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Je ne sais pas pourquoi la ville M'ouvre ses remparts de faubourgs Pour me laisser glisser fragile Sous la pluie parmi ses amours Je ne sais pas pourquoi ces gens Pour mieux célébrer ma défaite Pour mieux suivre l'enterrement Ont le nez collé aux fenêtres Je ne sais rien de tout cela Mais je sais que je t'aime encore
Je ne sais pas pourquoi ces rues S'ouvrent devant moi une à une Vierges et froides, froides et nues Rien que mes pas et pas de lune Je ne sais pas pourquoi la nuit Jouant de moi comme guitare M'a forcé à venir ici Pour pleurer devant cette gare Je ne sais rien de tout cela Mais je sais que je t'aime encore
Je ne sais pas à quelle heure part Ce triste train pour Amsterdam Qu'un couple doit prendre ce soir Un couple dont tu es la femme Et je ne sais pas pour quel port Part d'Amsterdam ce grand navire Qui brise mon cœur et mon corps Notre amour et mon avenir Je ne sais rien de tout cela Mais je sais que je t'aime encore Mais je sais que je t'aime encore

Je prendrai

1958

Je prendrai Dans les yeux d'un ami Ce qu'il y a de plus chaud,de plus beau Et de plus tendre aussi Qu'on ne voit que deux ou trois fois Durant toute une vie Et qui fait que cet ami est notre ami
Je prendrai Un nuage de ma jeunesse Qui passait rond et blanc Par-dessus ma tête et souvent Et qui aux jours de faiblesse Ressemblait à ma mère Et aux jours de colère à un lion Un beau nuage douillet et rond et confortable
Je prendrai Ce ruisseau clair et frêle d'avril Qui disparaît aux premiers froids Qui disparaît tout l'hiver Et coule alors paraît-il sur la table des Noces de Cana
Je prendrai Ma lampe, ma meilleure Pas celle qui éclaire Non, celle qui illumine Et rend joli et appelle de loin
Je prendrai Un lit, un grand, le mien Et qui sait ce que c'est qu'un homme Et son chagrin Un grand lit d'être humain
Je prendrai tout cela Et puis je bâtirai Je bâtirai et j'appellerai les gens Qui passeront dans la rue Et je leur montrerai Ma crèche de Noël

Je suis un soir d'été

Paroles et Musique: Jacques Brel 1968

Et la sous-préfecture Fête la sous-préfète Sous le lustre à facettes Il pleut des orangeades Et des champagnes tièdes Et des propos glacés Des femelles maussades De fonctionnarisés Je suis un soir d'été
Aux fenêtres ouvertes Les dîneurs familiaux Repoussent leurs assiettes Et disent qu'il fait chaud Les hommes lancent des rots De chevaliers teutons Les nappes tombent en miettes Par-dessus les balcons Je suis un soir d'été
Aux terrasses brouillées Quelques buveurs humides Parlent de haridelles Et de vieilles perfides C'est l'heure où les bretelles Soutiennent le présent Des passants répandus Et des alcoolisants Je suis un soir d'été
De lourdes amoureuses Aux odeurs de cuisine Promènent leur poitrine Sur les flancs de la Meuse Il leur manque un soldat Pour que l'été ripaille Et monte vaille que vaille Jusqu'en haut de leurs bas Je suis un soir d'été
Aux fontaines les vieux Bardés de références Rebroussent leur enfance A petits pas pluvieux Ils rient de toute une dent Pour croquer le silence Autour des filles qui dansent A la mort d'un printemps Je suis un soir d'été
La chaleur se vertèbre Il fleuve des ivresses L'été a ses grand-messes Et la nuit les célèbre La ville aux quatre vents Clignote le remords Inutile et passant De n'être pas un port Je suis un soir d'été

Je t'aime

Paroles et Musique: F. Bauber, J. Brel 1959

Pour la rosée qui tremble au calice des fleurs De n'être pas aimée et ressemble à ton cœur Je t'aime Pour le doigt de la pluie au clavecin de l'étang Jouant page de lune et ressemble à ton chant Je t'aime Pour l'aube qui balance sur le fil d'horizon Lumineuse et fragile et ressemble à ton front Je t'aime
Pour l'aurore légère qu'un oiseau fait frémir En la battant de l'aile et ressemble à ton rire Je t'aime Pour le jour qui se lève et dentelle le bois Au point de la lumière et ressemble à ta joie Je t'aime Pour le jour qui revient d'une nuit sans amour Et ressemble déjà, ressemble à ton retour Je t'aime Pour la porte qui s'ouvre, pour le cri qui jaillit Ensemble de deux cœurs et ressemble à ce cri Je t’aime Je t’aime Je t’aime

Jef

Paroles et Musique: Jacques Brel 1964

Non, Jef, t'es pas tout seul Mais arrête de pleurer Comme ça devant tout l’monde Parce qu'une demi-vieille Parce qu'une fausse blonde T'a relaissé tomber Non, Jef, t'es pas tout seul Mais tu sais qu’tu m’fais honte A sangloter comme ça Bêtement devant tout l’monde Parce qu'une trois quarts putain T'a claqué dans les mains Non, Jef, t'es pas tout seul Mais tu fais honte à voir Les gens se paient not’ tête Foutons l’camp de c’trottoir Viens, Jef, viens, viens, viens!

{Refrain:}

Viens, il me reste trois sous On va aller s’les boire Chez la mère Françoise Viens, Jef, viens Viens, il me reste trois sous Et si c'est pas assez Ben il m’restera l'ardoise Puis on ira manger Des moules et puis des frites Des frites et puis des moules Et du vin de Moselle Et si t'es encore triste On ira voir les filles Chez la madame Andrée Paraît qu’y en a d’nouvelles On r’chantera comme avant On s’ra bien tous les deux Comme quand on était jeunes Comme quand c'était le temps Que j’avais d’l’argent