Выбрать главу

Nous nous pendrons aussitôt à ces dieux.

LE ROI PÉLASGOS.

J'ai entendu tes paroles. Elles frappent mon esprit d'horreur.

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

Tu as compris. Je me suis expliquée plus clairement.

LE ROI PÉLASGOS.

Pour mille raisons ces difficultés sont inextricables. L'abondance des maux m'écrase comme un torrent. Je suis submergé par une mer furieuse d'immenses calamités, et il n'y a point de port à mes malheurs. En effet, vous l'avez dit, si je ne vous viens point en aide je commets un crime inexpiable; mais si, devant nos murs, je range la bataille contre tes proches, les fils d'Aigyptos, n'est-ce pas un malheur lamentable que, pour des femmes, les hommes ensanglantent la terre? Cependant il faut redouter la colère de Zeus qui protége les suppliants, car il est la suprême épouvante des mortels. Toi donc, vieillard, père de ces vierges, saisis promptement ces rameaux entre tes bras et porte-les aux autels de nos autres dieux, afin que tous les citoyens voient ces marques de votre arrivée et que ma prière en votre faveur ne soit pas rejetée, car le peuple se plaît toujours à blâmer ses chefs. En effet, il sera facilement touché en voyant ces rameaux, et il prendra en haine l'insolence de vos ennemis, et il sera plus bienveillant pour vous, car on s'intéresse communément aux plus faibles.

DANAOS.

Ceci est digne d'actions de grâces sans nombre d'avoir rencontré un protecteur aussi vénérable; mais donne-moi des serviteurs et des guides de cette terre, afin que nous trouvions les demeures et les autels des dieux qui protègent la ville et que nous marchions en sûreté, car notre aspect est étranger, et le Néilos ne nourrit pas une race semblable à celle d'Inakhos. Il faut craindre que la confiance attire le danger; il arrive qu'on tue un ami par ignorance.

LE ROI PÉLASGOS.

Allez, hommes! L'étranger a bien parlé. Menez-le vers les autels de la ville et les demeures des dieux. Dites brièvement à ceux que vous rencontrerez que vous conduisez un marin, suppliant des dieux.

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

Tes paroles et tes ordres suffisent pour notre père; mais quelle sera ma part? Où trouverai-je ma sûreté?

LE ROI PÉLASGOS.

Laisse ici ces rameaux, marques de ton malheur.

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

Je les abandonne, confiante en tes paroles et en ta puissance.

LE ROI PÉLASGOS.

Retire-toi dans ce bois vaste.

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

Comment ce bois profane me protégera-t-il?

LE ROI PÉLASGOS.

Nous ne te livrerons pas aux oiseaux de proie.

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

Mais si c'était à des hommes plus à craindre que des dragons terribles?

LE ROI PÉLASGOS.

Réponds par un meilleur augure à des paroles de bon augure.

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

Ne t'étonne pas que, frappées de terreur, nous manquions de patience.

LE ROI PÉLASGOS.

La défiance envers les rois est sans borne.

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

Rends-moi la joie par tes paroles et tes actions.

LE ROI PÉLASGOS.

Votre père ne vous laissera pas longtemps seules. Pour moi, ayant convoqué le peuple qui habite ce pays, je tenterai de persuader les citoyens de vous être bienveillants et j'enseignerai à votre père ce qu'il faudra dire. Dans l'intervalle restez ici, et priez les dieux du pays que vos désirs s'accomplissent. Moi je vais préparer tout ceci. Que la persuasion et la fortune me fassent réussir!

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

Strophe I.

Roi des rois, le plus heureux des bienheureux, force très puissante des puissants, très riche Zeus, écoute, exauce mes prières! Détourne l'insolence de ces hommes que tu hais avec justice, abîme dans la mer pourprée leur nef aux noirs rameurs.

Antistrophe I.

Regarde avec bienveillance cette race antique de jeunes filles issue d'une femme que tu as aimé. Souviens-toi d'Iô, que tu touchas de la main, et par laquelle nous nous glorifions d'appartenir à cette terre où nous sommes.

Strophe II.

Nous marchons dans les pas antiques, dans les pâturages fleuris de notre mère, dans la grasse prairie d'où, harcelée par le taon, elle s'enfuit, vagabonde et furieuse, à travers d'innombrables races mortelles. Deux fois, de la terre à la terre opposée, elle traversa le détroit qui porte son nom.

Antistrophe II.

De la Phrygia, riche en troupeaux, à travers la terre d'Asia, elle parcourut Teuthras, ville des Mysiens, et les vallées Lydiennes, et les monts Kilikiens, et les contrées Pamphyliennes, et les fleuves au cours sans fin, et la terre de la richesse, et la terre féconde en fruits d'Aphrodita.

Strophe III.

Harcelée par l'aiguillon du bouvier ailé, elle parvint au bois florissant de Zeus, au pâturage fécondé par les neiges fondues et que parcourt la force de Typhôn, aux eaux du Néilos, vierges de maladies. Mais elle était toujours furieuse, en proie aux douleurs cuisantes de l'implacable Hèra.

Antistrophe III.

Et les vivants qui habitaient cette terre eurent l'esprit saisi par la pâle terreur, quand ils virent cette bête étrange, tenant de la race humaine et de la brute, moitié femme et moitié vache, et ils restaient stupéfaits devant ce prodige. Et alors, quel fut celui qui apaisa Iô vagabonde et misérablement harcelée par le taon?

Strophe IV.

Zeus, le roi éternel. La violence du tourment cessa par la puissance et par le souffle divins, et l'amertume lamentable des larmes, et, recevant très véritablement le faix de Zeus, elle enfanta un illustre fils.

Antistrophe IV.

Qui devait être très heureux pendant une longue vie. Et toute la terre cria: – Cet enfant est vraiment de Zeus!’ Qui, en effet, eût réprimé les ruses furieuses de Hèra? Ceci est l'œuvre de Zeus; et qui dira que nous sommes la race issue d'Épaphos dira la vérité.

Strophe V.

Quel autre parmi les dieux invoquerais-je plus justement? C'est le père, la source de toute génération, le maître de sa propre puissance, le créateur des choses antiques, le très bienveillant Zeus!

Antistrophe V.

Il n'y a point de puissance au-dessus de la sienne, nul ne siége au-dessus de lui, nul n'est respecté par lui. Ce qu'il dit s'accomplit aussitôt, ce qu'il pense est réalisé sans retard.

DANAOS.

Ayez bon courage, enfants! Les citoyens nous sont propices. Le peuple a décidé et décrété.

LE CHŒUR DES DANAÏDES.

Salut! ô vieillard, le plus cher des messagers! Mais dis-nous quel décret a été rendu, et de quel côté le peuple a levé le plus de mains.