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— « Et… est-ce que cela a un effet quelconque sur tes préférences ? Je veux parler de ton désir de l’…»

Elle me sourit de tout cœur : « Qu’est-ce que toi, tu en penses ? » Et elle ajouta sérieusement : « La seule et unique chose qui affecte ma libido… qui l’empire, je veux dire, c’est… ce sont… – que la grammaire anglaise est donc compliquée ! – c’est-sont ces maudites imprégnations. Quelquefois en bien, quelquefois en mal… et tu dois te rappeler cette femme, dont il n’est pas nécessaire de dire le nom, et qui m’a donné des envies tellement carnivores que je n’ai pas osé m’approcher de toi jusqu’au moment où j’ai pu exorciser son âme sinistre ! Une nouvelle imprégnation affecte tout aussi bien mon jugement, et c’est pourquoi je ne veux jamais étudier une affaire avant d’avoir digéré la dernière imprégnation. Je serai contente quand j’en aurai terminé ! »

— « Et moi donc ! »

— « Pas autant que moi ! Cependant, à part ça, mon chéri, je ne suis pas très différente des autres femelles, et tu le sais bien. Il n’y a que mon tempérament un peu paillard, j’aime dévorer les jeunes hommes pour mon petit déjeuner, et les séduire en sautant par-dessus les épées. »

— « Combien d’épées ? »

Elle me jeta un regard perçant. « Depuis que mon premier mari m’a rejetée, je ne me suis jamais mariée, jusqu’au jour où je t’ai épousé, toi, Mr. Gordon. Si ce n’est pas ce que tu as voulu dire, je ne pense pas que tu doives me reprocher ces choses qui se sont passées avant ta naissance. Si tu veux des détails sur cette période, je satisferai ta curiosité. Ta curiosité morbide, si je puis me permettre cette expression. »

— « Tu vas te vanter. Paillarde, je ne marche pas. »

— « Je ne veux pas me vanter ! J’ai si peu de raisons de le faire. La Crise de l’Œuf ne m’a presque pas laissé le temps d’être une femme, par l’enfer ! Jusqu’à ce qu’Oscar le Coq veuille bien venir. Merci, monsieur. »

— « Si tu pouvais seulement parler un peu mieux. »

— « Oui, monsieur. Joli coq ! Mais tout cela nous a emmenés bien loin de nos moutons, mon chéri. Si tu veux des enfants… mais oui, mon chéri ! Il me reste environ deux cent trente œufs et ceux-là ils m’appartiennent bien. Ils ne sont pas réservés à la postérité. Ils ne sont pas pour nos chers sujets, bénis soient leurs petits cœurs avides. Ils ne sont pas pour ces manipulateurs génétiques qui s’amusent à jouer au Bon Dieu. Ils sont à Moi ! C’est même tout ce que je possède. Tout le reste, c’est ès qualités, mais ceux-là, ils sont bien à moi… et si tu les veux, ils sont aussi à toi, mon seul amour. »

J’aurais dû lui dire « Oui ! » et l’embrasser. Au lieu de cela, j’ai dit : « Tu sais, il n’y a pas de péril en la demeure ! »

Son visage s’allongea : « Comme voudra le seigneur héros mon mari. »

— « Tu vois, ce n’est pas la peine de prendre les coutumes de Névia, elles sont trop protocolaires. Ce que je veux dire, c’est qu’il me faut le temps de m’habituer aux seringues et à toutes ces choses que j’imagine ; se faire tripoter par des techniciens ! Sans compter que je comprends parfaitement que tu n’as pas le temps d’avoir un bébé toi-même…»

Ce que j’essayais de dire c’était que, depuis que je ne croyais plus aux bébés qui naissent dans les choux, j’avais toujours été partisan de la méthode normale et que l’insémination artificielle m’avait toujours paru un procédé assez sale, même pour une vache, et que cette entreprise, où les deux parties sont sous-traitées, me faisait penser à la pièce de monnaie que l’on glisse dans un distributeur automatique, ou à une commande par correspondance. Il fallait me donner le temps ; je pourrais peut-être m’y faire. Exactement comme elle-même avait dû s’accoutumer à ces damnées imprégnations…

