Je n'oublierai jamais
Nos hurlement d'horreur
En voyant des objets
Des tableaux de valeur
On se montrait exprès
Goujats et monstrueux
Et puis l'on décampait
Sans merci, ni adieu
A l'hôtesse
On se voulait cyniques
Exécrables, et pourtant
Nous étions romantiques
faits de chair et de sang
De faiblesse
Je n'oublierai jamais
Je n'ai pas de remords
Et je recommencerai
Si je tenais encore
Ma jeunesse
A l'époque on était
De joyeux rigolos
Plus ou moins
Attachés
A de vagues journaux très obscurs
Philosophes, écrivains
Poètes d'occasion
Illustres inconnus
Néanmoins
Nous avions la dent dure
Je n'oublierai jamais
Nos merveilleux festins
Près des tonneaux percés
D'où pissait le bon vin
Quand nous étions vautrés
Dessus ou bien dessous
Que le jus nous coulait
Dans le nez, dans le cou
Les entrailles
Je n'oublierai jamais
Nos cris et nos serments
Nos discours enflammés
Sur le désarmement
Nos folles équipées
Nos courses éperdues
A travers un quartier
Qui nous crachait dessus
Nos batailles
Les filles à la page
Qui partageaient nos jours
Et faisaient le ménage
La cuisine, et l'amour
Tendres cailles
Je n'oublierai jamais
Ce que j'ai vu s'enfuir
Je n'ai pas de regrets
Car j'ai des souvenirs
En pagaille
Je rentre chez nous
Paroles et Musique: Charles Aznavour 1987
Tous mes démons calmes tous mes volcans éteins
Rongé par le cancer de ton corps et tes lèvres
Plus réfléchi qu'hier moins sage que demain
Je rentre chez nous en fièvre
J'étais parti jurant que c'étais pour toujours
Je devrais me cracher cent fois à la figure
Et m'arracher le cœur pour l'offrir aux vautours
Je rentre chez nous parjure
Ma bouche étais salive et mon cœur était sec
Quand je faisais l'amour sans amour par réflexe
Aux vierges effrayées prises du bout du bec
Comme on prend un café sur le comptoir du sexe
Et comme un roi déchu abdiquant par amour
Avec encore aux lèvres un âpre goût de cendre
Mon cœur au grand galop fait le compte à rebours
Je rentre chez nous me rendre
Sorti de mes enfers en voulant voir les cieux
J'ai eu des paradis artificiels et fades
N'ayant ni vu le diable ni rencontré Dieu
Je rentre chez nous malade
Étouffant tout orgueil tout en me vomissant
Aux sources de mes maux pour retrouver mes chaînes
Et célébrer nos noces de larmes et de sang
Je rentre chez nous sans haine
Ouvertes ou fermées mes prisons sont en moi
Ma vie n'est pas ma vie si tu n'en es le centre
Et crever pour crever autant crever sur toi
Esclave de ton corps planté dans ton bas-ventre
N'ayant rien résolu je reviens sur mes pas
Pour toute honte bue rabâcher mes – je t'aime –
Sachant qu'à petit feu tu me suicideras
Le cœur à genoux
Revenu de tout
Je rentre chez nous quand même
Je reviendrai de loin
Paroles: Charles Aznavour. Musique: Georges Garvarentz 1966
Si le ciel veut que je revienne
Si Dieu m'offre de retourner
Du bout du monde et de mes peines
Je reviendrai de loin
Avec des idées plein la tête
J'étais parti, pauvre insensé,
Et de défaites en défaites
Je reviendrai de loin
Au départ, quand on se sent fort
Le chemin que l'on prend est court
Mais chargé du poids du remords
Il semble sans fin celui du retour
A semer des rêves de gloire
On ne récolte jamais rien
Moi, de détresses en déboires,
Je reviendrai de loin
Pour l'homme qui rentre de guerre
Solitaire et le coeur blessé
La route est longue et dure à faire
Je reviendrai de loin
Je sais qu'en ce qui me concerne
J'ai tout perdu et rien gagné
Les poches vides et l'âme en berne
Je reviendrai de loin
Loin de tout ce qui fut mes joies
Je me tue à compter les jours
Et mourir pour mourir, ma foi,
Je préférerais que ce soit d'amour
Celui qui reste est le plus sage
Il n'y a pas d'or en chemin
Adieu fortune, adieu mirage
Je reviendrai de loin
Je reviens Fanny
Paroles et Musique: Charles Aznavour 1967
J'avais des idées vagabondes
Lorsque j'étais encore enfant
Je voulais parcourir le monde
Pour voir les îles Sous-le-Vent
La mer et toi – est-ce ma faute?
Étaient maîtresses de ma vie
J'ai suivi l'une et laissé l'autre
Le vent me gifle
Le vent me gifle
Je reviens Fanny
A courir après les mirages
On passe à côté du bonheur
Les ports ont tous même visage
Dont un seul s'accroche à mon cœur
Il pleure derrière une porte
Un gars qui emporte avec lui
Ses joies brisées, ses amours mortes
Le temps me griffe
Le temps me griffe
Je reviens Fanny
Ton Marius est sur la vague
Ton Marius est sur le pont
Qui rentre de son escapade
Avec toi pour seul horizon
Il vient sans fortune et sans gloire
Au gré du vent qui le conduit
Pour se fondre avec sa mémoire
La voile claque
La voile claque
Je reviens Fanny
Adieu mes rêves d'aventures
Au diable ma route sans but
Je voudrais panser mes blessures
Et retrouver le temps perdu
Pour remonter jusqu'à la source
De nos émois, de nos folies
Et dans tes bras finir ma course
L'aube se lève
L'aube se lève
Je reviens Fanny
Le monde n'a plus de surprise
à m'offrir et depuis longtemps
La mer a perdu son emprise
Sur moi et je ne suis l'amant
Que de souvenirs qui s'invitent
A partager mes longues nuits
Qui me déchirent et qui m'agitent
Le cœur me saigne
Le cœur me saigne
Je reviens Fanny
Ton Marius a soif de vivre
Ton Marius a faim de toi
Il se libère, il se sent ivre
Près du port où loin de tes bras
Il s'est enfui cette nuit même
Où tu lui offrais dans un cri
Ta jeunesse contre un je t'aime
L'amour me porte
L'amour me porte
Je reviens Fanny