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CHANSON DE LA PLUS HAUTE TOUR.

Qu'il vienne, qu'il vienne, Le temps dont on s'éprenne.
J'ai tant fait patience Qu'à jamais j'oublie. Craintes et souffrances Aux cieux sont parties. Et la soif malsaine Obscurcit mes veines.
Qu'il vienne, qu'il vienne, Le temps dont on s'éprenne.
Telle la prairie A l'oubli livrée, Grandie et fleurie D'encens et d'ivraies, Au bourdon farouche Des sales mouches.
Qu'il vienne, qu'il vienne, Le temps dont on s'éprenne. 

     J'aimai le désert, les vergers brûlés, les boutiques fanées, les boissons tiédies. Je me traînais dans les ruelles puantes et, les yeux fermés, je m'offrais au soleil, dieu de feu.

     "Général, s'il reste un vieux canon sur tes remparts en ruines, bombarde-nous avec des blocs de terre sèche. Aux glaces des magasins splendides! dans les salons! Fais manger sa poussière à la ville. Oxyde les gargouilles. Emplis les boudoirs de poudre de rubis brûlante... "

     Oh! le moucheron enivré à la pissotière de l'auberge, amoureux de la bourrache, et que dissout un rayon!

FAIM

Si j'ai du goût, ce n'est guère Que pour la terre et les pierres. Je déjeune toujours d'air, De roc, de charbon, de fer.
Mes faims, tournez. Paissez, faims, Le pré des sons. Attirez le gai venin Des liserons.
Mangez les cailloux qu'on brise, Les vieilles pierres d'églises; Les galets des vieux déluges, Pains semés dans les vallées grises. ______________ 
Le loup criait sous les feuilles En crachant les belles plumes De son repas de volailles: Comme lui je me consume.
Les salades, les fruits N'attendent que la cueillette; Mais l'araignée de la haie Ne mange que des violettes.
Que je dorme! Que je bouille Aux autels de Salomon. Le bouillon court sur la rouille Et se mêle au Cédron. 

     Enfin, ô bonheur, ô raison, j'écartai du ciel l'azur, qui est du noir, et je vécus, étincelle d'or de la lumière nature.

     De joie, je prenais une expression bouffonne et égarée au possible:

Elle est retrouvée! Quoi? L'éternité C'est la mer mêlée Au soleil.
Mon âme éternelle, Observe ton voeu Malgré la nuit seule Et le jour en feu.
Donc tu te dégages Des humains suffrages, Des communs élans! Tu votes selon...
- Jamais l'espérance. Pas d'orietur. Science et patience, Le supplice est sûr.
Plus de lendemain, Braises de satin, Votre ardeur Est le devoir.
Elle est retrouvée! - Quoi? -L'Éternité. C'est la mer mêlée Au soleil. _________________ 

     Je devins un opéra fabuleux: je vis que tous les êtres ont une fatalité de bonheur: l'action n'est pas la vie, mais une façon de gâcher quelque force, un énervement. La morale est la faiblesse de la cervelle.

     A chaque être, plusieurs autres vies me semblaient dues. Ce monsieur ne sait ce qu'il fait: il est un ange. Cette famille est une nichée de chiens. Devant plusieurs hommes, je causai tout haut avec un moment d'une de leurs autres vies. - Ainsi, j'ai aimé un porc.

     Aucun des sophismes de la folie, - la folie qu'on enferme, - n'a été oublié par moi: je pourrai les redire tous, je tiens le système.

     Ma santé fut menacée. La terreur venait. Je tombais dans des sommeils de plusieurs jours, et, levé, je continuais les rêves les plus tristes. J'étais mûr pour le trépas, et par une route de dangers ma faiblesse me menait aux confins du monde et de la Cimmérie, patrie de l'ombre et des tourbillons.

     Je dus voyager, distraire les enchantements assemblés sur mon cerveau. Sur la mer, que j'aimais comme si elle eût dû me laver d'une souillure, je voyais se lever la croix consolatrice. J'avais été damné par l'arc-en-ciel. Le Bonheur était ma fatalité, mon remords, mon ver: ma vie serait toujours trop immense pour être dévouée à la force et à la beauté.

     Le bonheur! Sa dent, douce à la mort, m'avertissait au chant du coq, -ad matutinum, au Christus venit, - dans les plus sombres villes:

Ô saisons, ô châteaux! Quelle âme est sans défauts?
J'ai fait la magique étude Du bonheur, qu'aucun n'élude.
Salut à lui, chaque fois Que chante le coq gaulois.
Ah! je n'aurai plus d'envie: Il s'est chargé de ma vie.
Ce charme a pris âme et corps Et dispersé les efforts.
Ô saisons, ô châteaux!
L'heure de sa fuite, hélas! Sera l'heure du trépas.
Ô saisons, ô châteaux! _________________

     Cela s'est passé. Je sais aujourd'hui saluer la beauté.

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L'IMPOSSIBLE

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     Ah! cette vie de mon enfance, la grande route par tous les temps, sobre surnaturellement, plus désintéressé que le meilleur des mendiants, fier de n'avoir ni pays, ni amis, quelle sottise c'était. - Et je m'en aperçois seulement!

     - J'ai eu raison de mépriser ces bonshommes qui ne perdraient pas l'occasion d'une caresse, parasites de la propreté et de la santé de nos femmes, aujourd'hui qu'elles sont si peu d'accord avec nous.

     J'ai eu raison dans tous mes dédains: puisque je m'évade!

     Je m'évade!

     Je m'explique.

     Hier encore, je soupirais: "Ciel! sommes-nous assez de damnés ici-bas! Moi j'ai tant de temps déjà dans leur troupe! Je les connais tous. Nous nous reconnaissons toujours; nous nous dégoûtons. La charité nous est inconnue/ Mais nous sommes polis; nos relations avec le monde sont très-convenables." Est-ce étonnant? Le monde! les marchands, les naïfs! - Nous ne sommes pas déshonorés. - Mais les élus, comment nous recevraient-ils? Or il y a des gens hargneux et joyeux, de faux élus, puisqu'il nous faut de l'audace ou de l'humilité pour les aborder. Ce sont les seuls élus. Ce ne sont pas des bénisseurs!