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« Ça a une signification, » dis-je.

— « Un rébus ? » demanda Attilla.

— « Plus ou moins. »

— « Fais voir. » Il prit la feuille des mains de Venie.

— « Je ne comprends pas, » dit cette dernière. « Une main tenant une flèche. »

De guerre lasse, j’expliquai : « C’est mon nom. Laflèche. »

— « Pas très brillant, » dit Venie. « Et pourquoi la main ? »

— « Pour faire plus joli. Ça fait comme des armoiries. »

— « Le dessin n’est pas très réussi, mais je trouve que c’est une bonne idée, » intervint Helen.

Riggy reprit le dessin et le regarda de nouveau. « C’est vrai que c’est une bonne idée. Il faudrait faire pareil pour chacun de nos noms. »

Nous essayâmes, tour à tour, sur chaque nom, mais, à chaque fois, le résultat n’était pas fameux. Pour Allen, nous ne voyions vraiment rien. Pour Helen Pack, dont le nom était anglais et que l’on pouvait traduire approximativement par « sac », nous dessinâmes un sac à dos. Pour Szabody, nous ne trouvâmes rien non plus.

« J’en ai trouvé un pour Morlock ! » s’exclama Riggy triomphalement. « En anglais, ça veut dire « plus de boucles. » Et il nous montra un papier couvert de boucles allant dans tous les sens.

Nous ne fûmes guère convaincus, car son dessin était fort confus. Soudain, j’eus une idée. Je dessinai une espèce de troglodyte sortant d’une caverne et le leur montrai.

« Qu’est-ce que c’est ? » demanda Attilla.

— « C’est de nouveau Morlock. »

Venie n’avait pas l’air contente, et Riggy s’empressa de me demander : « Comment vois-tu Morlock là-dedans ? »

— « Ça vient d’un vieux roman de Wells, la Machine à remonter le Temps, dans lequel il y a des monstres souterrains qui s’appellent les Morlocks. »

— « C’est toi qui as inventé cela ! » me dit Venie.

— « Pas du tout ! Tu n’as qu’à lire le livre, comme je l’ai fait à Alfing. Tu demandes un fac-similé, c’est très simple. »

Venie examina de nouveau le dessin. « C’est ça, je lirai le livre. Et je me servirai peut-être de ça ! »

Pour un peu, je lui aurais sauté au cou, car ça n’avait pas été très gentil de penser à ces troglodytes ; si mon nom avait été Morlock, je n’aurais pas apprécié que quelqu’un d’autre fasse le rapprochement. Cela prouvait une certaine… objectivité ; non, un certain détachement que je n’aurais pas cru trouver chez elle.

« Tiens, voilà Jim ! » s’exclama Attilla juste à ce moment.

Et, en effet, Jimmy Dentremont arrivait en se faufilant entre les tables. Il prit une chaise au passage et s’installa à côté de moi.

« Où étais-tu ? » demanda Helen, exprimant ce que nous pensions tous.

Helen est une fille assez surprenante. Elle est blonde avec des yeux orientaux plissés – une combinaison plutôt étonnante.

Jimmy ne daigna pas répondre.

« Qu’est-ce que c’est que ces petits dessins ? » demanda-t-il.

Nous le lui expliquâmes.

« Ah bon ! Pour moi, ce sera facile. »

Il prit un crayon et dessina deux montagnes entre lesquelles il esquissa un petit bonhomme.

« Et voilà, Dentremont : entre les montagnes ! »

C’était en effet assez convaincant. Quand tout le monde eut regardé, Jimmy s’éclaircit la gorge : « Mia, tu te souviens du pari que nous avions fait ? »

— « Sur la possibilité de vivre une aventure ? »

— « C’est cela. Eh bien, j’en ai trouvé une. Voilà ce que je faisais ces derniers temps ! »

Helen demanda immédiatement de quoi il s’agissait, et Jimmy le lui expliqua. Ensuite, Riggy voulut savoir sur quoi portait le pari.

