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Soudain, elle se pencha, les yeux rivés sur l’écran.

— Oh ! oh !… Nous avons de la visite… Une voiture.

— Ce ne sont sûrement pas nos hommes, dit Mme Minchenko. Les choses auraient-elles mal tourné ?

— Ce n’est pas votre Land Rover.

Silver effleura quelques touches du clavier, zoomant sur le véhicule. Un rayon de soleil embrasa soudain le nuage de poussière.

— On dirait une voiture de la sécurité de GalacTech.

— Oh non !…

Mme Minchenko se redressa sur son siège.

— Que va-t-on faire ?

— Quoi qu’il arrive, on n’ouvre pas les écoutilles. Ça, c’est sûr.

Quelques minutes plus tard, la voiture s’arrêtait à une quinzaine de mètres de la navette. Une antenne sortit du toit. Aussitôt, Silver fit apparaître le menu com de l’ordinateur. Le vaisseau semblait avoir accès à une multitude de canaux. Elle se connecta sur celui de la sécurité : le 9999.

—… Ils sont muets, là-dedans, ou quoi ! Hé, vous, là-haut ! Répondez !

— Oui, dit Silver. Que voulez-vous ?

Un bref silence, puis :

— Pourquoi ne répondiez-vous pas ?

— J’ignorais que vous m’appeliez.

— Bon, en tout cas, cette navette appartient à GalacTech.

— Moi aussi. Et alors ?

— Hein… ? Écoutez, ma petite dame, je suis le sergent Fors, service de sécurité de GalacTech. Je vous demande de débarquer et de nous remettre cette navette.

Une voix en fond sonore, assez forte pour être distincte, intervint :

— Dis donc, Bern… tu crois qu’on touchera les dix pour cent ? Ce serait normal : on retrouve un objet volé, on le ramène et on touche la prime.

— Tu rêves, vieux, répondit un troisième homme. Dix pour cent sur une navette ? Ça ferait deux cent cinquante mille. T’imagines ?

Mme Minchenko, la voix légèrement chevrotante, se pencha pour intervenir :

— Jeune homme, ici Ivy Minchenko. Mon mari, le Dr Minchenko, a emprunté cette navette afin de répondre à une urgence médicale. Il en a non seulement le droit, mais le devoir, et le vôtre, de devoir, selon le règlement de GalacTech, est de l’aider et non de l’entraver dans l’exercice de ses fonctions.

Un grognement quelque peu ahuri accueillit ces propos péremptoires.

— Moi, mon devoir, c’est de récupérer cette navette. J’ai des ordres. Je ne suis pas au courant d’une urgence médicale.

— Eh bien, maintenant vous l’êtes.

De nouveau, la voix à l’arrière du véhicule :

— Il n’y a que deux femmes, là-dedans. On y va.

— Allez-vous, oui ou non, ouvrir cette écoutille ? demanda le sergent.

Silver ne répondit pas. Mme Minchenko haussa un sourcil interrogateur, et la quaddie secoua la tête. Non. La vieille dame acquiesça en soupirant.

Le sergent répéta sa question. Le ton montait. Silver devina qu’il contenait mal les obscénités dont il mourait d’envie de les abreuver. Trente secondes plus tard, la communication était soudain coupée.

Après quelques minutes, les portières de la voiture s’ouvrirent. Les trois hommes, le visage dissimulé sous leur masque, s’avancèrent jusqu’à la navette et levèrent la tête vers l’écoutille, loin au-dessus d’eux. Au terme d’une brève concertation, ils retournèrent à la voiture. Renoncent-ils ? se demanda Silver sans oser y croire. Non. Ils vinrent se garer juste sous l’écoutille frontale. Deux des hommes, armés d’outils, grimpèrent sur le toit.

— Ils ont des pinces, dit Silver, paniquée. Ils vont essayer de forcer le système de fermeture.

Des coups sourds commencèrent à retentir dans le vaisseau.

Mme Minchenko désigna le soudeur laser.

— Il est peut-être temps d’utiliser ça ? suggéra-t-elle, proche de l’affolement.

Silver hésita, puis secoua la tête.

