Je ne compte pas les barreaux. En tout cas il y en a des chiées, voire un peu plus. Je me sens pousser des ampoules aux mains. Voyage au centre de la terre du brave Jules (bali) Verne.
Parvenu au bout de celui-ci, j'ai les cannes mollassonnes et les genoux qui font bravo.
Un souterrain se propose, je l'emprunte.
Pas du tout le côté terrier suintant. Non : plutôt les couloirs du Métro en miniature. J'y déambule d'un bon pas, tendu comme la corde d'un arc ou comme la bite d'un violeur à la tire (un coup).
Qu'il est long le chemin conduisant au Ciel ! Duraille d'évaluer les distances dans un boyau qu'éclaire seule ma loupiote de gousset.
A force d'à force, j'arrive tout de même au bout, à savoir au pied d'une deuxième échelle.
De nouveau, je chique le petit écureuil (qui se carre des glands dans le cul en prévision (ou provisions) de l'hiver.
Cette fois, je résurge tu veux savoir où ?
Dans un confessionnal, mec. A la place qu'occupe le prêtre pour entendre les turpitudes des pénitents.
Me voici dans une petite chapelle bâtie en contrebas du domaine. La lampe rouge est allumée, arrachant tant bien queue mâle un autel fromagesque à la noye.
Je me dirige vers la porte.
Sors.
Je retrouve la nuit tiède, la brise, des senteurs aquatiques. Le lac est à deux pas, immense flaque d'argent sous la lune, ne puis-je me retenir de lyrismer.
Entre l'eau et la chapelle : la route.
C'est par là qu'est venu le meurtrier.
Par là qu'il est reparti.
Conclusion : il connaît les lieux très à fond.
22
1024, Texas Street, est situé dans la périphérie miamiesque. C'est un immeuble de béton pourvu d'escaliers extérieurs, aux larges vitres carrées garnies de stores à lamelles. Le bas de la construction est occupé par un cinéma d'apparence défraîchie dont les affiches concernent des films nettement culiers, à en juger par les photos sur lesquelles se trémoussent des frangines à loilpé, rousses échevelées pour la plupart. A l'arrière-plan, t'as des costauds vêtus de cuir et munis de fouets redoutables.
Les degrés de fer vibrent sous nos pas.
Après avoir gravi deux étages, nous stoppons devant un huis métallique, fermé par un simple bec-de-cane chromé.
Je délourde sans difficulté et pénètre dans un bref couloir nous offrant deux autres portes, en bois celles-là.
Personne ne répond ; je réitère à plusieurs reprises en augmentant l'intensité.
Que tchi !
— Voudrasses-tu que je démène de l'épaule ? propose Béru.
— A quoi bon ? objecté-je en sortant mon sésame.
Rien de plus fastoche à craquer que cette serrure pour coffret à bijoux d'employée de maison portugaise. Elle se rend à mes raisons avec la docilité d'une agnelle à qui le loup montre sa denture ensanglantée.
Un bout de vestibule nous accueille. Sur la droite, un coin à manger comportant une kitchenette, au mitan une piaule en désordre sentant le lit, le joint et le parfum importé des îles Fidji. A gauche, les zouatères et une salle de bains.
Une radio sévit dans cette dernière. Un groupe de Mexicanos chante en poussant des cris déchirants dont on ne sait s'ils sont dus à un gros chagrin ou à une forte hilarité.
Je tourne délicatement le loquet ; l'huis s'écarte, docile.
Nous avons dès lors une vue imprenable sur une jeune femme à poil, en train de se briquer le Raminagrobis à main nue sous la douche.
Elle nous tourne le dos, ce qui nous permet d'admirer à loisir son exquise contrebasse. Le joufflu est un peu fort, mais les cuisses sont harmonieuses et la taille « bien prise », aurait dit un de mes confrères du siècle des Lumières.
Elle est très brune, provisoirement défrisée par le jet impétueux. Jolie bestiole ! Elle se passe longuement la paluche dans la tranchée des baïonnettes, ensuite se fourbit la laiterie avec la même complaisance. Quoi de plus excitant qu'une belle fille occupée de son corps ?
