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— Mais de quoi parle-t-il ? demanda lord Snow à la prêtresse rouge.

— De votre sœur. » Mélisandre lui posa une main sur le bras. « Vous ne pouvez pas l’aider, mais lui le peut. »

Snow libéra son bras d’une secousse. « Je ne crois pas. Vous ne connaissez pas cette créature. Clinquefrac pourrait cent fois se laver les mains, il aurait toujours du sang sous les ongles. Il serait plus capable de violer et d’assassiner Arya que de la sauver. Non. Si c’est cela que vous avez vu dans vos feux, madame, vous deviez avoir quelque cendre dans l’œil. Qu’il tente de quitter Châteaunoir sans mon assentiment, et je le ferai décapiter. »

Il ne me laisse pas le choix. Eh bien, soit. « Devan, laisse-nous », demanda-t-elle, et le garçon s’éclipsa en refermant la porte derrière lui.

Mélisandre toucha le rubis à son cou et prononça un mot.

Le son se répercuta de curieuse façon dans les recoins de la pièce et se tortilla comme un ver dans leurs oreilles. Le sauvageon entendit un mot et le corbeau un autre. Aucun n’était celui qui avait quitté les lèvres de la prêtresse rouge. Le rubis au poignet du sauvageon s’assombrit, et les fumerolles de lumière et d’ombre qui l’entouraient se tordirent et s’effacèrent.

Les os demeurèrent – les côtes qui s’entrechoquaient, les griffes et les dents au long de ses bras et de ses épaules, la grande clavicule jaunie en travers de ses épaules. Le crâne brisé de géant demeura un crâne brisé de géant, terni et fendu, ricanant d’un sourire sali et féroce.

Mais la pointe de cheveux sur le front fondit. La moustache brune, le menton osseux, la chair jaune et hâve et les petits yeux sombres, tout cela s’en fut, dissous. Des doigts gris se coulèrent à travers de longs cheveux bruns. Des rides de rire apparurent aux coins de sa bouche. Subitement, il était plus grand qu’avant, plus large de torse et de carrure, plus long de jambes et mince, le visage glabre et tanné par le vent.

Les yeux gris de Jon Snow s’écarquillèrent. « Mance ?

— Lord Snow. » Mance Rayder ne sourit pas.

« Elle vous a fait brûler !

— Elle a fait brûler le Seigneur des Os. »

Jon Snow se tourna vers Mélisandre. « Quelle est cette sorcellerie ?

— Appelez cela comme vous le voudrez. Charme, simulacre, illusion. R’hllor est Maître de la Lumière, Jon Snow, et il est accordé à ses serviteurs de la tisser, comme d’autres tissent le fil. »

Mance Rayder gloussa. « J’avais des doutes, moi aussi, Snow, mais pourquoi ne pas la laisser essayer ? C’était cela, ou laisser Stannis me rôtir.

— Les os apportent une assistance, expliqua Mélisandre. Les os se souviennent. Les plus solides charmes s’architecturent sur de tels éléments. Les bottes d’un mort, une poignée de cheveux, un sac de phalanges. Avec des mots chuchotés et une prière, on peut tirer l’ombre d’un homme de telles choses, pour en draper un autre comme d’une cape. L’essence de celui qui la revêt ne change pas, uniquement son apparence. »

À l’écouter, cela était simple, et facile. Ils n’avaient pas besoin de savoir combien cela avait été ardu, ni le prix qu’elle avait payé. C’était une leçon que Mélisandre avait apprise bien avant Asshaï ; moins la sorcellerie semble requérir d’efforts, et plus les hommes redoutent le sorcier. Quand les flammes avaient léché Clinquefrac, le rubis à sa gorge était devenu si brûlant qu’elle avait craint que sa propre chair ne commençât à fumer et à noircir. Heureusement, lord Snow l’avait délivrée de cette douleur avec ses flèches. Alors que Stannis bouillait devant ce geste de défi, elle avait frémi de soulagement.

« Notre faux roi a des dehors revêches, assura Mélisandre à Jon Snow, mais il ne vous trahira pas. Nous détenons son fils, souvenez-vous. Et il vous doit la vie.

