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— Olivier, vous pouvez fouiller dans mon sac ? Au fond, vous allez trouver une robe rouge. Vous pouvez me la passer ?

Elle tendit son bras nu au dessus de la porte.

Stupéfait, Olivier Levasseur ouvrit le sac à dos de la journaliste et découvrit une minuscule robe de soirée en tissu élastique infroissable, roulée en boule. La main de Maline attrapa le bout de tissu rouge et disparut.

— Merci, fit la voix cristalline de Maline. Olivier, vous pouvez m’attraper ça ?

Sous les yeux éberlués du chargé de relations presse, Maline fit passer au-dessus de la porte des sanitaires son minuscule bustier et son short en jean !

Olivier Levasseur se hâta de tout ranger dans le sac à dos, inquiet malgré lui du regard des touristes du voisinage. Lorsqu’il releva la tête, il n’en crut pas ses yeux.

Au-dessus de la porte, au bout de la fine main de la journaliste, pendait un soutien-gorge !

— Olivier ? fit Maline d’une voix ironique. Vous êtes là ?

Levasseur dissimula prestement le sous-vêtement avec le reste, dans le sac à dos.

La porte des sanitaires s’ouvrit. Maline sortit, triomphante, pieds nus, ses cheveux décoiffés tombant sur les épaules. La petite robe rouge infroissable se tendait sur les formes généreuses de la journaliste.

Provocante. Irrésistible.

Olivier Levasseur détourna son regard des mamelons qui pointaient sous le tissu tendu.

— Je suis prête, monsieur le chargé en chef des relations presse internationales du monde entier. Votre cavalière est-elle à votre goût ?

Levasseur reprit doucement ses esprits. Après un rapide et pudique examen, il lança, beau joueur :

— Vous êtes somptueuse, Maline.

— On y va ? répondit la journaliste enjouée. Je me maquillerai en route. Je dois aussi avoir un bracelet et un collier au fond de mon sac.

Elle attrapa le bras du chargé de communication, pas encore tout à fait remis de ses émotions :

— Cela fait longtemps que j’avais coché sur mon agenda ce cocktail officiel. Il me manquait juste un cavalier. Alors, dites-moi Olivier, qui y aura-t-il comme personnalités sur la Bodega ?

19. « L’heure des mamans »

17 h 53, commissariat de Rouen, 9, rue Brisout-de-Barneville

Lorsque le téléphone sonna, le commissaire Paturel regarda sa montre. 17 h 53. C’était Ovide Stepanu. Le commissaire soupira. Pourvu que cet oiseau de mauvais augure soit bref. Il fallait qu’il soit à 18 h 30, dernière limite, à Sotteville-lès-Rouen… devant l’entrée du centre de loisirs ! Tout commissaire divisionnaire qu’il était, il devait récupérer ses enfants, Léa et Hugo.

« Après 18 h 30, ils seront sur le trottoir. » C’est ce que lui avait affirmé cette saleté de directrice du centre. Ils n’assuraient la garderie que jusqu’à 18 h 30… Et elle lui avait rappelé. « L’heure des mamans, c’est 17 heures !». L’heure des mamans ! Quelle connasse ! Le commissaire était en train de s’apercevoir qu’il vivait dans une putain de société sexiste. Une société matriarcale sans aucun respect pour les pères…

— Allo, Gustave ? Tu es là ? C’est Ovide. Je suis rue du Champ-de-Foire-aux-Boissons, juste à côté de la rue Pasteur, au-dessus des quais. On a retrouvé le lieu où Mungaray a été tué ! Une patrouille a détecté des traces de sang. L’expertise vient de le confirmer. C’est le sang de Mungaray. J’y suis pour l’instant, on continue les analyses.

Gustave Paturel souffla. L’enquête progressait.

— Rue du Champ-de-Foire-aux-Boissons, répondit-il, c’est juste au-dessus de la Cantina, non ? Ça pourrait vouloir dire que Mungaray a été poignardé juste après être sorti de la Cantina. Ça renforce l’idée que la fameuse fille blonde peut avoir été témoin… Ou même l’assassin.

