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Haughey prit place dans son fauteuil, Skorzeny à côté de Ryan.

Le ministre posa une enveloppe devant Skorzeny. Celui-ci l’ouvrit et en sortit une feuille de papier.

Dans deux jours, à l’aube, vous nous livrerez la somme convenue. Elle sera transportée par un petit bateau à moteur qui jettera l’ancre à la destination ci-dessous…

« Où est-ce ? demanda Skorzeny.

— À huit kilomètres de la côte, répondit Haughey. Au sud de Dublin. »

Il n’y aura que deux personnes à bord : le porteur, Asif Hussein, et le pilote. Ils allumeront une lanterne à la proue et à l’arrière. Ils attendront sur le pont, bien visibles, les mains sur la tête.

S’ils obéissent aux instructions, il ne leur sera fait aucun mal. Sinon, ils seront tués. Les deux hommes auront été informés du danger de l’opération. S’ils respectent les instructions, ils recevront une commission qui sera prélevée sur le chargement.

Dans le cas où nous découvririons quelqu’un d’autre à bord, tout le monde sera tué.

Nous arriverons par l’ouest. Le chargement nous sera transféré sous la surveillance d’autres bateaux en patrouille dans la zone. La moindre insoumission entraînera de graves conséquences.

Le lieutenant Ryan attendra à la cabine téléphonique de l’hôtel Royal Hibernian à trois heures cet après-midi pour confirmer la livraison selon les instructions.

Skorzeny plia la feuille et la remit dans l’enveloppe. « Lieutenant Ryan, vous répondrez que j’accepte toutes leurs conditions, à l’exception de ce dont nous avons discuté : c’est vous qui apporterez l’or, pas Mr. Hussein.

— Et s’ils refusent ?

— Alors ils ne seront pas payés. Vous observerez tout ce qui se passe, combien il y a d’hommes, leur apparence physique, leurs accents. Le type de bateau, son nom, son immatriculation.

— Pourquoi ? demanda Haughey. Une fois que l’or aura été remis, c’est terminé. Vous n’allez pas les prendre en chasse, c’est moi qui vous le dis.

— Bien sûr que non, monsieur le ministre. Mais j’aimerais quand même savoir qui m’a volé. Par curiosité, vous comprenez. »

Haughey le dévisagea longuement. Il leva un doigt. « Si vous faites quoi que ce soit qui dépasse la curiosité, je vous obligerai à quitter ce pays et je vous renverrai en Espagne. »

Skorzeny sourit et inclina respectueusement la tête. « Vous n’avez aucune inquiétude à avoir, monsieur le ministre. »

Haughey soutint son regard, conscient de l’ironie contenue dans le geste. Puis il se tourna vers Ryan.

« Ce plan vous convient, lieutenant Ryan ? »

Ryan ne répondit pas, les yeux fixés sur la fenêtre.

« Eh bien ?

— Oui, monsieur le ministre », dit Ryan.

63

Ryan entra dans la cabine de l’hôtel à trois heures moins trois et s’assit sur le tabouret en cuir. Un morceau de papier plié en quatre était glissé derrière le combiné. Il le prit et lut :

Cabine publique à l’extrémité nord de Kildare Street. Vous avez deux minutes.

Il partit en courant.

Il n’était plus qu’à une dizaine de mètres de la cabine, moitié courant moitié claudiquant, quand le téléphone sonna. Un jeune homme qui fumait non loin alla ouvrir la porte.

« C’est pour moi ! » lança Ryan.

Le jeune homme lâcha la porte et recula.

Ryan entra dans la cabine, prit le combiné et prononça son nom.

« Le colonel Skorzeny accepte nos instructions ? »

La voix de Weiss. Donner le change, avait-il dit. Ryan devait présumer qu’il était surveillé et écouté. Se comporter comme s’il ne connaissait pas son interlocuteur.

« Oui, dit Ryan. Sauf une.

— Laquelle ?

— C’est moi qui apporte l’or.

— Nos instructions doivent être suivies à la lettre. Sans aucune modification.

— J’apporte l’or. Skorzeny l’exige. Sinon la transaction n’a pas lieu. »

Le silence tomba. Puis : « Très bien. Le lieu a été indiqué. Vous savez ce qui arrivera si vous tentez quoi que ce soit. Après- demain, à l’aube. »

La communication fut coupée.

64

Asif Hussein attendait dans un fourgon Citroën gris, phares allumés, devant le terminal de l’aéroport.

« Monsieur Ryan ? » demanda-t-il.

L’Arabe portait un costume bien coupé qui moulait son corps athlétique et une cravate en soie desserrée autour du col ouvert de sa chemise. Il avait les joues et le menton rasés de près, mais une épaisse moustache lui tombait sur la lèvre supérieure.

Hussein se pencha pour ouvrir la portière côté passager. Ryan monta. Il avait pris l’avion sans bagages, Dublin-Londres d’abord, puis Zurich.

Tandis que Ryan s’installait, Hussein tendit le bras et lui palpa le torse et les cuisses.

« Je ne suis pas armé », dit Ryan.

Sans répondre, Hussein termina sa fouille avec un grognement approbateur.

La cabine du fourgon était séparée de l’arrière par une paroi métallique dans laquelle s’ouvrait une porte sur gonds. Ryan distingua deux hommes à la peau basanée accroupis dans la pénombre de l’autre côté. Leurs yeux posés sur lui brillaient dans les reflets du terminal brillamment éclairé.

« Habib et Munir, dit Hussein. Ils nous accompagneront jusqu’à Camaret-sur-Mer. »

Des plaques d’acier avaient été rivetées tout autour du fourgon pour le blinder de l’intérieur. Des fentes découpées dans le métal laissaient passer de minces rais de lumière par les vitres arrière.

Hussein alluma une cigarette qui dégagea une épaisse fumée âcre. Il engagea la première vitesse et démarra.

Protégée par de hauts murs, la Heidegger Bank se dressait aux abords d’un village dissimulé dans les collines qui dominaient le lac de Zurich, à moins de quarante minutes de l’aéroport. Une lourde porte en métal barrait la seule entrée, sous une arche en pierre. Un garde muni d’une torche électrique, pistolet dans un étui accroché à sa hanche, examina la lettre que lui tendit Hussein. Il braqua ensuite le faisceau de sa lampe sur chaque passager du fourgon. Satisfait, il hocha la tête et parla dans une radio.

La porte s’ouvrit. Hussein avança le fourgon sous l’arche et se gara devant le bâtiment, sobre et de plain-pied, qui s’élevait au centre de la propriété. Il se regarda dans le rétroviseur, boutonna son col, ajusta sa cravate. Puis, sortant un peigne de sa poche, il lissa les boucles désordonnées de ses cheveux.

« Venez », dit-il en rangeant le peigne dans sa poche. Et il descendit du fourgon.

Ryan le suivit.

Un homme mince et élégant attendait à l’entrée du bâtiment. Il tendit la main à l’Arabe qui s’approchait.

Hussein la serra. « Monsieur Borringer, excusez-nous d’arriver si tard.

— Monsieur Hussein, c’est un plaisir de vous voir quelle que soit l’heure. » L’homme jeta un regard à Ryan mais ne le salua pas. « Je craignais de ne pas pouvoir rassembler suffisamment d’or à temps, mais j’ai sollicité l’aide d’autres établissements. La famille Heidegger étant hautement respectée dans la profession, mes collègues n’ont pas hésité à m’apporter leur concours. »