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Andrew sourit et embrassa sa femme.

Olivia Stern s'approcha d'eux.

– C'était une belle cérémonie et vous êtes très beaux tous les deux. Votre robe vous va à merveille, quant à Andrew, je ne l'avais encore jamais vu en costume. Vous devriez en porter plus souvent. Je peux vous emprunter votre mari quelques minutes ? demanda Olivia en s'adressant à Valérie.

Valérie la salua et rejoignit ses parents qui marchaient devant eux.

– Votre papier est remarquable, Andrew. Je ne vais pas vous embêter le jour de votre mariage, vous ne m'en voudrez pas de vous fausser compagnie, c'est pour la bonne cause. Je vous enverrai mes annotations dans la nuit. Pardon de vous obliger à travailler dès le lendemain de vos noces, mais j'ai besoin que vous m'écriviez quelques feuillets de plus. Je vous publie mardi, j'ai obtenu la une et trois pages dans le journal, c'est la gloire, mon vieux ! dit Olivia en lui tapotant l'épaule.

– Vous ne voulez plus retarder la publication d'une semaine ? demanda Andrew hébété.

– Pourquoi retarder un article qui fera pâlir de jalousie nos concurrents ? Vous avez fait un travail épatant, à lundi et amusez-vous bien ce soir.

Olivia l'embrassa sur la joue et salua Valérie en s'en allant.

– Elle avait l'air très satisfait, c'est la première fois que je te vois sourire de la journée. Tu vas enfin pouvoir te détendre.

Valérie était heureuse, Andrew se sentait bien, divinement bien jusqu'à ce qu'en arrivant sur Hudson Street, il aperçoive un 4 × 4 noir arrêté au feu rouge. Sa gorge se noua.

– Tu fais une tête ? dit Simon en s'approchant de lui, tu as vu un fantôme ?

Le feu passa au vert et le 4 × 4 s'éloigna, fenêtres fermées.

– J'ai fait un bon de deux semaines en avant, Simon.

– Tu as fait quoi ?

– Elles se sont volatilisées... Je me trouvais chez Zanetti, il lui est arrivé la même chose qu'à moi. Il savait tout de mon histoire. Je ne sais pas ce qui s'est passé, c'était un cauchemar et, quand je me suis réveillé, je me suis retrouvé quinze jours plus tard. J'ai refait un saut dans le temps, mais dans le futur cette fois. Je ne comprends plus rien à rien.

– Si ça peut te rassurer, moi non plus. Ce que tu dis n'a aucun sens. De quoi tu parles, Andrew ? demanda Simon en regardant son ami, l'air sincèrement inquiet.

– De ce qui m'attend, de nous deux, de Pilguez, de Mme Capetta, je n'ai plus que huit jours, je suis terrorisé.

– Qui sont ce Pilguez et cette Mme Capetta ? demanda Simon de plus en plus intrigué.

Andrew observa Simon longuement et soupira.

– Mon Dieu ! Je vous ai perdus toi et Pilguez en faisant ce saut dans le temps. Tu n'as pas la moindre idée de ce dont je te parle, n'est-ce pas ?

Simon hocha la tête et prit Andrew par les épaules.

– Je savais que le mariage provoquait des effets secondaires, mais là je dois dire que tu y vas fort !

Valérie les rejoignit, elle prit son mari par la taille et s'adressa à Simon.

– Tu ne m'en voudras pas si je le garde pour moi le jour de mon mariage, mon Simon ?

– Garde-le toute la semaine, jusqu'à la fin de l'été si tu veux, mais rends-le-moi en forme parce que là, il débloque complètement.

Valérie emmena Andrew à l'écart.

– Je voudrais que la journée soit derrière nous pour me retrouver seul avec toi à la maison, soupira Andrew.

– Tu m'ôtes les mots de la bouche, lui répondit Valérie.

*

Ils passèrent leur dimanche dans l'appartement de Valérie. Il pleuvait à verse, l'un de ces orages d'été qui détrempent la ville.

Après le déjeuner, Andrew s'était plongé dans la réécriture de son article. Valérie en profitait pour ranger ses papiers. En fin d'après-midi, ils sortirent faire quelques pas jusqu'à l'épicerie du quartier, marchant blottis l'un contre l'autre sous leur parapluie.

