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— Viens me rendre compte quand tout sera prêt, ordonna Adam Salad Adam, remontant dans la dunette. Sur le pont, il avait le mal de mer, pourtant l’énorme super-gazier ne bougeait guère à cause de sa masse colossale.

Si Dieu était de leur côté, ils atteindraient le port de Dahran le lendemain matin à l’aube.

Le but était de s’approcher le plus possible des installations pétrolières saoudiennes et de faire ensuite exploser le super-gazier. D’après les spécialistes consultés, la déflagration causerait de tels dégâts qu’il faudrait des mois avant de pouvoir se resservir du plus grand port pétrolier. Juste avant l’explosion, Adam Salad Adam enverrait un message radio revendiquant au nom d’Al Qaida en Somalie l’attentat.. Non seulement les dégâts causés aux Saoudiens seraient terrifiants, mais le mouvement des Shebabs en profiterait et surgirait enfin sur la scène internationale, comme Al Qaida, après le 11 septembre 2001.

Au cas où un navire de guerre américain chercherait à les intercepter ou à prendre possession du « Venus Star », ils se feraient alors sauter, en espérant bien le détruire, mais ce n’était qu’un plan B moins satisfaisant.

Pour lutter contre le mal de mer, il étala son tapis de prière sur le sol métallique et se prosterna, remerciant Allah de l’avoir aidé à s’emparer de ce monstre d’acier plein de gaz.

Une véritable bombe flottante qui allait exploser au nez des infidèles.

Comme pour les avions utilisés le 11 septembre 2001, l’équipage du « Venus Star » serait sacrifié, mais il n’avait pas le choix.

* * *

— Le commandant vient de répondre qu’ils ont été abordés par des pirates et qu’il ne contrôle plus son navire, annonça Malcolm. Il n’a pas pu continuer, c’est un des pirates qui a pris la radio et a lancé des injures.

Malko regarda l’énorme « Venus Star ». Désormais, ils naviguaient de concert, séparés par moins d’un mile. Le « Bell 206 », lui, se tenait à bonne distance des RPG des pirates, volant à quelques centaines de mètres du super-gazier.

— Est-ce qu’on peut tenter de l’aborder ? demanda Malko à Malcolm.

Le Sud-Africain fit la moue.

— Avec le « Mac Arthur » c’est difficile, mes hommes ne sont pas entraînés à ce genre de chose. On peut tenter, à partir de l’hélico, de neutraliser le maximum de pirates, mais ils sont au moins une douzaine.

Il faudra s’approcher et ils peuvent nous faire du mal. En plus, une seule cartouche incendiaire tirée par nous au mauvais endroit et tout saute... Et nous avec, si nous sommes trop près.

Pas vraiment enthousiasmant.

Malcolm poussa soudain une exclamation.

— Regardez, le « Venus Star » change de course !

Effectivement, le sillage n’était plus rectiligne, mais courbe. Le « super-gazier » était en train d’amorcer un virage lent, à cause de sa masse, mais marqué. Les deux hommes l’observèrent. Peu à peu, il tournait vers bâbord et, au bout d’une demi-heure, il n’y eut plus aucun doute : il revenait sur ses pas !

Incompréhensible : le détroit d’Ormuz était une des zones maritimes les mieux protégées, avec des dizaines de navires de guerre occidentaux, iraniens et saoudiens. Qu’allait faire ce super-gazier dans ce goulet étroitement surveillé ?

Malko en tira une conclusion immédiate : l’information donné par Amin Osman Said se vérifiait : il ne s’agissait pas d’une attaque de pirates classique destinée à obtenir une rançon contre le navire et son équipage, mais d’autre chose : un acte terroriste. Ceux qui s’en étaient emparés voulaient utiliser l’énorme super-gazier comme une bombe flottante.

