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Les liens d'affection qui les avaient rapprochés dès le premier instant se sont encore consolidés, et le jeune homme n'oublia jamais cette rencontre avec le Christ à l'ombre des dattiers auréolés de lumière.

Durant un mois, Jeziel, maintenant connu sous le nom d'Etienne, s'est imprégné de l'étude des exemples et des enseignements du Maître qu'il n'avait pu connaître de son vivant.

La maison des apôtres à Jérusalem offrait une aide chaque fois plus grande aux nécessiteux, exigeant un taux élevé d'affection et de dévouement. Il y avait des fous qui arrivaient de toutes les provinces, des vieux abandonnés, des enfants faibles et affamés. Et ce n'était pas tout. À l'heure des repas, de longues files de mendiants imploraient l'aumône de la soupe. Avec d'énormes sacrifices tout en cumulant les tâches, Jean et Pierre soutenus par leurs compagnons, avaient construit un modeste pavillon, destiné aux services de l'église et qui devait servir à diffuser les messages de la Bonne Nouvelle. Toutefois l'assistance aux pauvres ne laissait aucune trêve au labeur des idées évangéliques. C'est alors que

Jean se dit qu'il n'était pas raisonnable que les disciples directs méprisent la semence de la parole divine et passent leur temps au service du réfectoire et des infirmeries, vu qu'à chaque jour qui passait, se multipliait le nombre de malades et de malheureux qui faisaient appel aux partisans de Jésus comme dernier espoir à leur cas particulier. Il y avait des malades qui frappaient à la porte des bienfaiteurs de la nouvelle institution exigeant des conditions spéciales pour leurs protégés, des amis qui demandaient que des mesures fussent prises en faveur des orphelins et des veuves.

Lors de la première réunion dans l'humble église, Simon Pierre a alors demandé que soient nommés sept assistants pour le service des infirmeries et des réfectoires, une décision qui fut approuvée à la satisfaction générale. Parmi les sept frères choisis, Etienne qui avait la sympathie de tous fut désigné.

Pour le jeune de Corinthe une vie nouvelle a commencé. Les mêmes vertus spirituelles qui illuminaient sa personnalité et qui avaient tellement contribué à la guérison du patricien qui lui avait rendu sa liberté, diffusaient parmi les malades et les indigents de Jérusalem les plus saintes consolations. Une grande partie des souffrants, rassemblés dans la grande maison des disciples, avait retrouvé la santé. Des vieux accablés reprenaient courage sous l'influence de ses paroles inspirées par la source divine de l'Évangile. Des mères angoissées venaient le voir pour des conseils ; des femmes du peuple, épuisées par le travail et les angoisses de la vie, désireuses de trouver la paix et la consolation, se disputaient le réconfort de sa présence douce et fraternelle.

Simon Pierre ne cachait pas son contentement face aux victoires de son fils spirituel. Les nécessiteux avaient l'impression d'avoir reçu un nouveau messager de Dieu pour soulager leurs douleurs.

En peu de temps, Etienne était devenu célèbre à Jérusalem pour ses actes presque miraculeux. Considéré comme l'élu du Christ, en quelques mois, son attitude résolue et sincère obtenait les plus vastes conquêtes pour l'Évangile de l'amour et du pardon. Ses nobles efforts ne se limitaient pas à atténuer la faim des désemparés. Parmi les apôtres galiléens, ses paroles brillaient lors des prêches à l'église, illuminées par sa foi ardente et pure. Quand presque tous les compagnons, sous prétexte de ne pas blesser de vieux principes établis, évitaient de faire des commentaires en public ; passant outre les considérations flatteuses vis- à-vis du judaïsme dominant, Etienne présentait courageusement à la foule, le Sauveur du monde dans la gloire des nouvelles révélations divines, indifférent aux luttes qu'il pouvait provoquer en commentant la vie du Maître avec son verbe enflammé de lumière. Les disciples eux-mêmes étaient surpris par la magie de ses profondes inspirations. En âme fortifiée à la forge sublime de la souffrance, son exhortation était pleine de larmes et de joies, d'appels et d'aspirations.

En quelques mois, son nom était auréolé d'une vénération surprenante. Et à la fin du jour quand arrivaient les prières de la nuit, le jeune homme de Corinthe, aux côtés de Pierre et de Jean, parlait de ses visions et de ses espoirs, plein de l'esprit de ce Maître adorable qui, à travers son Évangile, avait semé dans son cœur les étoiles bénies d'une joie infinie.

SUR LA ROUTE DE JOPPÉ

Nous sommes dans la vieille Jérusalem par un matin clair de l'année 35.

