Pas trop de changements dans les grandes lignes, mais d'incessantes petites modifications de détails et d'ornementation. Ce fut un défilé de modes rapides, se succédant plus somptueuses ou élégantes les unes que les autres, et l'on trouva pour les désigner une foule d'appellations pittoresques : les galants, les échelles, les laiirreluchcs ou menues bouffettes de soie, les transparents, les falbalas, les prétintailles, les steinquerkes et les coiffures à la Fontanges. riiurluberlu, etc.
Voyons les portraits des belles du siècle, des belles des commencements, du temi)s des l'ur'lies et des jjrécieuses de riiùtel de Rambouillet, et des belles des Tuileries uu de Versailles, étoiles des tètes du roi du Soleil. C'est la coillure en largeur qui domine d'abord, ce sont pendant longtemps les cheveux frisés sur le Iront et tombant en frisures, en boucles très larges sur le coté ou en cadeneltes suivant la mode inventée sous Louis XIII par M. de Cadenet. frère du connétable de Luynes. longues tresses nouées par des n(euds de ru-jjans dénommés « galants ». Avec cela des robes fort décolletées, laissant largement voir les épaules, des colliers de grosses perles, les derniers rabats de dentelles (jui diminuent et disparaissent complètement, des corsages en pointe à belles et fines broderies, des manches courtes ouvrant sur des tlots de linon ou des manchettes de dentelles.
La première jupe se relève comme des courtines de rideaux et se rattache sur le côté par des agrafes enrichies de brillants ou par des
Commencement du grand règne.
nœuds de rubans, découvrant ainsi de merveilleuses, d'étincelantes robes de dessous.
Louis XIV a mis à la mode la bride sur le cou en laissant tomber les édits somptuaires de Mazarin. Les dentelles prohibées reparaissent, les somptueuses étoffes interdites reviennent au jour. Les tissus d"or est d'argent seuls sont interdits, le roi se les et réservés pour lui et pour la cour
Le roi fait des cadeaux de pièces de ces précieuses étoffes d'une ornementation noble et touffue aux personnages en grande faveur, comme il accorde aux courtisans favorisés des justaucorps « à brei^et ».
M de Montespan règne après La Val-lière. A certaine fête de la Cour, elle étincelle dans une robe « d'or sur or, rebrodé d'or, rebordé d'or, et par-dessus un or frisé, rebroché dun or mêlé avec un certain or qui fait la plus divine étoffe qui ait jamais été imaginée », ainsi que le dit M"'^ de Sévigné.
Les robes « transparentes » ont un succès fou. Ce sont des robes d'étoffe transparente, mousseline ou linon, sur lesquelles de larges bouquets de fleurs multicolores ont été peints ou imprimés, portées sur un dessous de satin moiré et brillant, — ou bien c'est tout le contraire, des robes de brocart à grands ramages courant sur fond or ou azur, par-dessus les-
sous LE GRAND ROI. - FIN DU XVII^ SIÈCLE.
quelles passe une robe d'un tissu léger transparent comme de la dentelle.
La dentelle s'accommode de toutes façons, du haut en bas du costume féminin, du corsage
Une favorite du Roi-SoleiL
aux souliers, et s'allie avec les floches de rubans qui nouent les cheveux, forment des échelles de grands nœuds sur les corsages, chamarrent les jupes et flottent un peu partout.
Des manufactures de dentelles ont été créées de tous côtés, inventant les « points d'Alençon, Valciicieuiies, le Puy, Dieppe, Sedan, etc. » ; les dentellières françaises produisent p( nu-toutes les bourses, bourses de duchesses ou de procureuses, bourses de marquise ou de simple commentante, depuis la riche guipure coûtant des centaines de ])istoles. que portera la favorite aux fêtes de la cour, jusqu'aux dentelles dites gueuses ou neigeuses, qu'arboreront la toute petite bourgeoise ou même la dame de la halle aux jours de cérémonie.
