— Inutile d’en dire plus, Elijah ! dit R. Daneel en s’interposant. Il est sincère et il nous aidera. La cérébroanalyse le prouve de façon évidente.
— Parfait ! Dans ces conditions, je vais rentrer chez moi. J’ai besoin de retrouver Jessie et Bentley, et de reprendre une existence normale. Et puis, j’ai aussi besoin de dormir ! Dites-moi, Daneel, est-ce que vous resterez sur la Terre quand les Spaciens vont s’en aller ?
— Je ne sais pas, dit le robot, on ne m’a pas avisé… Pourquoi me demandez-vous cela ?
Baley se mordit la lèvre et répondit :
— Je n’aurais jamais pensé qu’un jour je pourrais dire quelque chose de ce genre à une créature telle que vous, Daneel. Mais voilà : j’ai confiance en vous, et même je vous admire. Je suis moi-même trop âgé pour jamais songer à quitter la Terre, mais quand on aura jeté les bases de nouvelles écoles d’émigration, il y aura Bentley à qui il faudra songer. Et si, un jour, Bentley et vous, vous pouvez travailler ensemble…
— Peut-être ! répliqua R. Daneel, toujours aussi impassible.
Il se tourna vers Julius Enderby qui les observait tous deux, et dont le visage flasque commençait seulement à reprendre quelque couleur.
— Mon cher Julius, lui dit-il, j’ai essayé ces jours-ci de comprendre diverses remarques sur lesquelles Elijah a attiré mon attention. Peut-être suis-je sur la bonne voie, car voici que je viens de me rendre compte d’une réalité qui ne m’avait jamais encore frappé : il me semble moins juste et moins souhaitable de détruire ce qui ne devrait pas exister – autrement dit ce que vous appelez, vous, le mal – que de transformer ce mal en ce que vous appelez le bien.
Il hésita un peu, puis, comme s’il semblait presque surpris des termes dont il se servait, il ajouta :
— Allez, et ne péchez plus !
Baley, soudain tout souriant, entraîna R. Daneel vers la porte, et ils s’en allèrent tous deux, bras dessus bras dessous.