Tous trois retenons notre respirance, attentifs, dilatés, émus.
Après plusieurs minutes de « blablutions », elle coupe l'eau et, à tâtons, s'empare d'une serviette suspendue au pommeau doucheur, se sèche énergiquement, se retourne. Elle vaut la volte-face.
Tudieu l'engin ! Le regard noir, immense et ravageur, la bouche lippue des goinfreuses de pafs, le teint ocré, les chailles étincelantes, les pommettes hautes, cette nière te flashe le sensoriel à t'en boursoufler les roustons.
Elle marque deux réactions dans la foulée : primo, la surprise, deuxio la fureur. Pas un instant de peur chez cette femelle ardente.
— Qu'est-ce que vous foutez là ? glapit-elle en espagnol du Mexique.
Bérurier murmure :
— J'ai rarement vu un tablier pareil ! Y aurait assez pour faire un manteau d'estragon à Berthy !
Son admiration n'échappe pas à la pileuse, laquelle étale le chiftir « nid-d'abeilles » devant son monument aux Poilus d'Orient.
J'assure à la belle que nous avons dûment toqué à sa lourde, mais sa radio tonitruant, elle n'a pas entendu. Ça la calme un chouïa. Elle nous prie de l'attendre dans le salon-salle-à-manger-cuisine.
Ce que.
Un énorme tas de tortillas froides stimule les gustatives du Lardé qui se met à claper sans la moindre gêne.
Par la fenêtre donnant sur l'arrière, et au-delà d'une cour obscure, on distingue la mer, peu loin, avec des pavillons claquant au vent et une théorie d'hôtels au luxe ricain.
Miss Poil-Poil se radine, un peignoir orange serré à la taille, les mamelles à la bade[9].
— Alors ? Qui êtes-vous ? s'enquiert-elle.
— Des policiers français en mission spéciale aux U.S., répondé-je-t-il.
Ça ne l'émeut pas plus que si nous étions des bénévoles quêtant pour les inondés du Mont Palomar.
— Et en quoi suis-je concernée ? fait la surpileuse, sa hargne retrouvée.
— Vous êtes l'amie d'Adamo Corvado ? éludé-je-t-il.
— Sa femme ! rectifie-t-elle avec force, fière de la légitimité de leur union.
De toute évidence, elle ignore l'accident survenu à son castor. Moi, tu me connais : j'ai horreur d'annoncer les mauvaises nouvelles. Oiseau de malheur, c'est pas dans mes emplois. Un jour que j'allais apprendre la mort de son fils à une maman, je l'ai baisée au lieu de lui dire la vérité[10]. Je suis messager du bonheur par vocation.
Néanmoins, il faut bien plonger, non ? L'affliction dépasse la réalité, comme on dit par chez nous.
Le Gravos me sachant par cœur et devinant mon profond embarras, intervient chariteusement.
— Laisse, fait-il, j'vas y casser l'morcif.
— Tu ne parles bien ni l'anglais, ni l'espago.
— Quand j'lime non pluve, ça m'empêche pas d'leur filer des troussées internationables !
Il engloutit l'omelette en cours, se ramone la clape, va pour porter l'estoc à la veuve ignorante.
Qu'à cette seconde précise, un coup de sonnette péremptoire étale ses vibrations au plus creux de nos porte-crayons.
La femme qui se coiffe le pubis au balai-brosse rajuste son peignoir et va ouvrir.
Réapparaît, escortée d'un mastodonte d'au moins trois quintaux. L'individu mesure deux mètres, sans l'aide de ses pompes à triples semelles. Il porte un costard plus fripé que le feu cul de la brave mère Calmant, morte à l'humus de l'âge. Sa trogne est violacée, tuméfiée, constellée de cicatrices en intailles et en relief, le tout dominé par un tarbouif qui projetait de devenir trompe d'éléphant, mais qui est resté nez de tapir. On penserait à Gargantua si ce phénomène n'était ricain. J'ai déjà visionné des hures de ce style, dans des westerns purulents et inadéquats.