Rosa rosa rosam
Rosae rosae rosa
Rosae rosae rosas
Rosarum rosis rosis
C'est le tango des forts en thème
Boutonneux jusqu'à l'extrême
Et qui recouvrent de laine
Leur cœur qui est déjà froid
C'est le tango des forts en rien
Qui déclinent de chagrin
Et qui seront pharmaciens
Parce que papa ne l'était pas
C'est le temps où j'étais dernier
Car ce tango rosa rosae
J'inclinais à lui préférer
Déjà ma cousine Rosa
Rosa rosa rosam
Rosae rosae rosa
Rosae rosae rosas
Rosarum rosis rosis
C'est le tango des promenades
Deux par seul sous les arcades
Cerclés de corbeaux et d'alcades
Qui nous protégeaient des pourquoi
C'est le tango de la pluie sur la cour
Le miroir d'une flaque sans amour
Qui m'a fait comprendre un beau jour
Qu' je n' serais pas Vasco de Gama
Mais c'est l' tango du temps béni
Où pour un baiser trop petit
Dans la clairière d'un jeudi
A rosi cousine Rosa
Rosa rosa rosam
Rosae rosae rosa
Rosae rosae rosas
Rosarum rosis rosis
C'est le tango du temps des zéros
J'en avais tant des minces des gros
Qu' j'en faisais des tunnels pour Charlot
Des auréoles pour saint François
C'est le tango des récompenses
Qui allaient à ceux qui ont la chance
D'apprendre dès leur enfance
Tout ce qui ne leur servira pas
Mais c'est le tango que l'on regrette
Une fois que le temps s'achète
Et que l'on s'aperçoit tout bête
Qu'il y a des épines aux Rosa
Rosa rosa rosam
Rosae rosae rosa
Rosae rosae rosas
Rosarum rosis rosis
S'il te faut
Paroles et Musique: Jacques Brel 1955
Tu n'as rien compris
S'il te faut des trains pour fuir vers l'aventure
Et de blancs navires qui puissent t'emmener
Chercher le soleil à mettre dans tes yeux
Chercher des chansons que tu puisses chanter
Alors…
S'il te faut l'aurore pour croire au lendemain
Et des lendemains pour pouvoir espérer
Retrouver l'espoir qui t'a glissé des mains
Retrouver la main que ta main a quittée
Alors…
S'il te faut des mots prononcés par des vieux
Pour te justifier tous tes renoncements
Si la poésie pour toi n'est plus qu'un jeu
Si toute ta vie n'est qu'un vieillissement
Alors…
S'il te faut l'ennui pour te sembler profond
Et le bruit des villes pour saouler tes remords
Et puis, des faiblesses pour te paraître bon
Et puis, des colères pour te paraître fort
Alors…
Alors, tu n'as rien compris
Saint Pierre
Paroles et Musique: Jacques Brel 1956
Il y a longtemps de cela
Au fond du ciel, le bon saint Pierre
Comme un collégien se troubla
Pour une étoile au cœur de pierre
Sitôt conquise, elle s'envole
En embrasant de son regard
Le cœur, la barbe et l'auréole
Du bon saint Pierre au désespoir
Qui criait et pleurait
Dans les rues du paradis
Qui criait et pleurait
Tout en se moquant de lui
Effeuillons l'aile d'un ange
Pour voir si elle pense à moi
Effeuillons l'aile d'un ange
Pour voir si elle m'aimera
Saint Pierre alors partit chercher
A cheval sur un beau nuage
Vainement dans la Voie Lactée
Sa jeune étoile au cœur volage
Au paradis, lorsqu'il revint
Devant la porte, il est resté
N'osant montrer tout son chagrin
A ses copains auréolés
Qui criaient et pleuraient
Dans les rues du paradis
Qui criaient et pleuraient
Tout en se moquant de lui
Effeuillons l'aile d'un ange
Pour voir si elle pense à toi
Effeuillons l'aile d'un ange
Pour voir si elle t'aimera
Mais le bon Dieu lui vint en aide
Car les barbus sont syndiqués
Il changea l'étoile en planète
Et fit de saint Pierre un portier
Et de ces anges déplumés
Par les amours du bon saint Pierre
Afin de tout récupérer
Il fit les démons de l'enfer
Ceux qui crient, ceux qui pleurent
A l'heure où naissent les nuits
Ceux qui crient, ceux qui pleurent
Dans un coin de votre esprit
Effeuillons l'aile d'un ange
Pour voir si elle pense à moi
Effeuillons l'aile d'un ange
Pour voir si elle m'aimera
Sans exigences
Paroles: Jacques Brel. Musique: Jacques Brel, François Rauber 2003 "Brel infiniment"
note: inédit enregistré en 1977; note figurant sur la compilation de 2003 "chanson non aboutie que Jacques Brel et nous-mêmes désirions remanier, raison pour laquelle elles n’ont jamais été divulguées" (François Rauber, Gérard Jouannest)
Je n'étais plus que son amant
Je vivais bien de temps en temps
Mais peu à peu, de moins en moins
Je blasphémais ma dernière chance
Au fil de son indifférence
J'en voulais faire mon seul témoin
Mais j'ai dû manquer d'impudence
Car, me voyant sans exigences,
Elle me croyait sans besoins
Je protégeais ses moindres pas
Je passais mais ne pesais pas
Je me trouvais bien de la chance
A vivre à deux ma solitude
Puis, je devins son habitude
Je devins celui qui revient
Lorsqu'elle revenait de partance
Et me voyant sans exigences
Elle me croyait sans besoins
L'eau chaude n'a jamais mordu
Mais on ne peut que s'y baigner
Et elle ne peut de plus en plus
Que refroidir et reprocher
Qu'on ne soit pas assez soleil
L'eau chaude à l'eau chaude est pareille
Elle confond faiblesse et patience
Et me voyant sans exigences
Elle me voulait sans merveilles
De mal à seul, j'eus mal à deux
J'en suis venu à prier Dieu
Mais on sait bien qu'Il est trop vieux
Et qu'Il n'est plus maître de rien
Il eût fallu que j'arrogance
Alors que, tremblant d'indulgence,
Mon cœur n'osât lever la main
Et me voyant sans exigences
Elle me croyait sans besoins