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Le Vigan se demande, Harras lève le doigt… une idée !… pardi !…

« Monsieur Le Vigan, café-crème ! encore mieux, n'est-ce pas ?… j'oubliais ! j'ai tout !… j'ai de tout !…

— Mais certainement !… café-crème ?… où ?…

— Dans la voiture ! que je suis sot !… vous allez voir !… l'administration ! Kracht ! Kracht ! vous savez ?… le coffre en zinc !… amenez-le ici… voulez-vous ? »

Nous attendons… il amène ce coffre… en fait de coffre je fais la remarque, c'est une « cantine »… bel et bien !… il l'ouvre… pleine de « thermos » !…

« Buvez !… buvez !… café-crème ! à votre bonne santé ! »

Je goûte… ça va, c'est du vrai !… on ne dormira plus !… sept… huit « thermos » et bien chauds !…

Le Vigan goûte… ah, pas de l'ersatz !… du moka-crème ! positif !

« Vous n'avez pas ça dans l'armoire ! ooah ! »

Fine plaisanterie !

Le Vigan se met à chanter… oui !… et assez fort…

« Harras nous ne dormirons plus !

— Attention !… que notre général arrive ! »

Le Vigan ?… le général ?… là ! là ! il en a vu d'autres !… qu'il arrive !

« Y avait dix filles dans un pré ! Toutes les dix à marier ! Y avait Dine !… y avait Chine !

— Chutt ! chutt !… La Vigue !

— Vous voyez !… si ça roupille !

Et la duchesse de Montbazon !

— Tais-toi !… tais-toi ! »

Il se vexe…

« Alors je vais tout lui raconter !

— Tu veux aller en prison ? casserole !

— Certainement, je veux !

— Tu veux qu'on te fusille !

— Eh, pourquoi pas ?… dis-moi pourquoi pas ? »

Je fais signe à Harras… sa tête !… oui !… oui !… aucune importance !… il sait… qu'est-ce qu'il ne sait pas ?…

Mais le chariot est-il attelé ?

« Kracht !… Kracht ! »

Encore Kracht…

« Oui !… tout est prêt !… Nikolas est prêt… et les deux S.A. d'escorte… nous nous devons attendre… ordre d'Harras !… Kracht va encore à l'isba et revient…

— Ne les faites pas encore sortir… ils ont mangé ?… ils ont dormi ? tous ?

— Ja ! ja… ja ! »

Nous, nous attendons… une minute ! deux minutes… et rrrr !… une moto… une autre… et tout un escadron de motos !… c'est quelqu'un ! il m'avait prévenu… il me répète…

« Vous ne l'appelez pas par son nom !… surtout !… Confrère, voilà !… Confrère !… n'ayez pas l'air de savoir… Madame non plus !… Le Vigan non plus.. il est très aimable, très simple… »

Rrrrr !… encore d'autres motocyclettes… et puis une très grosse ferraille… une traînée de chaînes…

« Lui vient en tank !… panzer !… panzer !… général, n'est-ce pas ?… général !… il sait très bien parler aux fous !… oui !… aimable !… vous verrez !… pas l'aliéniste intolérant ! non ! le maniaque, non ! »

Il a encore le temps de me dire…

« Très compréhensif !… mais pas lui parler de son frère !

— Non !… non ! non ! »

Voici le général… il descend du tank… il doit connaître le domaine… et le manoir… il est habillé comme Harras… tout caméléon militaire… mais pas d'armes… au moins apparentes… il vient vers nous ! heil ! heil ! et « garde-à-vous ».. et puis poignées de main… devant Lili il s'incline… il ôte son casque… révérence !… pas du tout fantasque comme l'Harras, non !… je dirais même très posé, pas le côté ooah ! La Vigue coupe court…

« Catherinette !… Catherina ! Et la duchesse de Montbazon ! »

Aucune surprise…

« Mais oui mon cher, mais certainement ! »

Il savait…

« Mes vœux ! prières à Célimè… è… ne ! Toutes mes grâces à la Du.. mai… ai… ne ! »

