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— Pas faux.

— Je le savais ! Rien qu’à voir vos tronches ! Dans ce cas, vous vous êtes dérangés pour rien, j’ai que dalle à vous dire. Alors si vous voulez bien m’excuser, j’ai un emploi du temps hyper chargé…

— C’est nous qui avons des choses à vous dire… Vous avez juste à nous écouter.

Elle hésita. Curieuse de savoir ce que voulaient ces trois policiers. Et puis, l’un d’eux avait des cigarettes dans la poche de sa chemise. Il y avait peut-être là le moyen de récupérer quelques munitions.

Ils s’installèrent tous les quatre, elle face aux trois autres. Ça lui rappelait un peu le commissariat, le tribunal, les interrogatoires. Elle avait les nerfs à fleur de peau.

— Je veux bien vous écouter si vous me rendez un petit service, fit-elle avec aplomb. J’ai plus de clopes. Vous en avez ?

L’homme, qui devait être le chef, regarda son collègue qui sortit à regret les Marlboro de sa poche. Des fortes, heureusement. Il en proposa une à Marianne.

— C’est le paquet que je veux, précisa-t-elle.

— Vous savez très bien qu’on n’a pas le droit de vous remettre quoi que ce soit.

— J’en ai un vide dans ma poche, je vais faire le transfert.

Le chef hocha la tête. Marianne mit les Marlboro dans l’emballage Camel, en alluma une puis renvoya le paquet à son malheureux propriétaire, un petit sourire narquois en guise de merci.

— Alors, qu’est-ce qui vous amène dans cet endroit charmant ?

— On pourrait peut-être se présenter… Je suis Franck et voici Laurent et Philippe.

— Ça, c’est des présentations ! D’habitude, les flics, ils donnent d’abord leur grade et après, leur nom ! Du style, commissaire Machin-chose, lieutenant Trucmuche !

— Eh bien, nous en resterons aux prénoms, répondit Franck.

Ça sentait le traquenard à plein nez. De plus en plus intéressant… Marianne les dévisagea tour à tour. À peine quelques secondes pour les jauger. Franck, quadragénaire bon chic bon genre, plutôt beau gosse, chemise impeccable et teint hâlé ; pas un cheveu ne dépassait. Très accro à son apparence. Ambitieux, mégalo même. Et des yeux étonnants. D’un vert profond, comme deux émeraudes. Avec un soupçon d’ocre autour de la pupille.

Laurent, quelques années de plus, pas du tout le même style. Plus décontracté, beaucoup moins soigné. Assez banal, ni vraiment moche, ni vraiment beau. Pas rasé, mal coiffé. Et il fumait des Marlboro. Un type qui aimait son boulot, qui ne vivait que pour ça.

Le dernier, Philippe, le plus jeune des trois. La trentaine, à tout casser. Jean, polo, bien propre sur lui. Visage agréable, muscles entretenus : un sportif. Mais là, il était un peu inquiet. Intimidé, même.

Elle avait forgé son intime conviction, jury à elle toute seule. Juste en les observant quelques secondes. Un jeu comme un autre. Trois flics pour elle toute seule, d’élite en plus. Officiers, probablement. Ça, c’était un autre jeu qui pouvait se révéler amusant.

Franck reprit la parole. À croire que les autres étaient muets. Ou juste là pour la figuration.

— Comment trouvez-vous la prison ? demanda-t-il en souriant.

Marianne en avala la fumée de travers.

— C’est une blague ? Y a une caméra cachée ou c’est pour un sondage ?!

— Non. Vous vous sentez bien ici ?

— Je rêve ! Tu me cherches ? C’est ça ?

Philippe écarquilla les yeux devant ce tutoiement intempestif. Mais Franck demeurait imperturbable.

— Bon, j’en conclus que vous n’y êtes pas heureuse, lança-t-il avec son insupportable sourire.

Marianne se leva, envoyant sa chaise par terre.

— Allez vous faire voir ! Et merci pour les clopes !

