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Kovask fit transporter le mort dans une chambre, puis délivrer l’homme attaché sur la table.

À l’heure dite, Cramer téléphona à Hugo. Sa voix n’était plus aussi ferme. Quant à l’infirme, il demanda à plusieurs reprises si tout allait bien. L’Allemand le rassura et Kovask raccrocha l’appareil qu’il avait tenu.

— Il s’inquiète. Je le sens nerveux. Au moindre bruit suspect il fera tout sauter.

— La fosse a des murs épais. Nous avons tourné autour tout à l’heure et il ne nous a pas entendus. Hugo ne risquera pas votre vie vous sachant ici.

Cramer hocha la tête.

— Je me demande s’il s’en soucierait.

Il était onze heures quand le téléphone extérieur sonna. Kovask décrocha, reconnut la voix de Brandt.

— J’ai pensé à une chose, fit ce dernier. Nous allons atterrir dans la propriété. Éclairez un carré d’une centaine de mètres de côté avec les voitures. J’ai tout le matériel. Dans une heure je suis là.

— Bonne idée ! Dit Kovask. Ce sera fait. Quand le moment fut venu, Kovask sortit avec deux des hommes. La Mercedes et la Dodge des deux derniers venus furent placées de façon à délimiter l’aire d’atterrissage.

Ce dernier s’effectua très facilement. Brandt sauta à terre et présenta l’homme qui le suivait :

— Winkler, premier maître, responsable de l’équipement Isherwood. Il avait une permission de la nuit et il a fallu le chercher dans tous les bas quartiers.

Winkler avait un visage sympathique, brûlé par le soleil. Il sourit discrètement.

— Nous ne serons pas trop pour transporter le matériel. Winkler a préféré emporter le groupe électrogène, se méfiant des chutes de tension du réseau local.

— Nous pourrons le laisser ici, dit le premier maître. J’ai suffisamment de fil et ça nous épargnera des efforts inutiles.

Quant à l’équipement Isherwood, il fallait deux hommes pour le transporter.

— Nous ne nous en sommes servis qu’une fois, expliqua Winkler. Et encore sur un vieux chaland. C’est vraiment un système étonnant. Nous travaillions par vingt brasses de fond. La température de l’eau à cette profondeur était de 15° centigrades et la salinité normale. Eh bien, en moins d’une minute, la brèche du chaland, huit à dix pieds carrés, était bouchée par une couche épaisse d’un pouce. Une minute plus tard, elle avait atteint près d’un pied. Et l’obturation était parfaite. Lies pompes ont commencé de vider le chaland et deux heures plus tard il pouvait flotter.

— Venez voir la fosse. Observez le plus grand silence.

— C’est vrai qu’il y a un type dedans? Demanda le premier maître d’une voix rauque.

Kovask hocha la tête.

— Oui, mais il y a aussi de quoi tuer des centaines de personnes. C’est lui ou elles.

— Je comprends, monsieur, dit Winkler. Seulement, l’espace de quelques secondes ce sera horrible pour lui.

Pendant une dizaine de minutes il examina la fosse puis ils remontèrent.

— Nous allons ceinturer le bloc avec nos tubes où circulera l’hélium à moins deux cents degrés. Je suppose que les murs de cette fosse font un pied d’épaisseur?

— Environ, dit Kovask.

— Ils vont se fendiller immédiatement et cela favorisera la pénétration du froid. La vapeur de l’air se figera sur-le-champ. Quant au gars … sa chair va éclater.

Kovask pensait aux rockets amorcés. Le mécanisme de percussion serait instantanément bloqué. Le premier maître le regardait.

— Vous aviez entendu parler de l’équipement Isherwood? C’est un procédé tout récent …

— Inspiré d’une technique française, ajouta Kovask. Une base aussi importante que celle de Cadix se devait de disposer d’un tel appareil. Comment allez-vous plaquer vos tuyaux?

— Avec des ventouses spéciales. Dès que l’hélium circulera ils se plaqueront à la paroi.

Kovask consulta sa montre.

— Il faudrait que tout soit prêt dans une demi-heure.

Au bout de ce temps là Martin Cramer téléphonerait à Hugo. L’homme devait transpirer fortement dans cette étuve. Ses mains resteraient collées à l’appareil, son oreille également. Il frissonna et essaya de chasser cette image.

Kovask consulta sa montre.

— Expliquez-moi le processus de la pénétration du froid.

— Il sera rapide. Une minute après la mise en route, la température à l’intérieur de la fosse sera à 0° centigrade. Ensuite, l’abaissement suit une progression géométrique. Trente seconde de plus et il fera moins quinze degrés. Au bout de cette nouvelle minute, entre moins cinquante et moins soixante degrés.

Kovask lui demanda de régler sa montre sur la sienne.

— Vous commencerez à 0 h 59. Martin Cramer téléphonera à une heure et je m’efforcerai que cette communication dure une minute.

Le premier maître le regarda curieusement.

— L’homme ne raccrochera pas.

— Je sais, dit Kovask. C’est ce que j’espère.

— Nous pousserons l’expérience jusqu’au bout?

— Oui. Jusqu’au bout.

Le premier maître inclina la tête.

— Bien, mais il faudra attendre un certain temps avant de pouvoir pénétrer dans l’endroit.

Les rouleaux de tube en plastique spécial furent déchargé et emportés jusqu’à la cave. Winkler enroulait soigneusement les sections autour de la fosse. Il ne les espaçait que de quelques centimètres. Plusieurs rouleaux furent nécessaires.

Dehors, le groupe électrogène ronronnait allègrement et alimentait déjà l’appareil Isherwood.

À 0 h 55 Kovask entra dans le bureau de Martin Cramer. Ce dernier, les yeux fermés, paraissait sommeiller, mais il les ouvrit quand l’Américain entra.

— Vous n’oubliez pas l’heure. Je vous préviens, c’est la dernière fois que j’accepte de téléphoner à Hugo. Il arrivera ce qu’il voudra ensuite. Cette situation ne peut s’éterniser.

Kovask resta impassible. L’Allemand ne croyait pas si bien dire. Il s’approcha des deux hommes de garde.

— Sortez, leur demanda-t-il à voix basse. Éloignez-vous.

Il avait donné la consigne aux autres et à Brandt. Le premier maître avait refusé d’abandonner ses appareils. Cramer le regarda avec surprise.

— Qu’est-ce que ça signifie? Quel est ce bruit de moteur?

— Vous verrez bien. Vous êtes toujours décidé à sacrifier Hugo à votre orgueil? Jusqu’au bout, vous espérez que nous ne réussirons pas?

La grande aiguille de sa montre était entre le 11 et le douze. Il restait deux minutes avant l’heure H. Cramer se redressa dans son fauteuil. Son teint se décomposait imperceptiblement depuis qu’il assistait impuissant et sans comprendre à toutes ces allées et venues.

— Vous bluffez, Kovask. Il ne peut rien arriver à Hugo. Je vous l’ai dit. En une seconde il peut nous faire tous sauter. Vous jouez avec nos vies, en ce moment.

Une seule minute, que la trotteuse grignotait allègrement. Kovask se dirigea vers la bibliothèque tout en comptant mentalement. Il ne toucha pas au combiné. Il restait encore trente secondes. Dans le château, il ne restait plus que Hugo et le premier maître Winkler dans la cave. Lui et Cramer dans ce bureau.

Cramer devina soudain la tension qui s’emparait de lui.

Kovask ! Que se passe-t-il?