Bravo ! bravo ! le général applaudit… La Vigue s'assoit… il voit quelqu'un qui le comprend… et tout de suite…

« Alors Harras parlons français ! »

Ce Göring-ci ? à peu près dans la « quarantaine », pas poussah comme l'autre !… du tout !… ni parlant fort… la voix enrouée, basse, les cheveux tout blancs… un homme à ennuis… et quelles rides !… cent ans !… les yeux très clairs, bleus… après tout, nous aussi avons des ennuis… La Vigue boude… il prend une autre chaise… non !… un tabouret !… je vais lui parler à l'oreille…

« Tu sais La Vigue, tu peux y aller… tu peux hurler que t'as tué le Landrat !… vas-y !… essaye !

— Il s'en fout tu crois ?

— Oh, et comment !

— Non ! j'en parlerai pas !

Il emporte son tabouret il va dans l'autre coin… il s'assoit… il est vexé… il louche… il ne louche plus… le médecin général va parler… à moi !… il va m'expliquer… je pensais à autre chose..

« Voici n'est-ce pas, cher Collègue !… »

Il parle très doucement, il a peur de n'être pas compris… je vois, il a la main fine, très fine… mais les ongles sales… le voyage en tank…

« Voici n'est-ce pas… la Chancellerie a dû s'occuper de Zornhof… ils m'ont envoyé pour que tout s'arrange… très vite !… vous savez n'est-ce pas ?… les difficultés à l'Est… et à l'Ouest aussi, récemment… sérieuses… nous devons lever de nouvelles troupes… les levées !… vous savez : les levées !… comme Napoléon !… encore beaucoup d'autres ennuis !…

— Oh certainement mon général !

— Non ! non !… pour vous, pas général !… votre humble confrère… c'est tout !… et psychiatre !… alors ?… fous entre les fous !… vous savez ! »

Il va sourire… non… il esquisse seulement…

« Si !… si !… très visible ! ils m'ont recouvert de broderies… qu'il ne me manque rien !… n'est-ce pas Harras ?

— Oooah ! vous vous accablez !

— Pas tellement !… pas tellement Harras ! »

Il m'explique…

« Zornhof est trop près de Berlin, scandale ! pour toutes ces histoires !… n'est-ce pas ?… vous me comprenez ? cent kilomètres ! à côté !… loin, trois cents kilomètres mettons, c'était infime !… le parti ne s'en occupait pas !… mais là, impossible ! le scandale c'est la chambre n'est-ce pas à côté !… on entend tout !… n'est-ce pas confrère ?

— Tout à fait de votre avis !

— Je dois arranger tout ! très vite !… qu'on n'en parle plus !

— Certainement ! certainement confrère !

— Les ordres ont été donnés !… de Berlin les ordres !… nous n'est-ce pas ici, les détails !… alors Harras ? »

Harras n'arrête pas d'aller revenir… le général lui demande…

« Tout est prêt ?

— Parfaitement !

— Faites-les sortir, mais attention !. ils vont se débattre !…

— Non !… non !… ils dorment !

— Ceux de l'isba ?

— Oui… »

Les deux femmes là, sur leurs divans, Tulff-Tcheppe et Marie-Thérèse n'ont pas à bouger… elles n'ont pas vomi… le Revizor non plus, il se plaint un peu, mais en dormant…

Kracht me souffle, le mieux, Tulff-Tcheppe, de la porter comme elle est, dans des couvertures, emmitouflée, jusqu'au chariot… je veux bien… on s'y mettra six… huit… on l'étendra… bien couverte elle se réveillera pas… qu'elle arrivera comme ça telle quelle là-bas dans son château, dormante ! que c'est rigolo !… je suis bien fatigué, mais tout de même je remarque que notre éminent confrère ne nous a pas parlé des deux morts… trois !… j'oubliais le Landrat ! mais non ! mais non ! on oublie rien ! la hâte, c'est tout ! Kracht a les trois « constats » là dans sa poche… Harras les lui demande… « vite Kracht ! vite ! » Göring doit les « certifier »… on les lui présente… il lit…