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Coup de grisou

Paroles: Henri Contet. Musique: Louiguy 1943

C'était un homm' sans condition, Un typ' qu'avait pas d'ambition, Pourtant, Bon Dieu! qu'il était fort. Il n'avait pas d'situation Et il travaillait au charbon Dans les villes noires du Nord. On l'avait app'lé: "Coup d'grisou" Un jour qu'il était en colère Et qu'il avait mis sens d'ssus d'ssous Tout un bistro avec les verres. A forc' de peiner dans le noir, Il n'aimait qu'la couleur du soir. Le soleil lui brûlait les yeux. Le grand jour l'empêchait d'parler. C'était un dieu d'l'obscurité, Un dieu bien triste et malheureux, Un dieu bien triste et malheureux
Car il aimait par-dessus tout Un' fill' des plain's aux cheveux roux, Roux comm' les sarments des vignes, Des cheveux où la lumièr' pleut. Ça l'forçait à cligner des yeux Comm' si l'soleil lui faisait sign'. Ell' l'emmenait dans les moissons Par les frais chemins du dimanche. Tout était clair, tout était blond Et la clarté prenait sa r'vanche. Ça lui f'sait mal derrièr' le front Mais il faisait des concessions. Dame, il essayait d'être heureux. C'est comm' ça qu'on perd un amour. Ell' l'a trompé par un beau jour Avec un qui aimait l'ciel bleu, Avec un qui aimait l'ciel bleu.
Quand "Coup d'grisou" a tout appris, Il travaillait au fond du puits Tout luisant de reflets tout noirs Pendant dix s'cond's il n'a rien dit Et puis d'un seul coup ça l'a pris. Ah! c'était pas joli à voir, Rien qu'à l'entendre on s'demandait Si l'diable n'était pas sous terre. Probabl' que ça lui ressemblait Puisqu'il a tout foutu par terre. Quand l'vrai grisou s'en est mêlé, A eux deux, ils ont fait sauter La terre, la mine et tout l'fourbi! Après trois jours on l'a r'monté Avec sa part d'éternité Et quand on l'a sorti du puits, La lumièr' se moquait de lui. Le soleil donnait un gala Pour l'embêter un' dernièr' fois Mais Coup d'grisou était guéri: Il avait épousé la nuit…

Cri du coeur

Paroles: Jacques Prévert. Musique: Henri Crolla 1960

C'est pas seulement ma voix qui chante. C'est l'autre voix, une foule de voix, Voix d'aujourd'hui ou d'autrefois, Des voix marrantes, ensoleillées, Désespérées, émerveillées, Voix déchirantes et brisées, Voix souriantes et affolées, Folles de douleur et de gaieté.
C'est la voix d'un chagrin tout neuf, La voix de l'amour mort ou vif, La voix d'un pauvre fugitif, La voix d'un noyé qui fait plouf. C'est la voix d'une enfant qu'on gifle, C'est la voix d'un oiseau craintif, La voix d'un moineau mort de froid Sur le pavé d' la rue d' la joie…
Et toujours, toujours, quand je chante, Cet oiseau-là chante avec moi. Toujours, toujours, encore vivante, Sa pauvre voix tremble pour moi. Si je disais tout ce qu'il chante, Tout c'que j'ai vu et tout c'que j'sais, J'en dirais trop et pas assez Et tout ça, je veux l'oublier.
D'autres voix chantent un vieux refrain. C'est leur souvenir, c'est plus le mien. Je n'ai plus qu'un seul cri du cœur: "J'aime pas l'malheur! J'aime pas l'malheur!" Et le malheur me le rend bien Mais je l' connais, il m' fait plus peur. Il dit qu'on est mariés ensemble. Même si c'est vrai, je n'en crois rien.
Sans pitié, j'écrase mes larmes. Je leur fais pas d'publicité. Si on tirait l'signal d'alarme Pour des chagrins particuliers, Jamais les trains n'pourraient rouler Et je regarde le paysage. Si par hasard, il est trop laid, J'attends qu'il se refasse une beauté
Et les douaniers du désespoir Peuvent bien éventrer mes bagages, Me palper et me questionner, J'ai jamais rien à déclarer. L'amour, comme moi, part en voyage. Un jour je le rencontrerai. A peine j'aurai vu son visage, Tout de suite je le reconnaîtrai…

Dans leur baiser

Paroles: Michel Vaucaire. Musique: Charles Dumont 1961

Il y avait dans leur baiser, Dans leur baiser désespéré, Tous les regrets, tous les chagrins du monde entier, Tout le chagrin de nos amants Que le destin va séparer, De deux amants qui ont compris Que c'est fini…
Ce n'était, parmi tant d'autres, Qu'un pauvre baiser d'adieu. Ce n'étaient, parmi tant d'autres, Que deux cœurs très malheureux.
Il y avait dans leur baiser, Dans leur baiser désespéré, Le désarroi d'un grand amour qui s'est brisé, Le désarroi d'un grand amour Contre lequel tout s'est ligué. Il y avait dans leur baiser Deux vies ratées.
Ce n'était, parmi tant d'autres, Qu'un pauvre baiser d'adieu. Ce n'étaient, parmi tant d'autres, Que deux cœurs très malheureux.
Il y avait dans leur baiser, Dans leur baiser désespéré, Ce grand secret dont les passants se moquaient bien, Dont les passants se moquaient bien Comme ils s'étaient moqués de nous, Moqués de nous, ah! Ce triste soir Comme ce soir…
Ce n'était, parmi tant d'autres, Qu'un pauvre baiser d'adieu Mais soudain, c'était le nôtre, Mais soudain, c'était nous deux…
Et c'était toi, et c'était nous Que tout d'un coup je voyais là… Dans ce baiser, Dans ce baiser désespéré…

Dans ma rue

Paroles: Edith Piaf. Musique: Jacques Datin 1952

J'habite un coin du vieux Montmartre Mon père rentre soûl tous les soirs Et pour nous nourrir tous les quatre Ma pauvr' mére travaille au lavoir. Moi j'suis malade, j'rêve à ma fenêtre Je r'garde passer les gens d'ailleurs Quand le jour vient à disparaître Il y a des choses qui me font un peu peur
Dans ma rue il y a des gens qui s' promènent J'les entends chuchoter dans la nuit Quand je m'endors bercée par une rengaine J'suis soudain réveillée par des cris Des coups d'sifflet, des pas qui traînent, qui vont et viennent Puis le silence qui me fait froid dans tout le coeur