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L'assemblée écoutait grandement surprise. Cependant quand l'orateur a souligné plus fortement la référence faite au Messie de Nazareth, les pharisiens présents s'élevèrent ensemble avec le jeune de Tarse et éclatèrent en protestations criant hallucinés :

Anathème ! Anathème !... Punition au transfuge !

Etienne reçut avec sérénité la violente réprobation et dès que l'ordre fut rétabli, il a continué avec fermeté :

Pourquoi me huez-vous de cette manière ? Toute précipitation de Jugement démontre de la faiblesse. Premièrement, J'ai renoncé à toute discussion considérant que tout le ferment de la discorde doit être éliminé ; mais au quotidien le Christ nous convoque à un nouveau travail et, certainement qu'aujourd'hui, le Maître m'appelle afin de vous parler de ses puissantes vérités. Vous désirez m'imposer le ridicule et la plaisanterie? Cela, cependant, doit me consoler parce que Jésus est passé par là à un degré bien plus élevé. Malgré votre répulsion, je m'honore de proclamer les gloires parfaites du prophète nazaréen dont la grandeur venait à la rencontre de nos ruines morales, nous relevant avec son Évangile de rédemption vers Dieu.

Un nouveau torrent d'injures lui a coupé la parole. Des railleries et de dures insultes lui étaient lancées au hasard, de tous côtés. Etienne n'a pas fléchi. Se tournant, serein, il a fixé noblement les spectateurs, gardant l'intuition que les plus exaltés étaient les pharisiens les plus profondément atteints par les nouvelles vérités.

Attendant qu'ils retrouvent leur calme, il a encore dit :

Amis pharisiens, pourquoi vous entêtez-vous à ne pas comprendre ? Craignez-vous par hasard la réalité de mes affirmations ? Si vos protestations sont fondées sur la crainte, taisez-vous pour que je continue. Je vous rappelle que je me rapporte à nos erreurs du passé et celui qui s'associe dans la faute, donne le témoignage de l'amour au chapitre des réparations. Malgré nos misères, Dieu nous aime et tout en reconnaissant ma propre indigence, ne pourrais-je pas vous parler comme un frère. Néanmoins si vous exprimez du désespoir et de la révolte, souvenez-vous que nous ne pourrons pas fuir la réalité de notre profonde insignifiance. Vous avez peut-être lu les leçons d'Ésaïe ? Il convient de prendre en considération l'exhortation9 : Ne sortez pas avec précipitation, ne partez pas en fuyant ; car l'Éternel ira devant vous, et le Dieu d'Israël fermera votre marche. Écoutez-moi ! Dieu est le Père, le Christ est notre Seigneur.

Nombreux sont ceux qui parlent de la Loi de Moïse et des prophètes ; néanmoins, pourriez-vous affirmer avec la main sur la conscience le parfait respect de ses glorieux enseignements ? Ne seriez-vous pas aveugles actuellement en vous niant la compréhension du message divin ? Celui que vous appelez ironiquement le charpentier de Nazareth, a été l'ami de tous les malheureux. Son propos ne s'est pas limité à exposer des principes philosophiques. Par l'exemple, il a changé nos habitudes, il a reformé les idées les plus élevées avec le sceau de l'amour divin. Ses mains ont anobli le travail, ont pansé les ulcères, ont guéri les lépreux, ont donné la vue aux aveugles. Son cœur s'est réparti entre tous les hommes par la nouvelle compréhension de l'amour qu'il nous a apporté par l'exemple le plus pur.

(9) Ésaïe, chapitre 52. Verset 12. - (Note d'Emmanuel)

Ignorez-vous par hasard que la parole de Dieu a des auditeurs et des pratiquants ? Il faudrait vous demandez si vous n'avez pas été que de simples auditeurs de la Loi pour ne pas fausser votre témoignage.

Jérusalem ne semble pas à mes yeux le sanctuaire des traditions de la foi que j'ai connu à travers les dires de mes parents dans mon enfance. Aujourd'hui, elle donne l'impression d'un grand bazar où se vendent les choses sacrées. Le Temple est plein de négociants. Les synagogues régurgitent de sujets concernant des intérêts mondains. Les cellules pharisiennes ressemblent à un guêpier d'intérêts mesquins. Le luxe de vos tuniques choque. Vos dépenses étonnent. Ne savez-vous pas qu'à l'ombre de vos murs, il y a des malheureux qui meurent de faim ? Je viens des faubourgs où se concentre une grande partie de nos misères.

Vous parlez de Moïse et des prophètes, je répète. Croyez-vous que les vénérables ancêtres négociaient avec les biens de Dieu ? Le grand législateur a vécu des expériences terribles et pénibles. Jérémie a connu de longues nuits d'angoisses à travailler pour l'intangibilité de notre patrimoine religieux au milieu des égarements de Babylone. Amos était un pauvre berger, fils du travail et de l'humilité. Elias a souffert tous les types de persécutions, forcé à se réfugier dans le désert, n'ayant que des larmes comme prix de son illuminisme. Esdras a été un modèle de sacrifice pour la paix de ses compatriotes. Ézéquiel a été condamné à mort pour avoir proclamé la vérité. Daniel a supporté les peines infinies de la captivité. Mentionnez-vous nos héroïques instructeurs du passé rien que pour justifier la joie égoïste de la vie ? Où se trouve donc votre foi ? Dans le confort oisif, ou dans le travail productif ? Dans la bourse du monde, ou dans votre cœur qui est le temple divin ? Vous stimulez la révolte et vous voulez la paix ? Vous explorez votre prochain et vous parler d'amour pour Dieu ? Ne vous rappelez-vous pas que l'Éternel ne peut pas accepter les louanges des lèvres quand le cœur de la créature reste loin de lui ?

Face au souffle de cette sublime inspiration, l'assemblée était statique, incapable de se définir. Beaucoup d'Israélites pensaient voir en Etienne la résurgence de l'un des antiques prophètes de la race. Mais comme s'ils cassaient la mystérieuse force qui les interloquait, les pharisiens firent entendre un vacarme assourdissant, gesticulant au hasard, prononçant des injures, afin d'atténuer la forte impression causée par les élans éloquents et chaleureux de l'orateur.

Lapidons l'immonde ! Tuons la calomnie ! Anathème au chemin de Satan !...

Pendant cela, Saûl était devenu rouge de colère. Il ne réussissait pas à déguiser la fureur de son tempérament impulsif qui débordait de ses yeux inquiets et brillants.

Il a marché rapidement vers l'accusé, laissant comprendre qu'il allait faire cesser ses propos et l'assemblée s'est bientôt calmée bien que la rumeur des commentaires étouffés continue.

Percevant qu'il allait peut-être être soumis à la violence d'autant que les pharisiens demandaient sa mort, Etienne a fixé du regard les plus ironiques et les plus emportés, s'exclamant d'une voix forte et tranquille :