Ce que tu souhaites dans ta douleur, ô enfant, est une chose plus précieuse que l'or, plus grande que le bonheur des Hyperboréens. Mais voici que le double fouet siffle horriblement. Nos protecteurs sont sous la terre, et les mains de nos maîtres ne sont pas pures de ces crimes odieux. Il n'en est, pour des enfants, qu'une plus grande tâche à remplir.
Strophe IV.
Tes paroles ont pénétré dans mon oreille comme une flèche. Zeus, Zeus! tu envoies brusquement du Hadès la tardive vengeance qui s'attache au crime des pervers et qui frappe les parents eux-mêmes.
Strophe V.
Plaise aux dieux que je pousse bientôt le hurlement lugubre sur l'homme égorgé et sur la femme morte! Pourquoi, en effet, cacher ce qui souffle dans mon cœur? Ma profonde colère et ma haine amassée siégent sur ma face.
Antistrophe IV.
Ah! ah! quand donc le tout-puissant Zeus abaissera-t-il la main pour frapper ces têtes! Que cette terre reconnaisse ta puissance! Je demande justice contre l'iniquité. Entendez-moi, dieux souterrains!
C'est la loi que le sang répandu par le meurtre demande un autre sang. Érinnys pousse des cris de mort! Elle rend la mort à qui a donné la mort.
Strophe VI.
Où sont, où sont les puissances qui commandent aux morts? Voyez, ô toutes-puissantes exécrations des morts égorgés, voyez les tristes restes des Atréides chassés de leur demeure! De quel côte se tourner, ô Zeus!
Antistrophe V.
Tout mon cœur est ébranlé par ces lamentations. A peine si je garde quelque espérance, et mon âme devient noire en entendant tes paroles. Mais ma douleur se dissipe de nouveau quand je vois ton courage, et tout me semble beau dans l'avenir.
Antistrophe VI.
Que dirons-nous de plus? Faut-il rappeler les maux dont nous avons été accablés par notre mère? Il est des haines qui s'apaisent, mais non celles-ci. Ma colère contre ma mère est implacable comme un loup affamé.
Strophe VII.
Elle a frappé comme Arès, ou comme une femme Kissienne toujours avide de combats. On a pu voir les coups multipliés de sa main s'abattant de tous côtés, de près et de loin, et redoublant! Ma tête retentit misérablement à chaque coup. Ô dieux! ô mère funeste et impie! Tu as osé ensevelir ton époux en ennemi, non pleuré, sans deuil et sans la foule des citoyens!
Strophe VIII.
Tu as dit toute l'infamie du crime. Malheur à moi! C'est par mes mains et avec l'aide des dieux qu'elle expiera la mort honteuse de mon père. Que je la tue et que je meure après!
Antistrophe VII.
Afin que tu le saches, elle l'a coupé en morceaux; et l'ayant ainsi traité, elle l'a enseveli, voulant emplir ta vie d'une douleur intolérable. Tu sais maintenant quel a été le meurtre lamentable de ton père.
Tu m'as dit la destinée de mon père!
Antistrophe VIII.
Et moi, j'étais tenue au loin, méprisée, abjecte, chassée de la demeure comme un vil chien, aimant mieux les larmes que le rire, et, pour toute joie, cachant mon deuil et mes plaintes. Garde dans ton esprit ce que tu viens d'entendre par tes oreilles jusqu'au lieu tranquille de la pensée. Puisqu'ils ont agi ainsi, demande à ta colère ce qu'il te reste à faire. Pour mener tout à fin, il faut avoir un haine invincible.
Strophe IX.
Je t'invoque, ô père! Aide tes enfants!
Et moi, je t'invoque avec mes larmes!
Et toute notre foule aussi crie vers toi! Entends-nous, reviens à la lumière, aide-nous contre nos ennemis!
Antistrophe IX.
Qu'Arès lutte contre Ares, la vengeance contre la vengeance!
Ô dieux! donnez la victoire à ce qui est juste!
La terreur me saisit en écoutant ces imprécations. Ce qui est fatal est résolu depuis longtemps. Que tout arrive selon leurs vœux!
Strophe X.
Ô misères de cette race! ô plaie sanglante d'Atè! ô deuils terribles et lamentables! ô douleurs sans terme!
Antistrophe X.
Ô maux incurables de ces demeures, non causés par d'autres, mais par ceux qui les habitent et qui prolongent eux-mêmes la sanglante discorde! C'est l'hymne des déesses souterraines. Ô dieux heureux du Hadès, entendez les prières de ces enfants et donnez-leur la victoire!
Ô père, toi qui n'es point mort comme un roi, je te supplie! donne-moi de commander dans ta demeure.
Et moi, père, je te supplie de me sauver de la mort terrible que doit subir Aigisthos.
Ainsi, les hommes pourront t'offrir les repas funèbres accoutumés; sinon, parmi les convives, tu resteras, vil et méprisé, dans les flammes des bûchers qui engraissent la terre.
Et moi, des demeures paternelles je t'apporterai, en libations nuptiales, toutes mes richesses; et, avant toutes choses, j'honorerai ta tombe.
Ô terre, rends-moi mon père, afin qu'il assiste au combat!
Ô Perséphassa! Donne-nous un courage invincible!
Souviens-toi, père, du bain dans lequel tu as été égorgé!
Souviens-toi du filet dans lequel ils t'ont tué!
Père! tu n'avais pas été enveloppé de chaînes d'airain.
Mais, très honteusement dans un traître voile!
N'es-tu pas irrité de ces outrages, ô père?
Ne lèveras-tu pas ta tête très chère?