitait sur l’appareil téléphonique, demandait la communication avec la permanence de la préfecture. Il entrait en rapport avec l’inspecteur Michel.

— Une capture intéressante ! criait-il ; venez d’urgence à la prison de la Santé, avec votre collègue Léon !

Fantômas avait entendu cela. Ironiquement, il railla :

— Que de précautions, messieurs ! Vraiment on dirait que vous avez bien peur de moi !…

M. Havard ne daignait point répondre. Quant à Juve, haussant les épaules, il se contentait d’articuler :

— Allons ! en route ! Descendons !

L’escalier était large. Ce fut un spectacle tragique que celui de ces trois hommes qui le descendaient lentement. Fantômas s’avançait les mains liées derrière le dos, étroitement maintenu par Juve et par Havard, qui se tenaient de part et d’autre devant lui…

Il semblait que tout d’un coup, depuis qu’on descendait l’escalier, le Génie du crime avait compris qu’il était arrêté, que sa capture était chose faite et que, malgré toute son intelligence et sa volonté, il ne saurait triompher d’une solide paire de menottes, d’un robuste cabriolet ! Son visage avait quelque chose de sinistre et de farouche ; une expression qui n’échappait ni à Juve, ni à Havard…

Les trois hommes passaient inaperçus devant la loge enfumée du concierge, petite soupente qui, dans cette vieille maison, donnait sur la cour.

Lorsqu’ils arrivèrent sur le trottoir, les trois hommes poussèrent un cri.

Juve et Havard manifestaient leur satisfaction : la voiture cellulaire était là, avec un garde municipal debout près de la porte entrouverte.

Chose étrange, Fantômas, à la vue de cet appareil, ne semblait pas autrement ennuyé… Son visage, qui jusqu’alors semblait inquiet, exprima également la satisfaction.

— Eh bien ! articula-t-il, feignant l’indifférence, montons, messieurs !

M. Havard passait le premier, s’en allait au fond du couloir. Fantômas gravissait ensuite les marches de là voiture et venait se placer dans une des petites cellules réservées aux prisonniers qu’on transporte.

Juve montait ensuite, non sans avoir crié au cocher :

— À la Santé !

Puis, c’était au tour du municipal de s’installer dans le vestibule, qui démarra lourdement…

Quarante minutes s’étaient écoulées, que la voiture cellulaire roulait toujours.

On était horriblement secoué, elle allait à très vive allure ; les chevaux, perpétuellement stimulés par le fouet du cocher, sans cesse galopaient…

Juve et Havard, qui se tenaient dans le couloir étroit du véhicule, à deux ou trois reprises s’étaient dit :

— Quel drôle de chemin prend cet homme ! comment se fait-il que nous ne soyons pas arrivés, surtout du train dont nous marchons ?

À vrai dire ce n’était pas là leur principale préoccupation : ils s’inquiétaient surtout de Fantômas.

Il ne se passait pas de minute qu’ils ne jetassent un coup d’œil sur leur prisonnier. Or, celui-ci ne bronchait pas, demeurait impassible dans se petite cellule.

À un moment donné, la voiture s’arrêta.

Mais la voix du cocher retentit. L’homme criait :

— Porte, s’il vous plaît !

On attendit quelques secondes :

— Nous sommes arrivés ! dit Juve en se penchant à l’oreille de M. Havard.

La voiture cellulaire s’ébranlait à nouveau ; il y eut une violente secousse, faisant remarquer qu’on passait sur un caniveau… Puis, ayant franchi une voûte sonore, la voiture s’arrêta dans une cour…