Citons seulement quelques œuvres dont la qualité n’est plus à démontrer :
1956 :
Jean Amila — Le Neuf de Pique.
Jean-Louis Curtis — Un Saint au néon.
Jacques Sternberg — La sortie est au fond de l’espace.
Stefan Wul — Retour à O
1957 :
Stefan Wul — Niourk.
Stefan Wul — Rayons pour Sidar.
Stefan Wul — La peur géante.
Stefan Wul — Oms en série.
Stefan Wul — Le temple du passé.
Jean Paulhac — Un bruit de guêpes.
1958 :
Gérard Klein — Les perles du temps.
Gérard Klein — Le Gambit des Etoiles.
Stefan Wul — L’orphelin de Perdide.
Stefan Wul — La mort vivante.
Stefan Wul — Piège sur Zarkass.
1959 :
Daniel Drode — Surface de la Planète.
Charles Henneberg — La Rosée du soleil.
Stefan Wul — Terminus 1.
Stefan Wul — Odyssée sous contrôle.
1960 :
Marianne Andrau — Les faits d’Eiffel.
Jean Hougron — Le signe du Chien.
Michel Jeury — Aux Etoiles du Destin.
Michel Jeury — La Machine du pouvoir.
Philippe Curval — Les Fleurs de Vénus.
Gérard Klein — Chirurgiens d’une planète.
Lorsque Francis Carsac revient à la science-fiction après quelques années de silence, il se trouve désormais confronté à une redoutable concurrence.
Le « Fleuve Noir Anticipation » accueille des auteurs productifs comme Rayjean, Randa, Limat, Steiner, Bruss, certains comme Wul et Klein comptant même parmi les meilleurs écrivains du moment. Le « Rayon Fantastique » est également pris d’assaut par Martel, Klein, Curval, Henneberg, Jeury. « Présence du Futur » publie d’excellents ouvrages français, mais essentiellement des recueils — le premier roman français inédit sera Le Signe du Chien en 1960.
Francis Carsac publiera encore deux romans en 1962, Ce monde est nôtre et Pour patrie l’espace, ainsi qu’une dizaine de nouvelles entre 1959 et 1962, puis il disparaîtra presque complètement Reste le problème de La Vermine du Lion publié en 1967 au « Fleuve Noir Anticipation ». Francis Carsac me confia un jour que ce roman était destiné au « Rayon Fantastique », mais que la disparition de celui-ci en 1964 en avait retardé longuement la publication. Cette information permet de penser que la rédaction de La Vermine du lion doit être contemporaine de la publication des romans précédents.
Après une courte mais brillante exposition, la science-fiction française entamé vers 1964 (années du sabordage du « Rayon Fantastique ») une longue traversée du désert. Toutes les collections apparues entre 1951 et 1955 disparaissent, à l’exception du « Fleuve Noir Anticipation » et de « Présence du Futur ». La première n’emploie qu’une poignée d’auteurs « maison » extrêmement productifs ; la seconde hésite entre fantastique et science-fiction, internationalisme et américanisme, alternant la publication d’incontestables chefs-d’œuvre avec celle de lamentables navets — le point le plus bas semble atteint en 1968 avec la parution de Pallas ou la tribulation d’un certain « Edmond de Capoulet-Jaunac » !
En 1965, l’empire Opta pose ses principales fondations avec le « CLA » et « Galaxie-Bis », mais les écrivains français en seront exclus. Il faudra attendre l’extrême fin 1969 pour qu’un nouvel auteur d’envergure apparaisse dans « Présence du Futur » en la personne de Jean-Pierre Andrevon ; et qu’une nouvelle collection de prestige soit lancée, « Ailleurs et Demain ». J’Ai Lu lancera l’année suivante sa propre série SF et Marabout intensifiera sa production dans le genre.
Mais trop tard pour Francis Carsac : la science-fiction française des années 70 n’est plus tout à fait comparable à celle des années 50 ! Heureusement d’ailleurs, cela prouve que le genre est bien vivant et évolue ! Mais cette évolution entraîne dans son sillage nombre d’excès. Le pire est probablement de considérer que seul ce qui est « novateur » est digne d’intérêt. Et d’en conclure que la tentation qu’auraient certains écrivains de reprendre le flambeau des « grands anciens » est à combattre par tous les moyens. Pourtant certains défenseurs de la « nouvelle science-fiction » ont tenté de « relancer » Carsac.
Je pense à Jean-Pierre Andrevon, auteur politisé s’il en est mais n’ayant jamais confondu tract et littérature. Jean-Pierre Andrevon est un des meilleurs écrivains français modernes ; il est même probablement le plus brillant ciseleur de nouvelles de sa génération. Mais cela ne l’empêcha pas de demander à Francis Carsac une nouvelle inédite pour une de ses anthologies Retour à la Terre et d’admirer aujourd’hui encore Jean Gaston Vandel.
Je voudrais évoquer à nouveau Jean-Pierre Andrevon pour m’aider à dériver doucement vers la conclusion de cette préface, déjà écrite.
Il faut lire « L’Autre Côté », ce merveilleux fragment autobiographique publié dans le n°4 du livre-revue « Science-Fiction » (Denoël, 1985). En une quinzaine de pages, Jean-Pierre Andrevon répond à la question : « Pourquoi la science-fiction ? ». Ce texte magique regorge d’émotion et en livre davantage sur son auteur que toute son œuvre littéraire. On y découvre un des « pères fondateurs » de la science-fiction politique moderne évoquer le plaisir ressenti à la lecture d’œuvres telles que La Faune de l’Espace, Les Rois des Etoiles ou le cycle des aventures de John Carter.
S’il est une conclusion appropriée à cette longue préface (que l’on pardonne mes excès ou mes digressions) c’est que chaque époque produit son lot de déchets et sa poignée de chefs-d’œuvre. Je pense que mon ami Jean-Pierre Andrevon serait d’accord avec cette remarque et partagerait ma conviction : On peut apprécier à la fois Edmond Hamilton, Stanley Weinbaum, Nat Schachner, Robert Abernathy, Alfred Bester, A.E. Vogt, Robert Heinlein, Fredric Brown, Eric Frank Russel, Clifford D. Simak, Philip K. Dick, Orson Scott Card et William Gibson, pour ne citer que quelques écrivains représentatifs de ces cinquante dernières années.
Le jour où je dresserai une telle liste d’écrivains français, elle sera probablement moins longue, mais Francis Carsac y figurera en bonne place.
Francis Valéry
Cet ouvrage reproduit par procédé photomécanique
a été achevé d’imprimer en août 1988
sur les presses de l’imprimerie Bussière
à Saint-Amand (Cher)
N° d’édit. : 508. N°d’imp. : 5268.
Dépôt légal : août 1988.
Imprimé en France