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« Que diable fabriquent le Brillant et l’Inspiré ? » demanda Desjani à la cantonade.

Geary jeta un coup d’œil. Ces deux croiseurs de combat avaient rompu la formation et abandonné l’Opportun, le troisième élément de leur division, et ils accéléraient vers les deux cuirassés syndics pour les intercepter. À l’idée du prix que risquait de lui coûter cet engagement, Geary sentit se rallumer sa colère. Nous avons perdu assez de vaisseaux pour aujourd’hui, mais ces crétins font fi de mes ordres et défient des cuirassés en combat singulier.

« Ils les atteindront longtemps avant nous, protesta Desjani, manifestement déçue. Mais pourquoi ? Ils ne peuvent même pas en abattre un à eux deux.

— Non », reconnut Geary. Il enfonça ses touches de communication avec une rudesse inhabituelle. « Brillant, Inspiré, ici le capitaine Geary. Interrompez votre passe de tir sur ces deux cuirassés. »

Il attendit puis vérifia la distance qui le séparait de ces deux croiseurs de combat et calcula mentalement le temps que mettraient son message à les atteindre et leur réponse à lui parvenir. Mais il n’en reçut aucune et les deux croiseurs de combat chargeaient toujours. Il s’aperçut alors que l’Opportun faisait lui aussi demi-tour pour tenter de les rattraper et intercepter avec eux les deux cuirassés. Il dut inspirer lentement plusieurs goulées d’air pour se calmer avant de les rappeler : « Brillant, Inspiré, Opportun, je vous ordonne de mettre immédiatement un terme à votre passe de tir sur ces deux cuirassés. »

Il s’écoula encore quelques instants, dont Écho Quatre profita pour se réaligner, avant de fondre à son tour sur les deux bâtiments ennemis.

« Nous n’avons plus le temps de leur envoyer un autre message », fit remarquer Desjani.

Geary sentit sa mâchoire le lancer et s’efforça de desserrer les dents, tout en regardant trois de ses croiseurs de combat charger stupidement plus fort qu’eux.

Le Brillant et l’Inspiré passèrent en trombe près des deux cuirassés syndics et concentrèrent leur feu sur l’un d’eux ; ils les frôlèrent d’assez près pour lâcher leurs champs de nullité, déchaîner leurs lances de l’enfer et, sans doute, ce qu’il leur restait de mitraille. Les boucliers du bâtiment ciblé flamboyèrent à plusieurs reprises mais tinrent le coup, du moins jusqu’à ce que le second champ de nullité les pénètre assez profondément pour emporter un bon morceau d’une de ses unités de propulsion, le ralentissant.

Mais les Syndics avaient eux aussi concentré leur tir et, durement touché, le Brillant fit une embardée : son propre système de propulsion avait morflé et la plupart de ses armes étaient démantelées.

Puis l’Opportun déboula en solitaire : un unique croiseur de combat affrontant le feu de deux cuirassés. Les lances de l’enfer ennemies lacérèrent ses boucliers puis sa coque. Seule sa vitesse acquise sauva le vaisseau qui, affreusement éprouvé, s’écarta en tournoyant des bâtiments syndics.

« Si jamais son commandant y survit, c’est moi qui le descendrai ! promit Geary en se demandant combien de spatiaux de l’Alliance avaient vainement trouvé la mort à bord de l’Opportun.

— Il y a six mois, je l’aurais sans doute applaudi, lâcha Desjani d’une voix étonnée. Aujourd’hui, je me rends compte à quel point c’est stupide. À quoi bon faire preuve de bravoure quand elle ne sert que les intérêts de l’ennemi ? » Sa voix se durcit. « Très bien, Indomptable, cria-t-elle pour sa passerelle. Faisons-leur payer ce qu’ils ont fait à l’Opportun. »

Les trois croiseurs de combat avaient sans doute affaibli les boucliers des cuirassés syndics, mais en contrepartie de dégâts autrement graves. Les bâtiments d’Écho Quatre Un les martelaient à présent tour à tour à mesure que la formation les dépassait, achevant d’enfoncer leurs boucliers tandis que ses quatre cuirassés portaient l’estocade au premier, le réduisant à l’état d’épave à la dérive, et anéantissaient la plupart des systèmes du second. « À tous les vaisseaux d’Écho Quatre Un, poursuite générale. Rompez la formation et engagez le combat avec les cibles à votre portée. » Geary bascula sur un autre circuit. « Lieutenant Iger, j’aimerais savoir si l’un de ces modules de survie n’abriterait pas un commandant en chef syndic. Tâchez de le découvrir. »

Ç’avait été une bataille aussi confuse que douloureuse. Mais elle avait coûté plus cher aux Syndics qu’à l’Alliance. À voir culbuter dans le vide l’épave de l’Opportun, Geary n’y puisait aucun réconfort.

Onze

« Nous ne pouvons pas sauver l’Opportun, déclara Tyrosian en secouant tristement la tête. Trop d’avaries et de systèmes HS. Si vous teniez malgré tout à le prendre en remorque, il faudrait nous attarder ici plusieurs jours pour renforcer les sections endommagées de sa coque, faute de quoi il risquerait de se briser. »

Geary consulta un rapport qu’il venait d’ouvrir et qui faisait état des pertes de la flotte. Le commandant et le second de l’Opportun étaient morts, ainsi que près de quarante pour cent de son équipage. Il fixa le pont un moment. Ce gaspillage l’emplissait d’une telle amertume qu’il n’avait même plus à réprimer sa rage. Il hocha la tête : « Nous allons le saborder. Embarquez tout ce qu’on pourra aisément démonter et qui servirait aux autres croiseurs de combat. Vous disposez de quatre heures pendant qu’on évacuera son équipage survivant.

— À vos ordres, capitaine. Et… pour le Cœur de Lion ? s’enquit Tyrosian. Nous ne sommes pas sûrs qu’il soit encore en un seul morceau et nous nous attendons à ce qu’il se fende en deux au premier effort, mais je devais poser la question.

— Ouais. Nous allons aussi le faire sauter. » La division des cuirassés de reconnaissance se réduisait maintenant à un seul bâtiment, l’Exemplaire. « Qu’en est-il des autres vaisseaux gravement endommagés ? »

Tyrosian fronça les sourcils et détourna le regard pour consulter les rapports qu’affichait son écran. « Les croiseurs lourds Gousset et Schischak sont d’ores et déjà en chantier, mais ils ne seront pas aptes au combat avant un bon moment, et le Gousset aura malgré tout besoin d’un long séjour dans un chantier spatial. Le croiseur léger Caltrope a perdu de nombreux systèmes mais il peut encore suivre la flotte. Quatre croiseurs de combat, le Courageux, l’lllustre, le Brillant et l’Aventureux, ont été fortement endommagés. Le Courageux et le Brillant, en particulier, sont pratiquement inaptes au combat, mais nous avons réparé leurs unités de propulsion en nombre suffisant.