L’oiseau du ciel.
Vous dites, beauté superbe
Au front terni,
Regardant tour à tour l’herbe
Et l’infini:
«Leur existence est la bonne;
«Là, tout est beau;
«Là, sur la fleur qui rayonne,
«Plane l’oiseau!
«Près de vous, aile bénie,
«Lis enchanté,
«Qu’est-ce, hélas! que le génie
«Et la beauté?
«Fleur pure, alouette agile,
«À vous le prix!
«Toi, tu dépasses Virgile;
«Toi, Lycoris!
«Quel vol profond dans l’air sombre!
«Quels doux parfums! -»
Et des pleurs brillent sous l’ombre
De vos cils bruns.
Oui, contemplez l’hirondelle,
Les liserons;
Mais ne vous plaignez pas, belle,
Car nous mourrons!
Car nous irons dans la sphère
De l’éther pur;
La femme y sera lumière,
Et l’homme azur;
Et les roses sont moins belles
Que les houris;
Et les oiseaux ont moins d’ailes
Que les esprits!
Août 18…
XX. Il fait froid
L’hiver blanchit le dur chemin.
Tes jours aux méchants sont en proie.
La bise mord ta douce main;
La haine souffle sur ta joie.
La neige emplit le noir sillon.
La lumière est diminuée… -
Ferme ta porte à l’aquilon!
Ferme ta vitre à la nuée!
Et puis laisse ton cœur ouvert!
Le cœur, c’est la sainte fenêtre.
Le soleil de brume est couvert;
Mais Dieu va rayonner peut-être!
Doute du bonheur, fruit mortel;
Doute de l’homme plein d’envie;
Doute du prêtre et de l’autel;
Mais crois à l’amour, ô ma vie!
Crois à l’amour, toujours entier,
Toujours brillant sous tous les voiles!
À l’amour, tison du foyer!
À l’amour, rayon des étoiles!
Aime et ne désespère pas.
Dans ton âme où parfois je passe,
Où mes vers chuchotent tout bas,
Laisse chaque chose à sa place.
La fidélité sans ennui,
La paix des vertus élevées,
Et l’indulgence pour autrui,
Éponge des fautes lavées.
Dans ta pensée où tout est beau,
Que rien ne tombe ou ne recule.
Fais de ton amour ton flambeau.
On s’éclaire de ce qui brûle.
À ces démons d’inimitié,
Oppose ta douceur sereine,
Et reverse-leur en pitié
Tout ce qu’ils t’ont vomi de haine.
La haine, c’est l’hiver du cœur.
Plains-les! mais garde ton courage.
Garde ton sourire vainqueur;
Bel arc-en-ciel, sors de l’orage!
Garde ton amour éternel.
L’hiver, l’astre éteint-il sa flamme?
Dieu ne retire rien du ciel;
Ne retire rien de ton âme!
Décembre 18…
XXI .
Il lui disait: «Vois-tu, si tous deux nous pouvions,
«L’âme pleine de foi, le cœur plein de rayons,
«Ivres de douce extase et de mélancolie,
«Rompre les mille nœuds dont la ville nous lie;
«Si nous pouvions quitter ce Paris triste et fou,
«Nous fuirions; nous irions quelque part, n’importe où,
«Chercher loin des vains bruits, loin des haines jalouses,
«Un coin où aurions des arbres, des pelouses,
«Une maison petite avec des fleurs, un peu
«De solitude, un peu de silence, un ciel bleu,
«La chanson d’un oiseau qui sur le toit se pose,
«De l’ombre; – et quel besoin avons-nous d’autre chose?»
Juillet 18…
XXII .
– Aimons toujours! aimons encore!
Quand l’amour s’en va, l’espoir fuit.
L’amour, c’est le cri de l’aurore,