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Quand j’ai été bien aspergé, giclé, briqué, séché, la Loïca me pilote jusqu’à la salle de massage. Là, je me dis qu’il va m’être most difficult de conserver mon innocence de jeune fille. Sitôt que la sublime portera les mains sur mon épiderme, le Belge sortira du tombeau, comme dans la Brabançonne.

Surtout lorsque cette fifille atteindra la région équatoriale de ma personne. D’accord, j’ai conservé mon slip, mais Coquette-à-deux-roues ne s’est jamais laissé brimer par quelques centimètres carrés de cent pour cent coton.

Je m’allonge sur la table. Elle étale sur moi une grande serviette de bain et puis vaque. Quinze secondes plus tard, un gonzier grand comme l’Arc de Triomphe, mais un peu plus trapu, vient me rejoindre.

Lui aussi porte un badge sur la poitrine. Il a un prénom composé, voire composite ; il se prénomme Albain-Michel, ce qui m’incite à méditer.

Plus velu que sa pomme, ça existe, mais au zoo seulement et ça se masturbe en public.

— Bonjour, bonjour, il me fait ; tout joyce, en me présentant une main grande comme un Super-Etendard (sanglant élevé) faisant du rase-mottes. J’hasarde ma dextre dans cette tétine de vache fendue et mise à plat.

Un instant, je me fais l’effet de l’étourdi qui veut rattraper son monocle tombé dans le broyeur à ordures de sa cuisine. Et puis bon, King-Kong (plus Kong que King, ou alors King des Kongs) se met à me malaxer et alors, de lièvre en marinade que j’étais naguère, me voilà devenu pâte à millefeuille.

— C’est la première fois que vous venez à l’Apollon ? me demande ce belvédère ambulant.

Je confirme.

— Vous avez raison, approuve-t-il. On vit des temps qu’il faut se ménager ou alors on craque.

Je joins mon approbation pleine et entière à cette définition massive.

Bon, je suis tombé entre les pattes d’un bavard. Rien de plus chiant que d’être massé par quelqu’un qui jacte, et donc déconne, sans arrêt. En l’occurrence, je dois tirer profit de ce défaut.

J’explique au roi des Kongs que j’ai lié connaissance, en avion, avec un client de l’institut. J’ignore son nom. On a bavardé. Il m’a tellement vanté les mérites de ce club que j’ai eu envie de le pratiquer à mon tour.

Ça ne rate pas, le surpoilu veut savoir absolument à quoi ressemblait cet habitué enthousiaste.

Là, en policier compétent, je place une description minutieuse de l’homme qui me précéda dans les miches de Mlle Francine Chocote.

— Mais c’est M. Prince !

Et d’ajouter :

— Justement, il est là, il fait de la lampe, vous allez pouvoir lui dire bonjour !

Je ferme les yeux sur le bonheur brutal qui me pénètre de partout. Décidément, t’auras beau dire, Dieu existe. Dieu merci.

CHAPITRE XIV

PÉRIPÉTIES

Maintenant, j’essuie l’embrocation dont m’a embroqué le berger des Pyrénées chargé de me masser.

— Mais quoi donc ! Mais que faites-vous ! il époustoufle.

La première fois, excepté avec la dame qui avait pris trop de Pursénide, la première fois qu’un client lui échappe des pattounes en début de séance.

— Massez-vous la prostate en m’attendant, lui conseillé-je, ça pourra vous être utile un jour. Je viens de me rappeler que je n’ai pas coupé le moteur de ma voiture.

Et l’Antonio sort des massageries maritimes loqué en empereur romain.

