Les diamants (du grec «adamant», qui veut dire inebranlable, tres solide) sont connus depuis l'Antiquite. C'est ainsi que Pline l'Ancien (Ier s. de notre ere) mentionne plusieurs fois dans ses ecrits la volonte des hommes, aussi vieille que tenace, de forcer ces etonnants cristaux a percer et a couper les materiaux les plus durs. Les diamants etaient veneres comme «Pierres des Rois» et estimes plus que tout autre tresor. Mais on les trouvait tres difficilement et rares etaient les souverains qui en possedaient.
Tout cela faisait se multiplier les legendes a leur sujet. On attribuait a ces pierres d'extraordinaires facultes magiques. Cette croyance s' est maintenue plusieurs siecles.
En Russie notamment, les diamants etaient l'objet d'une veneration seculaire.
On pensait qu'ils transmettaient force et courage.
Au XVIIе siecle ils prennent une large place dans la joaillerie russe. Dans les annees 80 de ce siecle notamment, les ateliers du Kremlin de Moscou fabriquent pour les tsars Ivan et Pierre deux couronnes de diamants d'un eclat magnifique.
De nos jours les joailliers sont passes mattres dans l'art de tailler les diamants pour les transformer en brillants et mettre ainsi en valeur leur eau, leur eclat et leur jeu. Apres la taille, le prix du dimant brut (deja tres cher par ailleurs) augmente enormement.
Au XVIIIе siecle, epoque qui a marque l'apogee des monarchies absolues, le role des diamants et l'attention qu'on leur porte sont encore accrus. C'est d'apres le nombre et la valeur des brillants qui se trouvaient sur les attributs du pouvoir, qu'on jugeait la grandeur et la richesse des pays. Les principaux attributs du pouvoir monarchique, qu'il fallait obligatoirement porter au cours des receptions et autres ceremonies, etaient le Globe, le Sceptre et la Couronne.
Chaque maison regnante cherchait a eclipser ses rivales par le luxe de ses attributs. Aussi comprend-on que les empereurs de Russie aient fait tout leur possible pour rendre le Tresor de la Couronne le plus riche du monde. lis s'enrichissaient done constamment de pieces d'un faste extraordinaire et toutes constellees de pierreries.
L'enorme valeur materielle et la signification politique de ces objets qui symbolisaient le Pouvoir, faisaient qu'on prenait soin a les conserver. Un Oukaz de Pierre le Grand stipulait a ce propos que «… ces objets seront conserves a la Tresorerie imperiale, dans un coffre ferme par trois cadenas, dont les cles seront confiees, la premiere au Chancelier du Tresor, la seconde a un Conseiller de la Tresorerie, et la troisieme a l'lntendant superieur du Tsar, et que les jours de grandes solennites a la Cour, ledit Chancelier, assiste de deux Conseillers a la Chambre sera charge de se rendre au Tresor, d'ouvrir le coffre, d'en tirer les attributs du Tsar, et de les faire porter par les deux conseillers a la Cour. La reception achevee, ces objets seront ramenes au Tresor et renfermes dans leur coffre…».
En plus des attributs du pouvoir imperial, le Tresor du Palais comprenait des pierres precieuses et des articles de joaillerie particulierement rares et de grande valeur.
Suite a l'expansion au XVIIIе siecle de 1'industrie miniere dans l'Oural, 1'interet porte aux pierreries russes s'accroit. De superbes echantillons.de pierres precieuses et fines, scintillant de toutes les couleurs de Гагс-en-ciel, furent apportes a la Cour, pour у entrer dans le Tresor imperial ou bien orner les habits de ceremonie, les even tails, les tabatieres et les Cannes, et resplendir sur les manches des epees et les plaques de decoration. Deux joailliers celebres, Posier et Duval, travaillaient alors a la Cour. Nombre de leurs ouvrages, qui emerveillaient les contemporains par leur elegance et leur grace, sont gardes jusqu'a present dans les collections du Fonds diamantaire de l'URSS. Posier, notamment, crea la plus riche couronne jamais portee par des monarques europeens. Pour l'executer il a utilise des plus belles pierres et pedes du Tresor imperial.
Pendant un siecle et demi a peu pres, cette couronne fut le symbole du pouvoir supreme en Russie.