Dans un solide édifice où tout transpire le confort et le luxe de l'époque, un homme encore jeune semble attendre impatiemment quelqu'un qui a du retard. À la moindre rumeur de la voie publique, empressé, il court à la fenêtre, puis se rassoit et regarde indifférent des papyrus et des parchemins comme s'il s'amusait à tuer le temps.

Arrivé en ville après une semaine d'un voyage exhaustif, Sadoc attendait son ami Saûl pour l'étreindre amicalement et lui témoigner sa vieille amitié.

Peu après un petit véhicule, comparable aux biges romaines, tiré par deux magnifiques chevaux blancs franchît la porte. Quelques minutes plus tard, nos deux personnages se saluèrent avec effusion, débordant de joie et de jeunesse.

Le jeune Saûl portait en lui toute la vivacité d'un homme célibataire, avoisinant la trentaine. Sur son visage plein de virilité et d'une beauté masculine, les traits Israélites étaient surtout présents dans son regard profond et perçant, propre aux tempéraments passionnés et indomptables, riches d'acuité et de résolution. Vêtu d'une tunique du patriciat, il parlait de préférence le grec qu'il avait appris à apprécier dans sa ville natale à travers ses maîtres favoris, étudiés dans les écoles d'Athènes et d'Alexandrie.

Quand es-tu arrivé ? - a demandé Saûl avec bonne humeur à son visiteur.

Je suis à Jérusalem depuis hier matin. D'ailleurs, j'y étais avec ta sœur et ton beau- frère qui m'ont donné de tes nouvelles avant de partir pour Lydde.

Et comment va ta vie à Damas ?

Très bien comme toujours.

Avant qu'il n'ait eu le temps de réfléchir, l'autre lui dit :

Mais comme tu as changé !... Une voiture à la romaine, ta conversation en grec et...

Saûl, néanmoins, ne le laissa pas continuer et conclut :

Et la Loi dans mon cœur toujours aussi désireux de soumettre Rome et Athènes à nos principes.

Toujours le même homme ! - s'exclama son ami d'un sourire franc. - D'ailleurs, je peux ajouter un complément à tes explications. La bige est indispensable à tes visites rendues à une maisonnette fleurie sur la route de Joppé ; et ta conversation en grec est nécessaire aux entretiens que tu as avec une descendante légitime d'Issacar, née entre les fleurs et les marbres de Corinthe.

Comment sais-tu cela ? - a demandé Saûl surpris.

Mais ne t'ai-je pas dit qu'hier après-midi, j'étais avec ta sœur ?

Confortablement installés dans des fauteuils de l'époque, tous deux poursuivirent leur conversation arrosée de quelques petits verres de ce capiteux vin de « Chypre ». Ils abordèrent longuement les problèmes de leur vie personnelle tout en se référant aux petits événements quotidiens.

Très jovial, Saûl a raconté à son ami qu'effectivement il était tombé amoureux d'une jeune fille de sa race qui alliait les dons d'une rare beauté aux trésors les plus sublimes du cœur. Son culte au foyer était l'un de ses attributs féminins les plus ineffables. Il lui a raconté leur première rencontre. Cela s'était passé en compagnie d'Alexandre et de Gamaliel, il y avait environ trois mois, lors d'une fête que Zacarias ben Hanan, un agriculteur prospère sur la route de Joppé, avait offerte à quelques amis bien placés, en l'honneur de la circoncision des fils de ses serviteurs. Il ajouta que l'hôte était un ancien commerçant Israélite émigré de Corinthe après de longues années de travail en Achaïe, mécontent des persécutions dont il avait souffert. Après de nombreuses épreuves survenues lors du voyage entre Cenchrées et Césarée, Zacarias était arrivé dans ce port dans de très mauvaises conditions financières, mais il avait été aidé par un patricien romain qui lui avait donné les moyens de louer une grande propriété sur la route de Joppé, à une certaine distance de Jérusalem. Accueilli généreusement chez lui maintenant qu'il était prospère et heureux, Saûl avait rencontré la jeune Abigail au tendre cœur, dotée des plus beaux attributs moraux que pouvait révéler une jeune fille de sa race. En fait, elle représentait à ses yeux son idéal de femme. Intelligente, elle connaissait bien la Loi et, surtout, elle était docile et affectueuse. Adoptée par le couple comme leur très chère enfant, elle avait amèrement souffert à Corinthe où elle avait laissé son père mort et son frère asservi pour toujours. Depuis trois mois qu'ils se connaissaient, ils échangeaient les plus joyeux espoirs et qui sait ? L'Éternel leur réservait peut-être l'union conjugale comme couronnement à leurs précieux rêves de jeunesse. Saûl parlait avec l'enthousiasme propre à son tempérament passionné et palpitant. Dans son regard profond, on pouvait voir la flamme vivante de ses sentiments résolus concernant l'affection qui dominait ses facultés émotives.