Mimi, de prime abord, payait guère de mine,
Chez son fourreur sans doute on ignorait l'hermine,
Son habit sortait point de l'atelier d'un dieu…
Mais quand, par-dessus le moulin de la Galette,
Elle jetait pour vous sa parure simplette,
C'est Psyché tout entier' qui vous sautait aux yeux.
Au second rendez-vous y' avait parfois personne,
Elle avait fait faux bond, la petite amazone,
Mais l'on ne courait pas se pendre pour autant…
La marguerite commence avec Suzette,
On finissait de l'effeuiller avec Lisette
Et l'amour y trouvait quand même son content.
C'étaient, me direz-vous, des grâces roturières,
Des nymphes de ruisseau, des Vénus de barrière,
Mais c'étaient mes amours, excusez-moi du peu,
Des Manon, des Mimi, des Suzon, des Musette,
Margot la blanche caille, et Fanchon, la cousette,
Mon prince, on a les dam's du temps jadis – qu'on peut…
Les casseuses
Paroles: Georges Brassens
Tant qu'elle a besoin du matou,
Ma chatte est tendre comme tout,
Quand elle est comblée, aussitôt
Ell' griffe, ell' mord, ell' fait l'gros dos.
{
Quand vous ne nous les caressez
Pas, chéries, vous nous les cassez.
Oubliez-les, si fair' se peut,
Qu'ell's se reposent.
Quand vous nous les dorlotez pas,
Vous nous les passez à tabac.
Oubliez-les, si fair' se peut,
Qu'ell's se reposent un peu,
Qu'ell's se reposent.
Enamourée, ma femme est douce,
Mes amis vous le diront tous.
Après l'étreinte, en moins de deux
Ell' r'devient un bâton merdeux.
Dans l'alcôve, on est bien reçus
Par la voisine du dessus.
Un' fois son désir assouvi,
Ingrate, ell' nous les crucifie.
Quand ell' passe en revue les zouaves
Ma sœur est câline et suave.
Dès que s'achève l'examen,
Gare à qui tombe sous sa main.
Si tout le monde en ma maison
Reste au lit plus que de raison,
C'est pas qu'on soit lubriqu's, c'est qu'il
Y a guère que là qu'on est tranquilles.
Les châteaux de sable
Paroles et Musique: Georges Brassens 1985
Je chante la petite guerre
Des braves enfants de naguère
Qui sur la plage ont bataillé
Pour sauver un château de sable
Et ses remparts infranchissables
Qu'une vague allait balayer.
J'en étais: l'arme à la bretelle,
Retranchés dans la citadelle,
De pied ferme nous attendions
Une cohorte sarrasine
Partie de la côte voisine
A l'assaut de notre bastion.
A cent pas de là sur la dune,
En attendant que la fortune
Des armes sourie aux vainqueurs,
Languissant d'être courtisées
Nos promises, nos fiancées
Préparaient doucement leur cœur.
Tout à coup l'Armada sauvage
Déferla sur notre rivage
Avec ses lances, ses pavois,
Pour commettre force rapines,
Et même enlever nos Sabines
Plus belles que les leurs, ma foi.
La mêlée fut digne d'Homère,
Et la défaite bien amère
A l'ennemi pourtant nombreux,
Qu'on battit à plate couture,
Qui partit en déconfiture
En déroute, en sauve-qui-peut.
Oui, cette horde de barbares
Que notre fureur désempare
Fit retraite avec ses vaisseaux,
En n'emportant pour tous trophées,
Moins que rien, deux balles crevées,
Trois raquettes, quatre cerceaux.
Après la victoire fameuse
En chantant l'air de "Sambre et Meuse"
Et de la "Marseillaise", ô gué,
On courut vers la récompense
Que le joli sexe dispense
Aux petits héros fatigués.
Tandis que tout bas à l'oreille
De nos Fanny, de nos Mireille,
On racontait notre saga,
Qu'au doigt on leur passait la bague,
Surgit une espèce de vague
Que personne ne remarqua.
Au demeurant ce n'était qu'une
Vague sans amplitude aucune,
Une vaguelette égarée,
Mais en atteignant au rivage
Elle causa plus de ravages,
De dégâts qu'un raz-de-marée.
Expéditive, la traîtresse
Investit notre forteresse,
La renversant, la détruisant.
Adieu donjon, tours et courtines,
Que quatre gouttes anodines
Avaient effacés en passant.
A quelque temps de là nous sommes
Allés mener parmi les hommes
D'autres barouds plus décevants,
Allés mener d'autres campagnes,
Où les châteaux sont plus d'Espagne,
Et de sable qu'auparavant.
Quand je vois lutter sur la plage
Des soldats à la fleur de l'âge,
Je ne les décourage pas,
Quoique je sache, ayant naguère
Livré moi-même cette guerre,
L'issue fatale du combat.
Je sais que malgré leur défense,
Leur histoire est perdue d'avance,
Mais je les laisse batailler,
Pour sauver un château de sable
Et ses remparts infranchissables,
Qu'une vague va balayer.
Les copains d'abord
Paroles et Musique: Georges Brassens 1964
Non, ce n'était pas le radeau
De la Méduse, ce bateau
Qu'on se le dise au fond des ports
Dise au fond des ports
Il naviguait en père peinard
Sur la grand-mare des canards
Et s'app'lait les Copains d'abord
Les Copains d'abord
Ses fluctuat nec mergitur
C'était pas d'la littérature
N'en déplaise aux jeteurs de sort
Aux jeteurs de sort
Son capitaine et ses mat'lots
N'étaient pas des enfants d'salauds
Mais des amis franco de port
Des copains d'abord
C'étaient pas des amis de luxe
Des petits Castor et Pollux
Des gens de Sodome et Gomorrhe
Sodome et Gomorrhe
C'étaient pas des amis choisis
Par Montaigne et La Boétie
Sur le ventre ils se tapaient fort
Les copains d'abord