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L’amour, c’est l’hymne de la nuit.

Ce que le flot dit aux rivages,

Ce que le vent dit aux vieux monts,

Ce que l’astre dit aux nuages,

C’est le mot ineffable: Aimons!

L’amour fait songer, vivre et croire.

Il a, pour réchauffer le cœur,

Un rayon de plus que la gloire,

Et ce rayon, c’est le bonheur!

Aime! qu’on les loue ou les blâme,

Toujours les grands cœurs aimeront:

Joins cette jeunesse de l’âme

À la jeunesse de ton front!

Aime, afin de charmer tes heures!

Afin qu’on voie en tes beaux yeux

Des voluptés intérieures

Le sourire mystérieux!

Aimons-nous toujours davantage!

Unissons-nous mieux chaque jour.

Les arbres croissent en feuillage;

Que notre âme croisse en amour!

Soyons le miroir et l’image!

Soyons la fleur et le parfum!

Les amants, qui, seuls sous l’ombrage,

Se sentent deux et ne sont qu’un!

Les poëtes cherchent les belles.

La femme, ange aux chastes faveurs,

Aime à rafraîchir sous ses ailes

Ces grands fronts brûlants et rêveurs.

Venez à nous, beautés touchantes!

Viens à moi, toi, mon bien, ma loi!

Ange! viens à moi quand tu chantes,

Et, quand tu pleures, viens à moi!

Nous seuls comprenons vos extases;

Car notre esprit n’est point moqueur;

Car les poëtes sont les vases

Où les femmes versent leur cœur.

Moi qui ne cherche dans ce monde

Que la seule réalité,

Moi qui laisse fuir comme l’onde

Tout ce qui n’est que vanité,

Je préfère, aux biens dont s’enivre

L’orgueil du soldat ou du roi,

L’ombre que tu fais sur mon livre

Quand ton front se penche sur moi.

Toute ambition allumée

Dans notre esprit, brasier subtil,

Tombe en cendre ou vole en fumée,

Et l’on se dit: «Qu’en reste-t-il?»

Tout plaisir, fleur à peine éclose

Dans notre avril sombre et terni,

S’effeuille et meurt, lis, myrte ou rose,

Et l’on se dit: «C’est donc fini!»

L’amour seul reste. Ô noble femme,

Si tu veux, dans ce vil séjour,

Garder ta foi, garder ton âme,

Garder ton Dieu, garde l’amour!

Conserve en ton cœur, sans rien craindre,

Dusses-tu pleurer et souffrir,

La flamme qui ne peut s’éteindre

Et la fleur qui ne peut mourir!

Mai 18…

XXIII. Après l’hiver

Tout revit, ma bien-aimée!

Le ciel gris perd sa pâleur;

Quand la terre est embaumée,

Le cœur de l’homme est meilleur.

En haut, d’où l’amour ruisselle,

En bas, où meurt la douleur,

La même immense étincelle

Allume l’astre et la fleur.

L’hiver fuit, saison d’alarmes,

Noir avril mystérieux

Où l’âpre sève des larmes

Coule, et du cœur monte aux yeux.

Ô douce désuétude

De souffrir et de pleurer!

Veux-tu, dans la solitude,

Nous mettre à nous adorer?

La branche au soleil se dore

Et penche, pour l’abriter,

Ses boutons qui vont éclore

Sur l’oiseau qui va chanter.

L’aurore où nous nous aimâmes

Semble renaître à nos yeux;

Et mai sourit dans nos âmes

Comme il sourit dans les cieux.

On entend rire, on voit luire

Tous les êtres tour à tour,

La nuit, les astres bruire,

Et les abeilles, le jour.

Et partout nos regards lisent,

Et, dans l’herbe et dans les nids,

De petites voix nous disent:

«Les aimants sont les bénis!»

L’air enivre; tu reposes

À mon cou tes bras vainqueurs. -

Sur les rosiers que de roses!

Que de soupirs dans nos cœurs!

Comme l’aube, tu me charmes;

Ta bouche et tes yeux chéris