— À moi ? » Snow parut stupéfait.

— À qui sinon, messire ? Seul son sang pouvait payer ses crimes, selon vos lois, et Stannis Baratheon n’est pas homme à aller à l’encontre de la loi… Mais ainsi que vous l’avez affirmé avec tant de sagesse, les lois des hommes s’arrêtent au Mur. Je vous ai dit que le Maître de la Lumière entendrait vos prières. Vous cherchiez un moyen de sauver votre petite sœur tout en vous agrippant à cet honneur, qui signifie tant pour vous, aux vœux que vous avez prononcés devant votre dieu de bois. » Elle tendit un doigt pâle. « Le voici, lord Snow. Le salut d’Arya. Un présent du Maître de la Lumière… et de moi. »

Schlingue

Tout d’abord, il entendit les filles, aboyant dans leur course de retour au bercail. Le tambour des sabots résonnant sur les dalles le remit debout d’un bond, dans un cliquetis de fers. Celui qu’il portait entre ses chevilles ne mesurait pas plus d’un pied de long, réduisant sa foulée à des pas chassés. On avait du mal à se déplacer rapidement ainsi, mais il fit son possible, sautant en tintant à bas de sa couchette. Ramsay Bolton était de retour et voudrait avoir son Schlingue à portée de main pour le servir.

Dehors, sous de froids cieux d’automne, les chasseurs se déversaient par les portes. Ben-les-Os ouvrait la voie, les filles hurlant et aboyant autour de lui. Derrière venaient l’Écorcheur, Alyn le Rogue et Damon Danse-pour-moi, avec son long fouet graissé, puis les Walder montant les poulains gris que leur avait offerts lady Dustin. Sa Seigneurie elle-même chevauchait Sang, un étalon rouge au caractère voisin du sien. Il riait. Cela pouvait être très bon, ou très mauvais, comme Schlingue le savait.

Les chiennes, attirées par son odeur, se jetèrent sur lui avant qu’il ait pu déterminer ce qu’il en était. Elles adoraient Schlingue ; il dormait la plupart du temps avec elles, et Ben-les-Os lui laissait parfois partager leur dîner. La meute courait sur les dalles en aboyant, lui tournant autour, en sautant pour lécher son visage crasseux, lui mordillant les jambes. Helicent lui attrapa la main gauche dans ses crocs et joua avec tant de férocité que Schlingue craignit d’y perdre deux doigts supplémentaires. Jeyne la Rouge lui sauta à la poitrine et le fit tomber. Elle était tout en muscles fins et durs, alors que Schlingue n’était que peau grise et lâche et os fragiles, un crevard aux cheveux blancs.

Le temps qu’il repoussât Jeyne la Rouge et se remît tant bien que mal à genoux, les cavaliers sautaient de selle. Ils étaient partis une vingtaine, et une vingtaine revenait ; cela signifiait que les recherches se soldaient par un échec. Mauvaise affaire. Ramsay ne goûtait point la saveur de l’échec. Il sera d’humeur à faire souffrir quelqu’un.

Dernièrement, son seigneur avait été contraint de se retenir, car Tertre-bourg était rempli d’hommes dont la maison Bolton avait besoin, et Ramsay savait se montrer prudent auprès des Dustin, Ryswell et autres nobliaux alliés. Devant eux, il s’affichait toujours courtois et souriant. Derrière les portes closes, il était bien autre.

Ramsay Bolton était vêtu ainsi qu’il convenait au sire de Corbois et à l’héritier de Fort-Terreur. Son manteau était un assemblage de peaux de loups cousues, fermé contre la froidure de l’automne par les crocs jaunis de la tête de loup sur son épaule droite. À une hanche, il portait un fauchon, avec une lame aussi épaisse et lourde qu’un couperet ; à l’autre, un long poignard et un petit couteau courbe d’écorcheur à la pointe en crochet et au fil tranchant comme celui d’un rasoir. Les trois lames s’ornaient de poignées assorties en os jauni. « Schlingue, appela Sa Seigneurie du haut de sa selle, tu pues. Je peux te sentir de l’autre côté de la cour.