Pour la coiffure, atUfet, chaperon^ toque ou loquet, ainsi que pour l'ornement du cou et des épaules qui sortent considérablement des corsages, — on a rapporté de la molle et licencieuse Italie de jolies ouvertures de corsages, que les maris pourtant auraient pu trouver offusquantes, mais les hommes se décolletent bien aussi — les élégantes dépensent en joaillerie et orfèvrerie plus que messieurs les maris ne voudraient. Reines, grandes dames, bourgeoises se ruinent en chaînes d'or, joyaux émaillés, perles, pierreries, escarboucles.
La belle Ferronnière, une des maîtresses du roi après le règne de la duchesse d'Etampes, invente de porter une escarboucle retenue par un fil au milieu du front. Un bijou de plus a porter quand on a déjà garni autant que Ton pouvait la coiffure, le corsage et la ceinture d'une étincelante joaillerie, quelle belle idée î La coiffure à la Ferronnière a vite un très grand succès.
Voici maintenant des accessoires de toilette inconnus. Pour Tété, c'est l'éventail de plumes, joli prétexte à garniture d'orfèvrerie, et le manchon pour l'hiver. Manchons noirs pour les bourgeoises et manchons de couleurs variées pour les dames nobles seulement, suivant les ordonnances royales. Les ombrelles aussi sont venues d'Italie, seulement elles sont trop lourdes et ne réussissent guère.
Mais voici sur l'éblouissante époque, Tétei-gnoir de la Réforme, les jours troublés et tristes.
Etincelante, chatoyante, superbe dampleur somptueuse et de richesse pendant tout le règne de François F'', roi chevalier, prince brillant, prodigue et ostentatif en un temps de bravoure et de « braverîe » et aussi de licence, — la mode va changer soudain de caractère et devenir aussi austère qu'elle a été fastueuse
Les Manches à cpe
aussi som])re et lugubre qu'elle a été éblouissante et multicolore.
C'est pendant le commencement du règne d'Henri II une véritable lutte entre les modes tristes et les modes gaies, mais bientôt les modes tristes triomphent et peu à peu l'éclat de réléa:ance s'éteint, la mode tourne et va Jiien vite des couleurs ternes et maussades au noir pur.
Les temps deviennent difficiles et tournent au noir aussi. C'est la Réforme, les dissensions religieuses, guerres de sermons et de prêches d'abord, puis guerre effective à coups de canon et d'arquebuses, à coups de bûchers, ou de potences.
Le roi Henri II dès 1549 commença les hostilités contre le luxe; un édit interdisant un grand nombre d'ornements ou d'étoffes, passements, bordures, orfèvreries, cordons, cane-tilles, draps d'or ou d'argent, satins, etc., réglementa sévèrement la mode et détermina pour les différentes classes de la société les qualités des étoffes et jusqu'aux couleurs.
Le droit de porter habillement complet de dessous et de dessus en rouge cramoisi fut réservé aux princes et princesses ; les dames nobles et leurs maris ne pouvaient prendre cette éclatante couleur que pour une seule pièce de leur costume.
Pour les dames de rang inférieur, elles avaient droit, d'abord les plus élevées en rang, aux robes de toutes couleurs sauf le cramoisi, et les autres au rouge éteint ou au noir. Même échelle descendante pour les étoffes, des satins et des velours au simple drap.
De longs cris de lamentation retentirent par toute la France, quand on voulut passer à Texécution de l'édit.
Les dames de France, au nord comme au midi, à l'ouest comme à l'est, en bataille serrée, défendirent courageusement, pied à pied, leurs joyaux et leurs belles parures, leurs étoffes et leurs couleurs, discutant avec les agents de l'autorité et trouvant mille raisons ingénieuses pour tout sauver, pour tout garder.
