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— Quand ce sera le moment, qui lancera la deuxième partie ? avait demandé Ambra. Vous ou moi ?

— Je m’en charge, avait répondu Kirsch en sortant son téléphone turquoise aux motifs à la Gaudí. Avec ça. Cela fera partie du spectacle. Il me suffira de me connecter à mon serveur…

Il avait tapé quelques touches et l’appareil avait émis un bip, pour confirmer la connexion.

Une voix de synthèse avait résonné. Une voix de femme.

— BONSOIR, EDMOND. J’ATTENDS VOTRE MOT DE PASSE.

Le visage de Kirsch s’était illuminé.

— Et devant le monde entier, j’entrerai mon sésame, et ma découverte sera révélée à la fois ici, et partout sur la planète.

— Cela va faire son petit effet. À condition de ne pas oublier le code.

— Ce serait gênant, en effet.

— Vous l’avez noté quelque part, au moins ?

— Hérésie ! Un informaticien digne de ce nom ne note jamais ses mots de passe ! Mais le mien ne fait que quarante-sept caractères. Je ne risque pas de l’oublier !

— Quarante-sept ? J’ai déjà du mal à me rappeler mon code pour entrer au musée, et il n’a que quatre chiffres ! Comment comptez-vous vous souvenir d’une chaîne aléatoire de quarante-sept caractères ?

L’inquiétude de la jeune femme l’avait fait rire.

— Parce qu’ils ne sont pas aléatoires ! (Il avait baissé la voix :) En fait, c’est un vers de mon poème préféré.

— Un vers comme mot de passe ?

— Pourquoi pas ? Et le vers en question compte exactement quarante-sept lettres.

— Cela ne paraît pas très sécure.

— Ah non ? Vous avez deviné quel est ce vers ?

— Je ne savais même pas que vous aimiez la poésie !

— Tout juste ! Même si quelqu’un apprend que mon mot de passe est un vers, et qu’il trouve le bon passage sur des millions de possibilités, il lui faudra encore découvrir le très long numéro de téléphone pour pouvoir se connecter au serveur.

— Vous avez utilisé un raccourci tout à l’heure…

— Certes, mais ce téléphone a son propre code PIN et ne quitte jamais ma poche !

Ambra avait capitulé :

— D’accord, vous êtes un crack. Et votre auteur favori, qui est-ce ?

— Bien tenté ! Mais vous devrez attendre jusqu’à samedi soir pour le savoir. Vous verrez, ce vers est particulièrement à propos. (Il avait eu un nouveau sourire malicieux.) Cela parle du futur. Une prophétie qui est déjà en train de se réaliser.

À présent, le corps d’Edmond gisait au sol, au pied du pupitre… Quand la jeune femme releva la tête, une bouffée de panique s’empara d’elle.

Où était passé Langdon ?

Plus inquiétant encore, le deuxième agent de la Guardia Real — Rafa Díaz — était de retour. Il venait de franchir la déchirure dans le rideau et jetait un regard circulaire à la salle. Sitôt qu’il eut repéré Ambra, il marcha dans sa direction.

Jamais ils ne me laisseront sortir d’ici !

Soudain, Langdon apparut à son côté. Il plaça une main dans son dos et la poussa gentiment vers le fond du dôme, vers le passage par lequel ils étaient entrés.

— Mademoiselle Vidal ! cria Díaz. Où allez-vous ?

— On revient tout de suite, répondit Langdon en entraînant Ambra.

— Monsieur Langdon ! (Cette fois, c’était la voix de Fonseca.) Vous n’êtes pas autorisé à quitter cet endroit.

Ambra sentit la main du professeur se plaquer plus fort dans le creux de ses reins.

— Winston, murmura Langdon. Maintenant !

Et les ténèbres tombèrent sur la salle.

28.

L’agent Fonseca et son collègue Díaz foncèrent dans l’obscurité, éclairant leur chemin à la lumière de leur portable, pour rejoindre le tunnel où avaient disparu Langdon et Ambra Vidal.

À mi-parcours dans l’étroit passage, Fonseca trouva le téléphone d’Ambra par terre.

Elle s’en était débarrassée ?

Avec l’accord de la jeune femme, la Guardia Real avait installé une application dans le portable pour savoir à tout moment où la future épouse du prince se trouvait.

Il n’y avait qu’une explication possible : Mlle Vidal ne voulait plus de leur protection.

Cette idée inquiétait Fonseca, mais pas autant que de devoir annoncer à son chef que la future reina consorte avait disparu. Le commandant de la Guardia était impitoyable quand il s’agissait de garantir les intérêts du prince. Et ce soir, le commandant avait donné des instructions très claires : « Protégez Ambra Vidal. Ne la perdez pas de vue une seconde. »

Raté.

Les deux agents se précipitèrent vers la sortie du tunnel et débouchèrent dans le grand hall où semblait se tenir une convention de fantômes — une collection de visages blafards éclairés par les écrans de téléphone — tous en communication avec le monde extérieur pour raconter en temps réel ce qui se passait. Beaucoup s’impatientaient : « Lumières ! Lumières ! »

Le téléphone de Fonseca sonna.

— Ici, la sécurité du musée, dit une femme d’un ton pincé. Nous sommes au courant pour la panne d’électricité. Un bug informatique. On va rétablir le courant dans un moment.

— Les caméras fonctionnent toujours ? s’enquit l’agent pensant à leur système de vision nocturne.

— Bien sûr.

— Ambra Vidal vient de traverser le hall. Est-ce que vous pouvez voir où elle est allée ?

— Un moment, s’il vous plaît.

Fonseca attendit, exaspéré. Il venait de recevoir des nouvelles du central de Uber. Ils avaient du mal à localiser la voiture.

Décidément, tout allait de travers, aujourd’hui !

Ironie du sort, c’était sa première mission avec Ambra Vidal. D’ordinaire, étant donné son grade et son expérience, il était affecté à la sécurité du prince, mais ce matin, son commandant lui avait annoncé : « Mlle Vidal va assister à une soirée contre l’avis de Don Julián. Vous allez l’accompagner et vous assurer qu’elle ne risque rien. »

Il était loin de se douter que cette cérémonie tournerait en une charge haineuse contre l’Église et se terminerait par un assassinat en direct. Et Ambra Vidal avait refusé de prendre l’appel de son fiancé, qui se faisait un sang d’encre…

Le comportement de la jeune femme devenait de plus en plus incompréhensible. Voilà qu’elle voulait échapper à leur protection pour s’enfuir avec ce professeur américain.

Si le prince apprenait ça…

La vigile du musée revint en ligne.

— Mlle Vidal et un homme ont bien quitté le hall. Il ont pris la coursive et sont entrés dans l’expo de Louise Bourgeois. En sortant, c’est à votre droite. La deuxième galerie.

— Merci ! Ne les lâchez pas !

Fonseca et Díaz traversèrent le hall au pas de course et se précipitèrent sur la passerelle. Tout en bas dans l’atrium, les gens se dirigeaient vers les sorties.

À sa droite, comme l’avait indiqué la femme de la sécurité, il trouva une grande galerie. Un écriteau indiquait : CELLULES.

L’endroit était gigantesque et abritait une collection de cages, chacune contenant une sculpture étrange.

— Mademoiselle Vidal ! Monsieur Langdon ! appela Fonseca sur le seuil.

Pas de réponse. Les deux agents commencèrent à inspecter la galerie.

*

Loin des agents de la Guardia, juste derrière le dôme, Langdon et Ambra se faufilaient dans l’entrelacs d’échafaudages, en direction du panneau « Sortie » qui brillait au loin.