Demain je serai Espagnol
Petites fesses, grande bagnole
Elles passeront toutes à la casserole
Quitte à pourchasser dans Hambourg
Des Carmencitas de faubourg
Qui nous reviendront de vérole
Je les voudrai fraîches et joyeuses
Bonnes travailleuses, sans parlotte
Mi-Andalouses, mi-anguleuses
De ces femelles qu'on gestapote
Parce qu'elles ne savent pas encore
Que Franco est tout à fait mort
Les soirs depuis Caracas
Je Panama, je Partagas
Je suis l'plus beau
Je pars en chasse
Je glisse de palace en palace
Pour y dénicher le gros lot
Qui n'attend que mon coup de grâce
Je la veux folle comme un travelo
Découverte de vieux rideaux
Mais cependant t-évanescente
Elle m'attendrait depuis toujours
Cerclée de serpents et de plantes
Parmi les livres de Dutourd
L'âge idiot
Paroles: Jacques Brel 1966 "Jef"
L'âge idiot, c'est à vingt fleurs
Quand le ventre brûle de faim
Qu'on croit se laver le cœur
Rien qu'en se lavant les mains
Qu'on a les yeux plus grands qu'le ventre
Qu'on a les yeux plus grands qu'le cœur
Qu'on a le cœur encore trop tendre
Qu'on a les yeux encore pleins d'fleurs
Mais qu'on sent bon les champs de luzerne
L'odeur des tambours mal battus
Qu'on sent les clairons refroidis
Et les lits de petite vertu
Et qu'on s'endort toutes les nuits
Dans les casernes
L'âge idiot, c'est à trente fleurs
Quand le ventre prend naissance
Quand le ventre prend puissance
Qu'il vous grignote le cœur
Quand les yeux se font plus lourds
Quand les yeux marquent les heures
Eux qui savent qu'à trente fleurs
Commence le compte à rebours
Qu'on r'jette les vieux dans leur caverne
Qu'on offre à Dieu des bonnets d'âne
Mais que le soir on s'allume des feux
En frottant deux cœurs de femmes
Et qu'on regrette déjà un peu
Le temps des casernes
L'âge idiot c'est soixante fleurs
Quand le ventre se ballotte
Quand le ventre ventripote
Qu'il vous a bouffé le cœur
Quand les yeux n'ont plus de larmes
Quand les yeux tombent en neige
Quand les yeux perdent leurs pièges
Quand les yeux rendent les armes
Qu'on se ressent de ses amours
Mais qu'on se sent des patiences
Pour des vieilles sur le retour
Ou des trop jeunes en partance
Et qu'on se croit protégé
Par les casernes
L'âge d'or c'est quand on meurt
Qu'on se couche sous son ventre
Qu'on se cache sous son ventre
Les mains protégeant le cœur
Qu'on a les yeux enfin ouverts
Mais qu'on ne se regarde plus
Qu'on regarde la lumière
Et ses nuages pendus
L'âge d'or c'est après l'enfer
C'est après l'âge d'argent
On redevient petit enfant
Dedans le ventre de la terre
L'âge d'or c'est quand on dort
Dans sa dernière caserne
L'air de la bêtise
Paroles et Musique: Jacques Brel 1957
Extrait du célèbre opéra "La vie quotidienne"
Voici l’air fameux z-entre tous: L'air de la bêtise
Mère des gens sans inquiétude
Mère de ceux que l'on dit forts
Mère des saintes habitudes
Princesse des gens sans remords
Salut à toi, dame Bêtise
Toi dont le règne est méconnu
Salut à toi, Dame Bêtise
Mais dis-le moi, comment fais-tu
Pour avoir tant d'amants
Et tant de fiancés
Tant de représentants
Et tant de prisonniers
Pour tisser de tes mains
Tant de malentendus
Et faire croire aux crétins
Que nous sommes vaincus
Pour fleurir notre vie
De basses révérences
De mesquines envies
De noble intolérance
De mesquines envies
De noble intolérance
De mesquines envies
De noble intolérance
Mère de nos femmes fatales
Mère des mariages de raison
Mère des filles à succursales
Princesse pâle du vison
Salut à toi, Dame Bêtise
Toi dont le règne est méconnu
Salut à toi, Dame Bêtise
Mais dis moi, comment fais-tu
Pour que point l'on ne voie
Le sourire entendu
Qui fera de vous et moi
De très nobles cocus
Pour nous faire oublier
Que les putains, les vraies
Sont celles qui font payer
Pas avant, mais après
Pour qu'il puisse m'arriver
De croiser certains soirs
Ton regard familier
Au fond de mon miroir
Ton regard familier
Au fond de mon miroir
Ton regard familier
Au fond de mon miroir.
L'amour est mort
Paroles: Jacques Brel. Musique: Jacques Brel, Gérard Jouannest 2003 "Brel infiniment"
note: inédit enregistré en 1977; note figurant sur la compilation de 2003 "chanson non aboutie que Jacques Brel et nous-mêmes désirions remanier, raison pour laquelle elles n’ont jamais été divulguées" (François Rauber, Gérard Jouannest)
Ils n'ont plus rien à se maudire
Ils se perforent en silence
La haine est devenue leur science
Les cris sont devenus leurs rires
L'amour est mort, l'amour est vide
Il a rejoint les goélands
La grande maison est livide
Les portes claquent à tout moment
Ils ont oublié qu'il y a peu
Strasbourg traversé en riant
Leur avait semblé bien moins grand
Qu'une grande place de banlieue
Ils ont oublié les sourires
Qu'ils déposaient tout autour d'eux
Quand je te parlais d'amoureux
C'est ceux-là que j'aimais décrire
Vers midi s'ouvrent les soirées
Qu'ébrèchent quelques sonneries
C'est toujours la même bergerie
Mais les brebis sont enragées
Il rêve à d'anciennes maîtresses
Elle s'invente son prochain amant
Ils ne voient plus dans leurs enfants
Que les défauts que l'autre y laisse
Ils ont oublié le beau temps
Où le petit jour souriait
Quand il lui récitait Hamlet
Nu comme un ver et en allemand
Ils ont oublié qu'ils vivaient
A deux, ils brûlaient mille vies
Quand je disais "belle folie"
C'est de ces deux que je parlais
Le piano n'est plus qu'un meuble
La cuisine pleure quelques sandwichs
Et eux ressemblent à deux derviches
Qui toupient dans le même immeuble
Elle a oublié qu'elle chantait
Il a oublié qu'elle chantait
Ils assassinent leurs nuitées
En lisant des livres fermés