Il fallut que le roi reprît la plume, qu'il complétât son édit par une série d'articles explicatifs et détaillât point à point ce qui était permis et ce qui était prohibé. Il faisait quelques concessions aux dames et permettait encore quelques petites coquetteries, mais pour le reste, ce qui fut défendu resta défendu et la loi somptuaire fut exécutée rigoureusement.
Le velours, trop commun en Franc, Sous toy reprend son vieil honneur...
dit Ronsard dans une épître au Roi où il loue
le monarque de ses ordonnances réformatrices. La sombre Catherine, Tltalienne dont le sana' a empoisonné celui de la race des Valois, l'empoisonneuse qui finira toute houftie de crimes, domine la Cour de France encore brillante. (îomme un iirand fantôme noir, emblème de l'ère de crimes et de mas- i.a Coiffure de Caihciitic sacrcs qui va s'ouvrir.
de Médicis.
Elle laisse les recherches de la coquetterie aux dames de la Cour et à la maîtresse de son mari, à Diane de Poitiers, la suprême beauté, la déesse quasi mythologique de la Renaissance, que Jean Goujon sculpta comme plus tard Canova sculptera une autre beauté princière, Pauline Borghèse. Les plus jolies créations de l'époque, ce sont des toilettes à tons sobres, d'une élégance sévère composant des harmonies grises ou des harmonies en blanc et non*, les couleurs de Diane de Poitiers.
A la mort d'Henri. Catherine adopte, pour
ne plus le quitter, le costume de veuve, et entourée pourtant d'un essaim de jeunes et brillantes beautés, de ses filles d'honneur qu'on appelle Vescadron volant de la Reine,
Sous Ilciui U.
— escadron qui, dans les mille intrigues qu'elle noue et dénoue, la sert plus avantageusement que des escadrons de reîtres, — elle traverse les trois règnes tourmentés des rois ses fils, noire des pieds à la tête, noire comme la nuit, noire comme son àme. Large jupe noire, corsage noir en pointe, grandes ailes noires aux épaules, collet noir relevé en forme de fraise ; et pourjcoiffure une sorte de chaperon ou de toquet à visière noire qui descend en pointe sur ce front aux pensées dures et sinistres.
Ce fut Catherine, paraît-il, qui importa en France, en arrivant de Florence pour son mariage, les fraises qu'adoptèrent rapidement les hommes et les femmes.
Il y en avait de toutes sortes, de modestes et d'inouïes, de très simples en linge godronné et d'autres en merveilleuses dentelles. Invention charmante et superbe, incommode sans doute comme bien d'autres inventions de la mode, mais qui encadrait si bien dans les rosaces et les rinceaux de la plus fine dentelle, qui sertissait comme un bijou précieux la figure de la femme.
C'étaient des chefs-d'onivre de cet art si féminin de la dentelle où brillait toute l'élégance décorative de la Renaissance ; les mêmes artistes qui ciselaient le bronze, l'argent et l'or, qui sculptaient ces Unes décorations de pierre sur les façades des palais, fournissaient les dessins de ces fraises ; la dentelle avait ses Benvenuto Cellini, à Bruxelles, à Gènes et surtout à Venise, premiers centres de fabrication.
Mais les fraises ne prirent pas tout de suite ces belles proportions, qu'elles n'atteignirent que sous Henri III. Elles furent d'abord de simples collerettes à plis ronds ou godrons qui enserraient le cou jusqu'aux oreilles, fraises austères et fermées d'un temps qui s'assombrissait de plus en plus ; l'austérité protestante gagnait rapidement et si les catholiques conservaient leurs habitudes et leurs mœurs plus faciles, les querelles de religion avaient pris toute leur àpreté et la guerre civile planait sur la France.
Sous le règne éphémère de François II, qui vit passer à la cour de France la figure auréolée par le malheur de la pauvre Marie Stuart, sous celui de Charles IX, les costumes ont une élégance sobre et discrète. Comme les pourpoints des hommes, les corsages sont tailladés, ainsi que les manches raides et bouffantes en haut.