— Au risque de paraître rabat-joie, siffla Stepanu, la fille est peut-être aussi une autre victime dont on n’a pas encore retrouvé le corps.

Le commissaire frissonna. Stepanu pouvait bien avoir raison.

— Toujours le mot pour rire, Ovide, commenta-t-il. Merci de ton optimisme ! Rue du Champ-de-Foire-aux-Boissons, ce n’est pas très loin non plus du Cuauhtémoc. Malgré ce que dit le légiste, Mungaray pourrait ne pas être mort sur le coup, s’être traîné jusqu’à son bateau. C’est l’explication la plus logique, non ? Ovide, vous avez repéré des traces de sang ailleurs, entre la rue du Champ-de-Foire-aux-Boissons et les quais ?

— J’en sais rien. Je ne crois pas. Le légiste avait l’air formel sur l’heure de la mort.

— Vérifie ! Ça devient urgent de trouver une explication rationnelle à cette histoire de cadavre qui a oublié de pourrir pendant trois heures.

Sarah Berneval entra dans le bureau du commissaire armée d’un second téléphone, en faisant de grands signes à Gustave Paturel pour lui signifier que c’était urgent. Le commissaire répondit par une moue agacée indiquant qu’il était déjà en ligne.

— O.K. Ovide, continua Paturel, est-ce que tu as avancé avec le capitaine du Surcouf, le bateau-promenade à côté du Cuauhtémoc ?

— Désolé Gustave, répondit Stepanu. J’ai dû me rendre en urgence rue du Champ-de-Foire-aux-Boissons. J’ai pas eu le temps.

Le commissaire Paturel savait que tous ses inspecteurs étaient débordés. Difficile d’avancer plus vite sans autres hommes. Il savait qu’il pouvait demander du renfort à Paris. Le préfet pourrait l’appuyer, à cause de l’Armada, mais cela signifiait à tous les coups qu’ils dépêcheraient à Rouen les grands moyens, la police scientifique et tout le reste. Il serait mis sur la touche. On n’en était tout de même pas là.

— C’est pas grave, Ovide. Nicolas Neufville ne va pas s’envoler ce soir. On va avancer à petits pas de ce côté-là. Autre chose, en ce qui concerne la ménagerie, les tatouages, le requin et les autres animaux de la jungle, tu as une idée ?

Sarah Berneval insistait toujours avec son téléphone, se dandinant comme si elle avait une envie pressante.

« Qu’est-ce qu’elle peut bien vouloir ? », pensa le commissaire. Il ne pouvait pas être sur tous les fronts en même temps. Cela pouvait bien attendre deux secondes ! Il écouta la réponse de Stépanu :

— J’ai fait faire des dossiers par le pôle de documentation. Je vais repasser les chercher tout à l’heure au secrétariat et y bosser ce soir…

— O.K…

Sarah Berneval planta quasiment le second téléphone dans l’oreille du commissaire.

— Bon Ovide, à plus tard, je dois raccrocher.

Il se retourna, agacé, vers sa secrétaire :

— Quoi ?

— On vient de recevoir un coup de fil d’une certaine Marguerite Duclos. Elle habite place de la Rougemare… Elle prétend avoir vu un type, de dos, qui menaçait un gosse… avec un poignard. J’ai pensé que…

Le visage du commissaire changea soudain d’expression.

— Nom de Dieu ! Il y a combien de temps ?

— Une minute ou deux, pas plus !

— Putain ! Vous m’envoyez place de la Rougemare la patrouille la plus proche. Tout de suite. Vous prévenez aussi Scotto qu’il sorte une Subaru. Il m’emmène !

Franck Scotto était réputé pour être le pilote le plus rapide du commissariat de Rouen. Le commissaire prit à peine le temps de jeter un coup d’œil sur sa montre. 17 h 57. L’image fugitive de Léa et Hugo seuls sur le trottoir du centre de loisirs passa devant ses yeux. Il n’avait hélas pas le temps de penser davantage à eux. Il attrapa sa veste à la volée et sortit en courant.