— Non. Pas une deuxième fois. Mais il n’est pas question non plus que je les laisse endommager la navette, sinon on ne pourra jamais retourner là-haut.

Elle tendit les mains vers les commandes. Renonçant à vouloir atteindre les pédales, elle se concentra sur les moteurs qu’elle mit en route. Le droit d’abord. Ensuite le gauche. Le ronronnement fit vibrer le vaisseau. Maintenant les freins… Elle tira doucement le levier pour les desserrer. Rien ne se passa. Puis la navette bondit. Affolée, Silver remit le levier sur sa position initiale : la navette s’arrêta en piquant du nez. Le cœur battant, elle tâtonna pour faire apparaître les vérifications d’usage sur l’écran de contrôle et s’aperçut que le volet du frein avait rasé la voiture, d’un mètre tout au plus. Elle se sentit coupable à la pensée qu’elle aurait pu, par inattention, endommager l’aile droite, avec toutes les conséquences dramatiques que cela aurait entraînées pour eux tous.

Les gardes de la sécurité semblaient avoir disparu. Ah non ! Ils étaient là, dispersés autour de la navette, le nez dans la poussière. L’un d’eux se releva et se dirigea vers la voiture. Et maintenant ? Que faire ? Si elle stationnait là, ou même si elle roulait pour s’arrêter un peu plus loin, ce serait juste reculer pour mieux sauter. Ils reviendraient à la charge. L’un d’eux aurait bientôt l’idée géniale de crever les pneus. Ou autre chose. Les moyens tout simples ne manquaient pas pour immobiliser une navette.

Silver se résolut à tenter le tout pour le tout. Penchée sur ce siège vraiment pas conçu pour un quaddie, elle relâcha de nouveau les freins et actionna le réacteur de gauche. La navette bondit et dérapa sur quelques mètres. L’écran de contrôle lui montra la voiture apparaissant en ombre chinoise derrière le rideau de poussière orange qu’avait soulevé la manœuvre. L’image ondoyait sous la chaleur.

Elle tira aussi fort qu’elle le put sur les freins et, de nouveau, fit rugir le moteur de gauche, encore qu’elle n’osât pas le lancer à fond, comme elle avait vu Ti le faire au cours de l’atterrissage.

La verrière en plastique du véhicule se craquela, bomba et commença à fondre. Si elle avait bien compris les explications de Leo à propos de ce carburant utilisé par les gravs, l’effet de son petit numéro ne devrait pas tarder à se faire sentir…

Une boule de feu jaune engloutit tout à coup la voiture, éclipsant un instant la luminosité du soleil couchant. Des débris volèrent dans toutes les directions. Sur son écran, Silver vit les gardes détaler comme les lièvres qu’elle avait pu admirer sur ses vids clandestins.

Desserrant les freins, elle laissa la navette rouler sur la terre craquelée du lac. Par chance, le sol étant assez lisse, elle n’eut pas à se soucier de devoir utiliser le volant pour éviter les nids-de-poule.

Un des gardes leur courut après en agitant les bras, mais renonça vite. Au bout de deux ou trois kilomètres, Silver freina et s’arrêta.

— Bon, soupira-t-elle. Cette fois, je crois qu’on en est débarrassées.

— C’est sûr, répondit faiblement Mme Minchenko, se penchant à son tour pour observer l’écran.

Une colonne de fumée noire signalait l’endroit qu’elles venaient de quitter.

— J’espère qu’ils ont de bonnes réserves d’oxygène, dit Silver.

— Ô mon Dieu !… Peut-être devrions-nous y retourner pour… enfin, pour faire quelque chose. Il faut souhaiter qu’ils seront assez intelligents pour rester près de leur voiture en attendant du secours au lieu d’aller se perdre dans le désert.

La glace.

Leo, depuis la cabine de contrôle surplombant la baie de chargement de l’Habitat, observait les quatre quaddies qui manipulaient avec précaution le second miroir vortex du D-620, intact celui-là. C’était un objet peu pratique à transporter, une sorte d’énorme entonnoir de titane de trois mètres de diamètre, mathématiquement incurvé. Une très belle courbe, mais hors normes, ce dont il lui faudrait tenir compte dans le processus de refabrication.