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Dans la fumée, les feux, s’allumant, flamboient.

Tu es fillette aux yeux calmes et au cœur tendre;

Assise sur le sable, vois-tu ton déstin,

Sais-tu que ce bébé endormi tenant ton tétin

Ce soir-là, peux-tu le comprendre,

Est ce Mogol que la terre n'oublie jamais?

Que moi aussi, Mère, est-ce que tu sais

Que, sans paradis, je lui chanterai la gloire —

Sans besoin de Christ, de Galilée, de ses lys des

champs?

On n’est pas humbles: Tamerlan,

Mamaï, Attila, moi non plus, car

Moi aussi, je suis digne d’eux quand

Je déchire la vieille Charte divine,

Ennuyé de mensonges, j’assassine,

Je viole, je détruis et je brûle les villes en les pillant…

Très loin dans la steppe, en tremblant,

Le mica du soleil se perd dans les sables.

Dans le ciel éteint, ennuyée, tu regardes;

Ayant soupiré doucement, tu baisses les yeux de

nouveau …

Dans la fraîcheur de la nuit bleue, des chariots

Se détachent en noir сomme des troupes de la garde.

Le premier rossignol

La lune luit et disparaît dans des nuages.

Des pommiers sont en fleurs blanches sans feuillage.

Il y a au ciel une claire houle bleue et tendre;

Autour de la lune, elle va se répandre.

Aux allées nues pleines de froid transparent,

Le rossignol claque pour se mettre au chant.

Dans une maison à la fenêtre sans feu,

Sous la lune, une jeune fille tresse les cheveux.

Pour elle, ce conte vernal est délicieux –

Raconté mille fois au monde, il est vieux.

Le muguet

Aux bois nus sous une brise fraîche,

Jeune, j’ai vu ta vive lumière…

Tu brillais dans des feuilles sèches –

Je faisais mon premier vers.

Ton odeur est devenue chère

Pour toujours à mon jeune cœur,

Je retiens sa pureté claire,

L’aquosité, la fraîcheur!

C’est le jour à peine naissant,

Mon jeune cœur n’a que seize ans.

Au jardin dormant, la brume

Est tiède des fleurs sous la lune.

La maison est silencieuse,

Ta chère fenêtre est mystérieuse.

Là, c’est mon soleil, derrière

Le store, dans mon univers.

Une chanson

Je suis paysanne à la melonnière,

Lui est un homme gai, il est marin.

Sa voile a vu tant de fleuves, de mers;

Et cette voile blanche se perd au loin.

On dit que les dames grecques de Bosphore

Sont belles… Moi, je suis maigre, et mon teint

Est brun. Je ne sais s’il vient encore,

Car sa voile blanche s’est perdue au loin!

J’attendrai à tout temps, peu m’importe…

Mais s’il ne vient pas, je m’en irai

Jeter en mer la bague que je porte;

Avec ma tresse, je m’étranglerai.

Verbe

Momies, tombes, ossements gardent le silence;

Seul le verbe a la vie.

Et on ne voit au cimetière immense

Du monde que des écrits.

Mais nous n'avons pas d'autres apanages!

Il faut garder un tel

Talent au temps de souffrance et de rage –

Ce don est immortel.