Выбрать главу

Don pénétra dans l’enceinte du cimetière – encore un anachronisme – et gara le monospace le plus près possible de la tombe de Sarah. Les garçons remirent leurs masques filtrants et toute la petite famille fit le reste du chemin à pied en soulevant les feuilles mortes sous ses pas.

Don avait apporté un bouquet virtuel alimenté par une pile à fusion froide, un hologramme de roses rouges qui tiendraient presque éternellement. Ses enfants, qui en temps normal étaient plutôt turbulents, comprirent qu’il avait besoin d’un moment de calme, et ils le lui accordèrent. Parfois, lorsqu’il venait ici, il se trouvait submergé par les souvenirs : des scènes du temps où Sarah et lui sortaient ensemble, des événements des premiers temps de leur mariage, des moments passés avec Carl et Emily enfants, l’agitation et le brouhaha lorsque Sarah avait décrypté le premier message… Mais cette fois-ci, tout ce qui lui revint à l’esprit fut ce jour où ils avaient fêté leur soixantième anniversaire de mariage, il y avait vingt ans de cela. Il s’était agenouillé exactement comme il le faisait maintenant pour déposer les fleurs. Sarah continuait de lui manquer, chaque jour de sa vie.

Il se releva et contempla simplement la pierre tombale un long moment, puis il lut à voix haute l’inscription qui y était gravée. Il regarda ensuite la partie restée vide. L’épitaphe qu’il avait prévue pour lui-même – « On ne l’a jamais vu coincé avec un K dans son jeu » – n’était pas aussi belle que celle de Sarah, mais elle ferait l’affaire.

Il finit par jeter un coup d’œil à Lenore en se demandant ce qu’elle pensait du fait que c’était là qu’il reposerait un jour, et non à côté d’elle. Lenore, dont les taches de rousseur s’étaient estompées avec les années, et qui avait maintenant de fines rides sur le visage, devait avoir lu dans ses pensées, car elle lui tapota le bras en disant :

— Ça n’est pas un problème, mon chéri. De toute façon, plus personne de ma génération ne se fait enterrer. Puisque tu as payé pour, autant t’en servir… un jour.

Un jour. Au vingt-deuxième siècle, ou peut-être au vingt-troisième, ou…

L’âge des miracles et des merveilles. Il secoua la tête et se tourna vers ses enfants. Gillian n’avait pas vraiment de lien défini avec Sarah : c’était simplement la première épouse de son père, une femme qui était morte des années avant qu’elle ne naisse, et avec qui elle n’avait aucun ADN en commun – ce qui d’ailleurs n’aurait eu aucune importance pour Sarah. Mais voilà, la société n’avait pas de nom particulier pour cette relation familiale.

Il n’y avait pas non plus de nom spécial pour ce que Sarah représentait vis-à-vis des deux garçons, mais sans elle, ils n’existeraient pas. D’un air songeur, Amphion regardait les quatre noms gravés sur la tombe – « Sarah Donna Enright Halifax » – et devait penser à la même chose, car il demanda :

— Comment devrais-je l’appeler ?

Don réfléchit un instant. « Maman » ne pouvait convenir – c’était Lenore, leur mère. « Professeur Halifax » faisait un peu trop solennel. « Mrs Halifax » était encore disponible puisque Lenore, comme la plupart des femmes de sa génération, avait conservé son nom de jeune fille. « Sarah » avait une connotation plus intime, mais ne sonnait pas juste non plus. Il secoua la tête en disant :

— Je ne…

— Tante Sarah, dit Lenore qui l’avait toujours appelée « Professeur Halifax » autrefois. Je crois que vous devriez en parler comme étant « Tante Sarah ».

Les Dracons étaient incapables de hocher la tête, et Amphion esquissa la petite révérence qu’il avait adoptée comme équivalent.

— Merci de nous avoir emmenés voir Tante Sarah, dit-il.

Il avait un œil tourné vers Don tandis que les trois autres regardaient la stèle.

— Elle aurait vraiment aimé vous rencontrer, dit Don en souriant tour à tour à chacun de ses trois enfants.

— J’aurais bien aimé la connaître, dit Zéthos.

— Et moi aussi, dit Gillian d’une voix douce en inclinant la tête.

— C’était une femme merveilleuse, dit Don.

Gillian se tourna vers sa mère.

— Toi aussi, tu as dû la connaître, maman. Vous faisiez de la recherche dans le même domaine. Comment était-elle ?

Lenore regarda Don, puis de nouveau sa fille. Elle chercha le qualificatif approprié, et au bout d’un moment, avec un grand sourire pour son mari, elle répondit :

— Astrotop.

Glossaire de différents sigles, acronymes, termes et références figurant dans le roman

ALLEN : il s’agit ici de l’Allen Telescope Array, « Réseau de télescopes Allen », appelé ATA. C’est un radiotélescope interféromètre installé sur le site de l’Observatoire radio de Hat Creek au Lassen Volcanic National Park, dans le comté de Shasta, au nord de la Californie (États-Unis).

AS IT HAPPENS : « Au moment où ça se passe ». Émission diffusée par CBC Radio One, consistant en interviews de personnalités sur des sujets d’actualité.

BLUE JAYS : équipe de base-ball canadienne créée en 1977. Elle joue au Rogers Centre (anciennement appelé SkyDome, le « dôme du ciel »), stade principal de la ville de Toronto situé près du lac Ontario. Elle a gagné la World Series en 1992 et 1993.

CBC (Canadian Broadcasting Corporation) « Société de radiodiffusion canadienne » : regroupe les chaînes publiques de radio et de télévision canadiennes. Les Canadiens francophones parlent de SRC (Société Radio-Canada).

CFH : « Canada-France-Hawaii ». Observatoire situé au sommet du volcan Mauna Kea, à 4 200 m d’altitude sur la grande île de Hawaii (États-Unis). Il possède un télescope de 3,6 mètres de diamètre qui était, à l’époque de sa construction (1979), un des plus grands du monde. Aujourd’hui, la nouvelle génération de très grands télescopes est équipée de miroirs atteignant 8 à 10 mètres de diamètre.

CHEZ HÉLÈNE : émission télévisée pour enfants produite par la CBC de 1959 à 1973. Cette émission en français était également diffusée sur la chaîne des Canadiens anglophones pour les familiariser avec la langue des Acadiens.

CHRÉTIEN (JOSEPH JACQUES JEAN) : né en 1934, membre du Parti libéral, il fut Premier ministre du Canada de 1993 à 2003.

DUBOIS (BLANCHE) : un des deux personnages féminins de la pièce de Tennessee Williams, Un tramway nommé Désir (1947). Elle finit par sombrer dans la folie. Le personnage est interprété par Vivien Leigh dans le film qu’en a tiré Elia Kazan en 1951, et qui a révélé Marlon Brando dans le rôle de Stanley Kowalski.

FASTER THAN LIGHT : « Plus vite que la lumière ». Programme radio de la CBC consistant en une série d’épisodes consacrés à la science-fiction, sous la direction de Robert J. Sawyer lui-même…

ESPN(Entertainment Sport Programming Network) « Réseau de programmation de sport de divertissement » : réseau de télévision consacré au sport, diffusé dans le monde entier. Rien qu’aux États-Unis, cette chaîne est regardée par 88 millions de foyers.

FCC (Federal Communications Commission) « Commission fédérale des communications » : organisme américain chargé de certifier et de valider tous les équipement de transmission électromagnétique destinés à la vente aux États-Unis.