Quelque part dans le Golfe Persique, la zone où il y avait des dizaines de pétroliers... Malko en avait des sueurs froides. Il observa le « Venus Star » continuer son virage puis demanda à Malcolm de lui passer son Thuraya. Il y avait des décisions à prendre et il ne pouvait pas le faire tout seul.

Dès qu’il eut attrapé le satellite, Malcolm lui tendit le téléphone et il composa le numéro de Mark Roll, qui devait attendre anxieusement devant son téléphone. Effectivement, le chef de Station de la CIA répondit instantanément.

— Où en êtes-vous ? lança-t-il anxieusement. Vous avez repéré le « Venus Star » ?

— Nous naviguons de concert, annonça Malko.

— Superbe ! approuva l’Américain.

— Ça, c’est la bonne nouvelle, précisa Malko. La mauvaise c’est que les pirates s’en sont emparés.

Il mit un certain temps, au milieu des vociférations de l’Américain, à expliquer les problèmes de l’hélicoptère et ce qui s’en était suivi.

— C’est une catastrophe, conclut le chef de Station de la CIA. Nous sommes ridiculisés ! Ces enfoirés de « Blackwater » pourraient avoir du bon matériel. Je ne les paierai pas.

Pour le calmer, Malko continua son récit.

— Il y a quelque chose de plus inquiétant, dit-il. Le « Venus Star » a changé de cap, il semble retourner vers le détroit d’Ormuz... L’Américain en resta muet de stupéfaction.

— Qu’est-ce qu’il va faire là-bas ?

— Bonne question ! reconnut Malko. C’est la preuve qu’il ne s’agit pas d’un acte de piraterie ordinaire, mais plutôt d’une action terroriste. Le « Venus Star » est une bombe flottante.

— My God ! explosa l’Américain. Il faut que j’avertisse Langley immédiatement. Donnez-moi le numéro où je peux vous joindre. Nous sommes confrontés à un cas non-conforme...

C’était une litote...

Adam Salad Adam regardait les moutonnements de l’Océan Indien, serein. La joie de réussir son attaque effaçait l’effet du mal de mer. Il s’était installé dans la dunette, d’où il dominait l’immense pont où ses hommes avaient pris position un peu partout. Seul contretemps, un navire les escortait toujours, accompagné d’un hélicoptère sur lequel ils avaient déjà tiré plusieurs rafales pour l’éloigner.

Mais c’était comme une mouche avec un éléphant. Ses hommes veillaient avec leurs lance-roquettes et l’hélico était vulnérable. Ce n’était pas cela qui l’empêcherait de remplir sa mission.

Un homme monta l’échelle et vint murmurer à son oreille.

— Tout le dispositif est en place, annonça-t-il. Nous pouvons provoquer l’explosion du navire en quelques secondes.

— C’est parfait, approuva Adam Salad Adam. Va prier, nous avons encore beaucoup de temps devant nous.

Lui-même se replongea dans une méditation religieuse. Le « Venus Star » filait à 16 nœuds en direction du Golfe Persique.

— Il est hors de question de le laisser pénétrer dans le Golfe Persique, annonça dans le téléphone satellite Mark Roll. Je viens de parler avec Langley qui a alerté la Maison Blanche. C’est un « executive order » du Président. Il faut neutraliser ces pirates.

— Comment ? objecta Malko. Si nous tentons de reprendre le « Venus Star », nous risquons de perdre l’hélico, des hommes et de faire sauter le super-gazier...

Il y eut à l’autre bout du fil un long silence qui lui parut suspect. Il insista :

— Vous m’avez entendu ?

— Parfaitement, répondit l’Américain. Nous sommes en train d’envisager différentes solutions avec la Maison Blanche. Il ne nous reste que quelques heures.

— il n’y a aucun navire de la Ve Flotte dans le coin ?

— Le plus proche, un destroyer, se trouve à huit heures de mer et a une mission à exécuter. Je crains que nous ne soyons livrés à nous-mêmes.

— C’est-à-dire ?

Bref silence. Un ange passa, emporté par les alizés et l’Américain laissa tomber.