Elle me prit par la main. « Mais, mon chéri, ce n’est pas nécessaire ! »

— « Qu’est-ce qui n’est pas nécessaire ? »

— « De se faire tripoter par les techniciens. Et je veux prendre le temps d’avoir un enfant. Si, du moins, tu ne vois pas d’inconvénient à voir mon corps grossir et se déformer, – si, c’est comme cela que ça se passe, je m’en souviens, – je serais très heureuse de le faire. Tout se passera comme pour les autres personnes, en ce qui nous concerne. Pas de seringue, pas de techniciens. Rien qui puisse blesser ton amour-propre. Oh, il faudra bien que l’on travaille sur moi. Cependant, tu sais, j’ai l’habitude d’être pomponnée comme une vache au concours agricole, et cela ne me sera pas plus pénible que de me faire laver les cheveux. »

— « Star, tu accepterais donc neuf mois de gêne, – et même le risque de mourir en accouchant, – pour m’épargner quelques instants de désagrément ? »

— « Je ne mourrai pas. J’ai eu trois enfants, ne te rappelles-tu pas ? Et j’ai eu des accouchements faciles, sans aucun ennui. »

— « Mais, comme tu me l’as fait remarquer, cela se passait il y a bien longtemps. »

— « Cela ne change rien. »

— « Euh… Il y a combien de temps ? » (Quel âge as-tu, ma femme ? – la question que je n’avais jamais osé poser.)

Elle parut surprise. « Est-ce que cela a de l’importance, Oscar ? »

— « Je ne pense pas. Tu en sais plus que moi sur les problèmes médicaux…»

— « Tu me demandais quel âge j’ai, n’est-ce pas ? » dit-elle lentement.

Je ne répondis rien. Elle attendit, puis continua : « Une vieille rengaine de ton pays prétend qu’une femme a l’âge qu’elle ressent. Et je me sens jeune, et je suis jeune, et je veux profiter de la vie, et je peux porter un enfant, – ou de nombreux enfants, – dans mon propre ventre. Je sais bien, oh combien ! que ce qui t’ennuie ce n’est pas seulement que je sois trop riche et que j’occupe une situation qui n’est pas agréable pour un mari. Oui, je ne le sais que trop ; mon premier mari m’a rejetée pour la même raison. Mais il avait le même âge que moi, lui. La chose la plus cruelle et la plus injuste que j’ai faite, c’est que je savais parfaitement que mon âge pouvait avoir de l’importance pour toi, – et j’ai passé outre. C’est pour cela que Rufo était tellement furieux. Après que tu te sois endormi, dans la caverne de la Forêt des Dragons, il me l’a dit, sans mâcher ses mots. Il m’a dit qu’il savait bien que j’aimais séduire les jeunes hommes mais qu’il n’aurait jamais cru que je tomberais si bas, que j’essaierais de me faire épouser par l’un d’eux sans l’avertir auparavant. Il n’avait jamais eu une très grande opinion de sa vieille grand-mère, m’a-t-il dit, mais cette fois…»

— « Tais-toi, Star ! »

— « Oui, seigneur. »

— « Cela ne fait pas la moindre différence ! » Et je dis cela avec tant de force que je le crus… et je le crois encore maintenant. « Rufo ne sait pas ce que je pense. Tu es plus fraîche que l’aurore de demain, et tu le seras toujours. C’est la dernière fois que j’accepte d’en entendre parler ! »

— « Oui, seigneur. »

— « Et supprime aussi cela ; dis simplement : Très bien, Oscar. »

— « Oui, Oscar ! Très bien. »

— « C’est mieux. À moins que tu ne veuilles une autre fessée. Et je suis trop fatigué. » J’ai alors changé de sujet de conversation. « À propos du reste… il n’y a aucune raison pour que tu fasses modifier ton joli ventre s’il y a d’autres méthodes. Je ne suis qu’un rustaud, c’est tout ; je n’ai pas les habitudes des grandes villes. Quand tu as suggéré de le faire toi-même, voulais-tu dire que l’on pourrait te faire redevenir comme avant ? »