Le vestiaire. Il est pourvu d’armoires en fer dont chacune ferme à clé. Il y en a quatre. Trois sont ouvertes et donc vides. Reste donc la mienne et celle de M. Prince ; déponner cette dernière est une historiette pour noces et banquets. Cric, crac, merci, Kodak. Le vergeur de Francine se saboule chez Smalto, fringues super-classe. Gris croisé à très fines rayures. Je plonge mes doigts dans ses vagues. D’entrée de fouille, je déniche son mignon pistolet extra-plat pour le costar de ville. Petit calibre, mais de précision, et qui tire des bastos explosives, s’il vous plaît. Moi, je le trouve bien hardi de débarquer à l’institut avec un tel excédent de bagages, m’sieur Prince. C’est un engagé, ce gus.

Je visite son portefeuille. J’y trouve sa carte de membre de l’Apollon, son permis de conduire au nom de Flavien Prince, né à Nogent-sur-Seine le 14 mars 1943, une carte d’identité au même blaze, deux mille francs suisses, trois mille cinq cents francs bassement français, cinq cents dollars et la photo craquelée d’une dame d’un certain âge et à l’aspect sévère qui doit être sa mère car il lui ressemble.

J’empoche sa carte d’identité, vide le chargeur de son pétard, remets tout en place et vais à la recherche de la pièce de bronzage. Prince paraît very beau gosse sur ses photos d’identité. Sa mise et sa fréquentation de la lampe à UV révèlent sa coquetterie.

Je me tâte, me demandant quelle est la meilleure conduite à adopter : attendre et voir, ou voir sans attendre ?

Mon tempérament d’alezan sauvage me fait opter pour la seconde soluce.

Je cherche autour de moi, en quête de ce qu’il me faut. Le trouve, comme toujours, la providence m’étant charitable.

* * *

La porte n’est pas fermée à clé, d’ailleurs cela n’aurait rien changé à mon intrusion, tu t’en doutes.

J’entre donc dans une toute petite pièce meublée d’une espèce de sarcophage chromé, qui répand une lumière d’arc à souder, et d’une chaise.

Mon client est allongé dans le sarcophage dont le couvercle reste à une vingtaine de centimètres de son corps. L’appareil bronze urbi et orbi. Tel le steak dans son cuiseur, il te fait dorer la couenne côté pile et côté face en même temps.

Une minuterie grignote les secondes avec un bruit de rongeur en train de bouffer un gros réveille-matin.

— Ça se passe bien, monsieur Prince ? lancé-je à la canonnade (Béru dixit).

Il me prend pour un employé du club et répond, enjoué :

— Ça boume, Raymond, ça boume.

Faudra que je tâche à visionner le Raymond en question, voir ce qui peut amener cette confusance.

Je développe la grosse sangle que je viens de prélever sur l’enrouloir du volet pliant.

Je n’aperçois pas le visage de mon petit pote, because le couvercle baissé. Pour le voir, je devrais m’accroupir, mais je tiens à ne pas être vu de lui.

— Bougez pas, m’sieur Prince, lui fais-je, le couvercle n’est pas dans sa bonne position, je vous arrange ça en deux coups les gros.

Je balance la sangle par-dessus l’appareil, pèse violemment sur le couvercle, ramasse l’autre extrémité de la sangle et, m’étant placé à califourchon sur le couvercle, bien qu’il soit très chaud et me roussisse les roustons, je fais un nœud express. La manœuvre m’est facilitée par la boucle que j’avais exécutée préalablement.

A présent, M. Prince est kif une tranche de jambon dans le sandwich. Bloqué à mort entre les deux parties du coffre de lumière. Il se fout à gueuler et à ruer, mais sa voix est assourdie et ses efforts physiques restent vains.

— Il fait chaud, pas vrai, m’sieur Prince ? rigolé-je. Imaginez que vous êtes sur une plage du Sénégal en plein midi.

Il rameute, le frère. Affolé en plein, se demandant ce qui lui arrive. Dépassé par l’événement san-antonien, le malheureux !

— Inutile de pousser cette bramée, m’sieur Prince, déclaré-je. D’ailleurs, bougez pas, je vois qu’il y a un diffuseur musical dans tout l’institut, je vais vous mettre un petit air.