– Ce n'est pas mal aussi l'East Village, dit Andrew en regardant autour de lui.

– Tu changerais de quartier ?

– Je n'ai pas dit ça, mais si tu entendais parler d'un joli trois pièces, je ne serais pas contre l'idée de le visiter.

De retour à l'appartement, Andrew se remit au travail et Valérie à sa lecture.

– Ce n'est pas terrible comme voyage de noces, lui dit-il en relevant la tête. Tu mérites mieux que moi.

– Question de point de vue... Mais tu es l'homme de ma vie.

Andrew mit un point final à son article alors que le jour se couchait. Il était 21 heures passées. Valérie le relut et c'est elle qui appuya sur la touche « envoi » du clavier de l'ordinateur.

Andrew regroupait ses feuilles de brouillon quand Valérie les lui prit des mains.

– Va te reposer sur le canapé, et laisse-moi ranger ce dossier.

Andrew accepta de bon cœur, son dos le faisait souffrir et l'idée de s'allonger un instant n'était pas pour lui déplaire.

– Qui est Marisa ? demanda Valérie au bout de quelques instants.

– Mon contact à Buenos Aires, pourquoi ?

– Parce que je viens de trouver une petite enveloppe avec un mot rédigé à ton attention.

Andrew retint son souffle. Valérie lui en fit la lecture.

Pour toi Andrew,

ce cadeau emprunté chez Louisa.

En souvenir d'Isabel et Rafaël.

Merci pour eux.

Marisa

Andrew bondit du canapé et arracha l'enveloppe des mains de Valérie. Il l'ouvrit et découvrit une petite photo en noir et blanc. Deux visages souriaient, figés dans la pâleur du temps.

– Ce sont eux ? demanda Valérie.

– Oui, ce sont eux, Isabel et Rafaël, répondit Andrew ému.

– C'est étrange, dit Valérie, je ne sais pas si c'est de connaître leur histoire, ou d'avoir lu ton article, mais le visage de cette femme me semble familier.

Andrew se rapprocha de la photographie pour l'observer attentivement.

– Mon article n'a rien à voir avec ça, répondit-il stupéfait. Moi aussi je connais ce visage et bien mieux que tu ne l'imagines.

– Qu'est-ce que tu veux dire ? demanda Valérie.

– Que j'avais pensé à tout, sauf à ça et que je suis vraiment le dernier des imbéciles.

*

Avant de franchir les portes du 860, Huitième Avenue, Andrew jeta un regard à l'inscription noire qui orne la façade du New York Times. Il traversa le hall, le pas pressé, emprunta l'ascenseur et se rendit directement dans le bureau de sa rédactrice en chef.

Andrew s'installa dans le fauteuil en face d'elle sans attendre d'y avoir été invité.

Olivia le regarda, intriguée.

– Vous avez lu la fin de mon article ?

– C'est exactement ce que j'attendais de vous. J'ai envoyé le texte à la maquette et, à moins qu'un événement majeur ne se produise dans la journée, nous ouvrons en une dans l'édition de demain.

Andrew rapprocha son fauteuil du bureau.

– Vous saviez que tout près de l'endroit où vit Ortiz un village porte votre prénom ? C'est amusant, non, de savoir qu'un bled s'appelle Olivia ?

– Si vous le dites.

– Non, ça n'a pas l'air de vous amuser plus que cela. Peut-être que s'il s'était appelé « María Luz » vous auriez trouvé la chose plus drôle... un village qui se serait vraiment appelé comme vous.

Andrew prit la petite enveloppe dans sa poche, en sortit la photographie qu'elle contenait et la posa devant sa rédactrice en chef. Elle la regarda longuement et la reposa sans rien dire.

– Vous reconnaissez ce couple ? demanda Andrew.

– Je sais qui ils sont, mais je ne les ai jamais connus, soupira Olivia.

– Cette femme sur la photo vous ressemble tellement que j'ai cru un instant que c'était vous, perdue au milieu des années soixante-dix. Vous savez, depuis le jour où Louisa est venue vous dévoiler votre véritable identité, n'est-ce pas María Luz ?