A diverses epoques, des specimens rarissimes, voire uniques, de pierres precieuses vinrent completer le Tresor imperial. Plusieurs de ces pierres sont exposees. Parmi elles, signalons le splendide solitaire «L'Orloff» comme on a baptise le gros diamant incruste dans le sceptre des Tsars, joyau d'une beaute envoutante, ainsi que le spinelle sang-de-bceuf de la Couronne imperiale, qui emerveille par la profondeur de son coloris. Une autre pierre unique en son genre est le «Schah», diamant d'une renommee mondiale, qui fut apporte a Petersbourg en 1829, par le prince-heritier de Perse Hosrev-Mirza pour «racheter» le meurtre de l'ambassadeur de Russie a Teheran (l'ambassdeur en question etait le celebre ecrivain Griboiedov). Une autre piece extraordinaire est l'enorme diamant plat a table de 4X2,9 cm, idealement poli et limpide, monte dans un bracelet de style gothique. Le grand saphir cingalais, entoure d'une aureole de brillants, frappe par son bleu a la fois profond et transparent. Cette piece est sans pareille dans le monde, de meme d'ailleurs que la grosse emeraude rectangulaire d'un vert tres fonce, pur et translucide, qui constitue egalement l'orgueil du Fonds. Remarquable est aussi l'enorme chrysolithe vert-olive (192 carats 60), lisse et transparente comme de l'eau de roche. Et ce n'est pas tout: le Foods diamantaire de l'URSS possede encore une quantite de pierres d'un eclat et d'une beaute saisissante.
L'Exposition presente plusieurs echantillons de la premiere decoration russe en date et en importance a savoir les Etoiles et Croix de Saint-Andre. Cet Ordre, fonde par Pierre le Grand, portait le nora de Saint-Andre, l'un des patrons de la Russie.
Immediatement apres la victoire de la Revolution, le Gouvemement sovietique prit les mesures necessaires pour sauvegarder les joyaux historiques. Pour mettre a jour et recenser les reserves de pierreries, d'or et d'autres metaux precieux existant dans le pays, et- les preserver de toute surprise, le Conseil des Commissaires du Peuple adopta le 3 fevrier 1920 un arrete qui instituait a Moscou, aupres du Commissariat du Peuple aux Finances, un Fonds national de Protection des Valeurs de la RSFSR (GOKHRAN). Lenine signa de sa propre main ce document et appela tous les citoyens a veiller a ces tresors qu'il considerait comme propriete du peuple. II aida energiquement a creer le Gokhran et s'est toujours interesse" a son travail. Des le debut de l'annee 1922, les Joyaux de la Couronne se trouvaient tous au Gokhran. C'est a cette epoque qu'on entreprit d'etudier ces tresors historiques. Cette tache a ete confiee a un groupe d'experts dirige par le plus eminent mineralogiste sovietique, l'academicien A. Fersman. Parmi les joailliers qui faisaient partie de ce groupe citons A. Faberge, A. Kotler, B. Masseev et l'expert attitre du Gokhran N. Dmitriev. Le directeur du Musee de l'Ermitage, S. Tro'i'nitski, et le Conservateur du Palais des Armures D. Ivanov etaient charges de l'expertise artistique des pieces.
En 1922, la collection nouvellement reunie recut le nora de «Fonds diamantaire de la RSFSR» et, depuis 1924, apres la constitution de Г Union des Republiques Socialistes Sovietiques, elle fut appelee «Le Fonds diamantaire de l'URSS».
Consecutivement au progres industriel et scientifique du XXе siecle, les diamants virent s'ouvrir devant eux de nouvelles utilisations. Leur durete extraordinaire les a rendus irremplagables pour resoudre aombre des problemes techniques particulierement compliques. En fin de compte, ils sont devenus en quelque sorte le symbole du progres technique, un puissant agent d'amelioration de la productivite.
L'essor de la plupart des branches de Г Industrie moderne et, plus particulierement, du travail des metaux, des mines, des constructions mecaniques et de la mecanique de precision, est impensable sans l'utilisation d'outils diamantes. C'est ce qui explique pour beaucoup le desir de toutes les puissances, industriel-lement developpees d'accroitre a tout prix leurs reserves diamantaires. A une certaine epoque les diamants se trouverent dans les listes des matieres «strategiques», dont l'exportation en URSS etait interdite. Ce n'etait qu'une nouvelle tentative de freiner le progres technique de notre pays, en у faisant regner la disette diamantaire. Comme toutes les autres d'ailleurs, cette tentative des trusts imperialistes pour ralentir l'essor economique de notre pays s'est solde par un echec.