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Je me gardai de lui dire que rien n’était moins sûr !

Il resta un moment sans répondre, puis haussa les épaules, et dit :

« Ainsi, après avoir chassé nos ancêtres, vous venez mendier une place près de notre soleil ?

— Je serais curieux de connaître l’origine de cette légende absurde, dis-je. Nous n’avons jamais chassé vos ancêtres, pas plus que ceux de Kirios, pas plus que les hommes qui montaient les hyper-spationefs qui ne sont jamais revenus. Un seul a réussi à retrouver la Terre, le savez-vous ?

— Comment voulez-vous que nous le sachions ? Vous prétendez que le fait que les moteurs hyper-spatiaux n’étaient pas directionnels n’était pas voulu ?

— Nous ne savons pas encore utiliser correctement l’hyperespace ! Comment aurions-nous pu le savoir, il y a plus de 500 ans ! De quel équipage descendez-vous ? Kirios descend de celui du troisième.

— Du onzième, à ce que dit la tradition. Combien y en eut-il en tout ?

— Seize. Seul le quatrième revint, par chance.

— Ainsi ce que nous apprenons dès l’enfance est faux, à savoir que les Terriens, voulant disperser l’espèce en cas de cataclysme, ce qui, à ce que vous me dites, a fini par se produire, auraient envoyé des équipages, sans leur dire qu’ils ne pourraient revenir ?

— Mais enfin, l’engin de vos ancêtres a dû décoller vers 4120 ou 4125. Le premier était parti en 4107. Vos ancêtres savaient parfaitement qu’ils risquaient de ne pas revenir !

— Qu’ils risquaient leur vie, oui, ils le savaient. Mais pas qu’ils seraient trahis !

— Il n’y a pas eu de trahison, je vous l’affirme. Croyez-moi ou non. De toute façon, nous sommes maintenant en guerre, votre peuple et le mien. Pour ma part, je ne demande qu’à l’arrêter. Que voulez-vous de votre côté ?

— Vous détruire, ou, si nous ne le pouvons, que vous quittiez le voisinage ! »

Je haussai les épaules.

« J’ai peur que ce ne soit trop tard, maintenant. Si vous nous aviez accueillis pacifiquement, comme le peuple de Kirios, alors, peut-être … Maintenant, nous sommes ici, et nous y resterons. Nous sommes las d’errer dans la nuit interstellaire !

— Alors c’est la guerre.

— Soit. Nous sommes donc ennemis, à moins que votre gouvernement n’en décide autrement, car, après tout, vous n’êtes qu’un ingénieur d’astronef. Sur quel principe fonctionnent vos engins ?

— Je ne le dirai jamais !

— Je ne m’attends pas à ce que vous nous le disiez volontairement. Nous avons des moyens … Une dernière question : que sont exactement pour vous ceux qui combattent à vos côtés. Des alliés ? Des serviteurs ? Sont-ils indigènes ?

— Quels autres ? Nous sommes seuls. Telbir était vide quand nous l’avons trouvée.

— Ne vous moquez pas de moi ! Vous savez parfaitement de qui je veux parler. Les humanoïdes à trois yeux et à peau rouge pourpre qui sont à vos côtés.

— Quelle est cette histoire ? »

Il semblait sincèrement ahuri.

Je dis quelques mots dans l’interphone, et sur l’écran placé sur le mur de la pièce, fut projeté un des films pris pendant la bataille souterraine. Riks parut médusé.

« Oui, ce sont bien les souterrains de Ther. Et cet homme, qui vient de s’abattre, c’est Dik Rheton, qui fut mon commandant sur le Psélin. Mais quels sont ces monstres rouges ? »

Un autre film montra la capture de Riks lui-même. À l’arrière-plan, dans une coursive éventrée, deux cadavres humanoïdes.

« Je ne comprends plus ! C’est mon navire, et c’est bien moi. Mais quels sont ces monstres ? Vous avez truqué le film ! Pourquoi ? Ah, pour la propagande ! Vous voulez nous faire passer aux yeux de votre peuple pour des alliés de monstres inhumains !