En 1680, révolution dans la coiffure. Le vent décoiffe pendant une chasse royale la duchesse de Fontanges qui a pris le cœur de Louis après la Montespan. Pour rétablir l'harmonie de sa coiffure, la belle ébouriffée prend le ruban de sa jarretière et rattache ses cheveux avec une jolie rosette par devant. Tout ce que font les favorites n'est-il pas toujours exquis et délicieux? Les nobles seigneurs se pâment devant la gracieuse insj)iralion, les dames s'extasient, et dès hi lendemain se décoiffent à la Fontanges.
Les coiffures à la Fontanges font fureur et régnent pendant des années, revues, modifiées et considérablement augmentées. Elles devienucnl un édifice de dentelles, de rubans et de cheveux, avec la haute pointe de dentelles caractéristique qui, d'après Saint-Simon, monte à deux pieds de haut, soutenue par du til d'ar-clial. — ensemble composé de pièces diverses (jui, toutes, avaient leurs noms.
La Fontanges, d'origine folâtre, dura longtemps, plus tard elle cessa de plaire au roi,(iui naimait sans doute plus que les coilYures austères de la veuve de Scarron.
La princesse Palatine, la princesse Charlotte de Bavière, tille de l'Electeur palatin, qui vint en France en l()7i pour épouser Monsieur, frère du roi, ayant adopté une sorte de petit mantelet court pour couvrir un peu ses épaules trop découvertes par la mode des corsages très dé-(îolletés. ces petites mantes adoptées bien vite par toutes les dames, furent ai)pelées palatines comme la princesse.
Le roman de la mode, toujours galant et héroïque, nous fournit encore pour ce temps les Steinkerques.
Epoque de chevalerie enrubannée et de bravoure empanachée à la mousquetaire. — La position sera dure à enlever, dit un colonel à sa troupe avant de charger, tant mieux, Messieurs, nous n'en aurons que plus de plaisir à raconter l'affaire à nos maîtresses!
A la bataille de Stcinkerque gagnée sur Guillaume d'Orange par le maréchal de Luxembourg, les princes, Philippe d'Orléans alors âgé de quinze ans, le prince de Conti et le duc de Vendôme, avaient chargé avec la cavalerie, avec une foule de gentilshommes, tous un peu débraillés, leurs cravates de dentelles dénouées et flottantes. Dans la joie de la victoire, la mode adopta ces cravates négligemment passées et toutes les femmes portèrent des dentelles à la Stcinkerque.
La riche provinciale et la dame de petite noblesse imitent les modes et les façons de la cour, et la bourgeoise les suit également d'un peu moins près seulement. Furetière dans son roman bourgeois et Sébastien Leclère dans ses eaux-fortes nous les dessinent avec leurs allures bourgeoises, mais coquettes, dédaignant le chaperon de leurs mères, portant grands rabats et colliers de perles, corsages chamarrés et presque autant de dentelles et de rubans qu'on en porte à Versailles. L'indiscret Furetière nous les montre même empruntant des diamants
Premières coiffures à la Fontan^es.
pour les cérémonies et entrant à l'église avec un laquais d'emprunt pour tenir la queue de la robe.
Pour la femme du peuple, faisons passer la servante de Molière, c'est une bonne lille. Sébastien Leclère Ta dessinée aussi avec sa coiffe assez simple, sa jupe relevée et sa camisole à larges basques qui est la hongreline des officiers de Louis Xlll. adnptée plus tard par les dames.
Ht les marchandes et les dames de la halle, qu'il a dessinées également, portent grands rabats et dentelles avec un air de dignité et de majesté (|ui montre (pi"ell(^s sont, elles aussi, du grand siècle.
La période épanouie et brillante du règne du grand roi fut en réalité la plus courte, le pivot tourna vers 1080 avec le conini<Mi<*enienl d(^ l'inlluence de M'"° de Maintenon. que le mi épousa secrètement en 1085.