Jimmy me lança un regard interrogateur avant de lui répondre : « À vrai dire, nous ne l’avions pas fixé. Dans mon esprit, c’était surtout que, si je trouvais une aventure, Mia devrait m’accompagner. »

Tous me regardèrent.

« Soit, » dis-je. « Ça me paraît juste. »

— « Parfait, » dit Jimmy. « Voilà de quoi il s’agit : nous allons sortir du Vaisseau – aller à l’extérieur du Vaisseau. »

— « Mais ce doit être dangereux ! » s’exclama Helen.

— « C’est une aventure ! » rétorqua Jimmy. « Et toute vraie aventure contient un élément de danger ! »

— « Est-ce dangereux, dehors ? » demandai-je.

— « Je n’en sais rien, » admit Jimmy. « Je ne sais pas à quoi ça ressemble, dehors. J’ai essayé de me renseigner, mais je n’y suis pas parvenu. Le découvrir fait précisément partie de l’aventure. Mais ce n’est pas tout. Il nous faut des combinaisons et trouver un moyen pour sortir. Ce ne sera pas facile ! »

— « Je veux venir aussi, » intervint Riggy.

Jimmy secoua la tête.

« Non, rien que Mia et moi. Mais nous aurons besoin d’aide ; si vous voulez nous aider, vous êtes les bienvenus. »

Après s’être consultés du regard, nos copains annoncèrent tous qu’ils étaient d’accord. Nous formions un groupe, après tout, et l’occasion de faire quelque chose d’intéressant était trop tentante.

Précédés par Jimmy, nous suivions un passage du Premier Niveau. C’est très excitant de faire partie d’un groupe qui poursuit un but, même si c’est mélodramatique, même si c’est à quatre-vingt-dix pour cent du bluff. Cela me plaisait énormément, et aux autres aussi.

J’étais tellement dans mon rôle que je devais toujours me retenir de jeter des coups d’œil derrière moi pour voir si nous étions suivis.

« C’est ici, » dit Jimmy. « Devant nous à gauche. »

En descendant quelques marches, on arrivait à une petite rotonde sur laquelle donnait une unique porte de couleur noire, sans ornement ni inscription. C’est une chose très rare sur le Vaisseau, où tout le monde s’efforce de rendre son cadre de vie coloré, gai et personnel. Une porte aussi nue et rébarbative ne pouvait que décourager les passants d’entrer.

« Le sas communiquant avec l’extérieur se trouve dans la pièce sur laquelle donne cette porte, » nous expliqua Jimmy.

Il n’y avait ni bouton, ni poignée, ni verrou, ni serrure visible, rien qu’un petit trou destiné à introduire une clef électronique émettant un signal de fréquence particulière qui commandait l’ouverture de la porte.

Attilla et Jimmy s’y connaissaient un peu en électronique, et ils examinèrent soigneusement la porte.

« Cette serrure est purement symbolique, » dit Attilla au bout d’un moment.

Nous le regardâmes d’un air interrogateur.

« C’est pourtant simple. Cette serrure sert simplement à maintenir la porte fermée et à rappeler aux gens qu’elle doit le demeurer, mais elle n’est pas réellement efficace. Je suis certain que je pourrai l’ouvrir au bout d’un ou deux essais. »

— « Bien ! En tout cas, es-tu sûr que tu pourras l’ouvrir d’ici samedi prochain ? » demanda Jimmy.

— « Absolument ! »

— « Parfait ! Alors, fixons le départ pour ce jour-là. Helen ? Tu fais équipe avec Attilla. Tu feras le guet pendant qu’il bricolera la porte. S’il se faisait prendre, tout serait fichu. » Puis, il se tourna vers moi et les deux autres. « Allez, venez ! Nous allons essayer de trouver des combinaisons. »

— « J’aimerais venir aussi, » dit Helen. « Je vais tout rater ! »

Un fait intéressant me frappa. Jimmy était le plus petit de nous tous, et pourtant il n’avait aucun mal à dominer le groupe. Ce doit être vrai ce qu’on dit sur la disposition naturelle au commandement.