Elle se dirigea vers l’interphone pour appeler un gardien mais Franck continua.

— Ça vous dirait de sortir d’ici ?

Marianne stoppa net. Comme si elle venait de heurter une vitre invisible. Un peu sonnée.

Ne l’écoute pas ! Fais pas attention, tu sais bien que c’est impossible… ! Elle fit volte-face, le regard menaçant.

— Vous avez un drôle d’humour, Franck

— Je ne plaisante pas. Mais si vous ne voulez pas entendre la suite, nous pouvons en rester là…

— Asseyez-vous, nous serons mieux pour discuter, dit doucement Philippe en ramassant la chaise.

Pourquoi j’obéirais ? Sortir d’ici ? Impossible. Du bluff, Marianne ! Pourtant, elle consentit à reprendre position en face d’eux. Attirée par le chant des sirènes.

— Je disais donc que nous sommes venus vous proposer de quitter cette prison.

— C’est quoi, le piège ?

— Pas de piège. Juste certaines conditions. Vous devez passer un contrat avec nous.

— Expliquez-vous.

— C’est très simple. Nous organisons votre sortie, vous remplissez votre part du marché et vous êtes libre…

Son cœur jouait à saute-mouton.

— C’est quoi, ma part de marché ?

— Ça, je ne peux pas vous le dire, répondit Franck en souriant.

— Ben voyons, tu m’étonnes ! Quand je disais que c’était un piège !

— Pas du tout ! Mais vous comprendrez que je ne peux rien vous révéler ici… sans savoir si vous acceptez le contrat. Car si, ensuite, vous refusez, vous saurez des choses confidentielles… Et vous deviendriez… Comment dire… gênante.

— Gênante ?! Vous seriez obligé de me descendre, c’est ça ?

— Aucun risque ! assura-t-il. Parce que je ne vous dévoilerai rien.

Elle alluma une deuxième cigarette sous le regard un peu envieux de Laurent. Elle tremblait légèrement. Le manque, sans doute.

— Comment voulez-vous que j’accepte sans rien savoir ? lança-t-elle d’un ton agressif.

— Suffit de voir ce à quoi vous êtes prête pour sortir d’ici…

— Je sors comment ?

— Nous organisons votre évasion…

Elle eut un petit rire. Puis elle se leva avant de passer derrière eux.

— Mon évasion, hein ? Vous me prenez vraiment pour la dernière des connes, pas vrai ?

— Absolument pas… Loin de là !

— Ah oui ? Je m’évade, je remplis la mission, je me retrouve avec tous les flics de France aux trousses, et là, retour à la case départ ! Sauf que j’en prends plein la tête ! Je l’avoue, votre proposition est terriblement alléchante !

— Non. Nous vous fournirons de faux papiers, une nouvelle identité et de quoi partir à l’autre bout du monde… D’ailleurs, vous serez obligée de quitter le pays, ça fait partie du contrat.

Elle piétina son mégot sur le carrelage indifférent. Ses nerfs n’allaient pas tarder à lâcher. Elle hésitait entre lui sauter à la gorge ou dire banco !

C’est un piège, Marianne. Un piège grossier, en plus.

— J’ai des chances de sortir vivante de cette mission ?

— Oui. Je ne vous cache pas que ce sera dangereux. Cependant, on vous a choisie car l’on vous croit capable de réussir. Nous avons bien étudié votre dossier…

— Combien de chances de m’en tirer ?

— Je l’ignore. J’ai toujours été nul en probabilités !

Elle les transperça du regard l’un après l’autre. Debout, les mains posées bien à plat sur la table.

— Et qui me prouve qu’ensuite j’aurai la possibilité de me casser où je veux ? C’est écrit où ?

— Nulle part. C’est juste un contrat… oral.

— Une parole de flic ?! Alors là, je suis vachement rassurée ! Surtout que les poulets, ils m’adorent depuis que j’ai descendu deux des leurs ! Pas vrai ?

Franck perdit un peu de son flegme. Son visage accusa le coup.