Ma femme est allée voir sur Internet et elle a découvert que cela brûlait 46 % de calories de plus qu’une marche normale. Elle a été enthousiasmée, et la « marche nordique » a désormais fait partie de notre quotidien.
Un après-midi, pour me distraire, j’ai décidé moi aussi d’aller voir sur Internet ce qu’il y avait sur le sujet. J’ai été effrayé : c’étaient des pages et encore des pages, des fédérations, des groupes, des discussions, des modèles, et... des règles.
Je ne sais pas ce qui m’a poussé à ouvrir une page sur les règles. A mesure que je lisais, j’étais horrifié : je faisais tout de travers ! Mes bâtons devaient être réglés plus haut, ils devaient obéir à un rythme déterminé, à un angle d’appui déterminé, le mouvement de l’épaule était compliqué, il existait une manière différente d’utiliser le coude, tout suivait des principes rigides, techniques, précis.
J’ai imprimé toutes les pages. Le lendemain – et les jours suivants – j’ai tenté de faire exactement ce que les spécialistes ordonnaient. La marche a commencé à perdre son intérêt, je ne voyais plus les merveilles autour de moi, je parlais peu avec ma femme, je ne parvenais à penser à rien d’autre qu’aux règles. Au bout d’une semaine, je me suis posé une question : pourquoi est-ce que j’apprends tout cela ?
Mon objectif n’est pas de faire de la gymnastique. Je ne crois pas que les personnes qui faisaient leur « marche nordique » au début aient pensé à autre chose qu’au plaisir de marcher, d’améliorer leur équilibre et de bouger tout leur corps. Intuitivement nous savions quelle était la hauteur idéale des bâtons, de même qu’intuitivement nous pouvions déduire que plus ils étaient près du corps, meilleur et plus facile était le mouvement. Mais maintenant, à cause des règles, j’avais cessé de me concentrer sur les choses que j’aime, et j’étais plus préoccupé de perdre des calories, de bouger les muscles, d’utiliser une certaine partie de la colonne.
J’ai décidé d’oublier tout ce que j’avais appris. A présent nous marchons avec nos deux bâtons, profitant du monde qui nous entoure, sentant la joie de voir notre corps sollicité, déplacé, équilibré. Et si je veux faire de la gymnastique plutôt qu’une « méditation en mouvement », je chercherai une académie. Pour le moment, je suis satisfait de ma «marche nordique » détendue, instinctive, même si je ne perds peut-être pas 46 % de calories en plus.
Je ne sais pas pourquoi l’être humain a cette manie de mettre des règles en tout.
21.
De la relation compliquée avec son prochain
Le centième nom (tradition soufie)
Un étudiant demanda à un maître soufi de lui révéler le cinquième nom de Dieu.
« Celui qui connaît ce nom peut transformer l’Histoire », commenta-t- il.
Le maître le pria d’aller passer une journée à la porte de la ville.
Le garçon revint le lendemain.
« Qu’as-tu vu ? demanda le maître.
— Un vieux a voulu entrer dans la ville avec un mouton à vendre. Le garde a réclamé la taxe, mais l’homme n’avait pas d’argent. Alors le garde lui a volé le mouton et l’a expulsé. Je pensais : si je connaissais le nom caché de Dieu, je pourrais modifier cette situation.
— Tu aurais pu empêcher cette injustice, mais tu as préféré rêver d’une révélation. Quelle sottise ! Eh bien, je vais te révéler le cinquième nom de Dieu : action en faveur des autres. C’est seulement de cette façon que nous pouvons changer l’Histoire.
—
Je ne veux pas vous offenser (tradition islamique)
Au cours de son pèlerinage à La Mecque, un homme très pieux commença à sentir la présence de Dieu. En transe, il s’agenouilla, se cacha le visage et pria :
« Seigneur, je ne demande qu’une chose dans ma vie : la grâce de ne jamais Vous offenser.
— Je ne peux pas t’accorder cette grâce, répondit le Tout-Puissant. Si tu ne m’offenses pas, je n’aurais pas de raisons de te pardonner. Si je n’ai pas à te pardonner, bientôt tu oublieras aussi l’importance de la miséricorde envers les autres. Alors, poursuis ton chemin avec Amour, et laisse-moi pratiquer le pardon de temps à autre, pour que toi non plus tu n’oublies pas cette vertu. »
Élèves et professeurs (tradition soufie)
Nasrudin – l’éternel personnage des légendes soufies – se trouvait sur le seuil de sa porte, quand il vit passer un professeur avec ses élèves.
« Où allez-vous ? demanda-t-il.
— Prier pour que Dieu mette fin à la corruption, puisqu’il écoute toujours la prière des enfants, répondit le professeur.
— Une bonne éducation y aurait déjà mis fin. Apprends aux enfants à être plus responsables que leurs pères et leurs oncles. »
Le professeur s’offensa :
« Voilà un exemple d’absence de foi ! La prière des enfants peut tout changer !
— Dieu écoute tous ceux qui prient. S’il n’écoutait que les prières des enfants, il n’y aurait pas une seule école dans le pays ; ils ne détestent rien tant qu’un professeur. »
J’ai rencontré un violoniste (tradition hassidique)
Un disciple s’approcha du rabbin Moshe Haim :
« Aujourd’hui j’ai rencontré un homme qui a ri de moi et a méprisé mes efforts dans la quête spirituelle.
— Aujourd’hui j’ai rencontré un violoniste, répondit le rabbin. Il jouait tellement inspiré par Dieu que tous ceux qui venaient vers lui finissaient par chanter et danser. J’en ai fait autant, et ma joie était un hommage à la Création, quand j’ai vu s’avancer un sourd. Il a regardé le violoniste et le public qui dansait. À la fin, il a déclaré à voix haute : « L’agitation de cette bande de fous, c’est indécent et grotesque ! » »
Et Moshe Haim a conclu :
« Celui qui ne sait pas écouter la musique de Dieu n’a d’autre issue que de la considérer inutile. »
Volume 3
1 Pendant que je parcours le monde Prague, 1981
Un jour, au cours de l’hiver de 1981, je me promenais avec ma femme dans les rues de Prague, quand nous avons vu un garçon qui dessinait les immeubles qui l’entouraient.
Bien que j’aie véritablement horreur d’emporter des choses quand je voyage (et il y avait encore un long voyage devant nous), l’un des dessins m’a plu et j’ai décidé de l’acheter.
Quand j’ai tendu l’argent au garçon, j’ai constaté qu’il ne portait pas de gants, malgré le froid de - 5 degrés.
« Pourquoi ne portez-vous pas de gants ? ai-je demandé.
— Pour pouvoir tenir le crayon. » Et il a commencé à me raconter qu’il adorait Prague en hiver, que c’était la meilleure saison pour dessiner la ville. Il était tellement content d’avoir vendu son dessin qu’il a décidé de faire un portrait de ma femme, gratuitement.
Tandis que j’attendais que le portrait fût prêt, je me suis rendu compte qu’il s’était passé quelque chose de très étrange : nous avions parlé presque cinq minutes, aucun de nous deux ne parlant la langue de l’autre. Nous nous étions compris simplement par des gestes, des rires, des expressions du visage, et l’envie de partager quelque chose.
La simple envie de partager quelque chose nous avait fait entrer dans le monde du langage sans paroles, où tout est toujours clair, et où il n’y a pas le moindre risque d’être mal interprété.
Quelqu’un arrive du Maroc
Quelqu’un arrive du Maroc et me raconte une curieuse histoire sur la façon dont certaines tribus du désert voient le péché originel.