— Le film n’est pas truqué, intervint Kirios. Les « monstres », comme vous les appelez, nous ont donné plus de fil à retordre que vous-mêmes. Vous prétendez ignorer leur existence, ou l’avoir oubliée ?

— Cessons cette plaisanterie, dis-je. Pour la dernière fois, voulez-vous répondre aux questions ? Non ? Tant pis pour vous, nous allons vous faire passer au psychoscope. Je vous préviens que c’est extrêmement douloureux, et que vous en sortirez à l’état de loque humaine, sans volonté, ni guère d’intelligence ! »

Il blêmit.

« Qu’avez-vous à perdre à parler ? Nous saurons, de toute façon.

— Je ne serai pas volontairement un traître. Faites de moi ce que vous voulez.

— Soit. Je vous admire, mais je vous plains ! »

Les gardes l’emmenèrent, et je suivis, voulant diriger moi-même l’interrogatoire au psychoscope. Thélil, le maître de l’esprit, nous reçut, accompagné de Rhoob, le maître des sciences psychiques, dans son laboratoire.

« La machine est prête, Haurk. »

C’était une couche basse, avec un casque métallique destiné à coiffer le sujet, et de fortes sangles pour la maintenir. Riks s’y laissa étendre sans se défendre et sans mot dire. Le casque fut ajusté sur son crâne. Théli fit quelques ajustements, puis se dirigea vers le tableau de commande. La lumière baissa, un bourdonnement très faible se fit entendre. Les traits de Riks se détendirent un peu.

À la première question, il parla. Il nous donna tous les détails qu’il connaissait sur Telbir ; la population comptait environ huit cents millions d’hommes, l’industrie était bien développée. Leurs astronefs étaient mus par une variante, d’ailleurs ingénieuse, des moteurs cosmomagnétiques. Ils n’étaient pas encore arrivés à utiliser l’hyperespace, pensaient être sur la voie, mais Riks ne savait pas quelle était cette voie. Ils croyaient que leurs ancêtres avaient été victimes d’un tour infâme, que les Terriens les avaient envoyés coloniser au loin sans leur consentement. Il décrivit en détail tout ce qu’il savait de l’organisation militaire. Mais nous eûmes beau le questionner de toutes les façons possibles, il ne dit pas un mot des humanoïdes rouges.

Nous le laissâmes reposer sous bonne garde.

« Êtes-vous sûr, Théli, qu’un homme ne peut mentir sous le psychoscope ?

— Absolument. Il élimine toute volonté, toute résistance, même subconsciente.

— Alors de deux choses l’une : ou bien nous sommes des hallucinés, tous, ou bien …

— Ou bien ces monstres rouges possèdent quelque chose de supérieur au conditionnement que nous donnons aux Tekns, et qui leur permet de résister au psychoscope.

— Vous n’y résisteriez pas, Haurk. Simplement, vous ne vous endormiriez pas. On ne peut vous hypnotiser, mais si, par miracle, on y arrivait, vous seriez au même plan que les autres.

— Mais enfin, cet homme a dû vivre au contact de ces êtres ! Il y en avait deux à bord de son astronef ! Comment se fait-il qu’il n’en ait aucun souvenir !

— Parce que, probablement, il a été entraîné, depuis sa naissance, par une science psychologique plus avancée que la nôtre, à tout oublier dans certaines conditions.

— Mais enfin, on n’oublie rien ! C’est physiologiquement impossible !

— Si le mot oubli vous ennuie, mettons qu’il a caché ses souvenirs à un niveau que le psychoscope ne peut atteindre.

— Ce n’est pas là l’important, Haurk, dit Kirios. Ce qui l’est, c’est que, très clairement, dans cette affaire, les hommes sont les inférieurs, et les autres les maîtres ! Et nous ignorons tout de ces autres, sauf leur aspect physique, et le fait qu’ils se battent comme des démons ! »