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— N’allez-vous pas répondre à cette canaille sans vergogne ? s’enquit Desjani.

— Pas encore. » Parce que, d’une part, il n’avait pas la certitude qu’il réussirait à garder son sang-froid et, d’autre part, parce qu’il tenait à en savoir davantage avant de décider de sa réponse.

Une demi-heure après, bien avant d’avoir pu constater de visu la réaction de la flotte à sa manœuvre précédente, la flottille syndic vira de nouveau sur tribord pour adopter une trajectoire qui l’intercepterait environ trois jours plus tard.

« Nous n’avons même plus à manœuvrer, fit observer Desjani en se renfrognant. Je meurs d’envie de désintégrer ces salauds, mais, s’ils cherchaient vraiment la bagarre, ils arriveraient sur nous selon une trajectoire d’interception beaucoup plus rapide. Ils vont de nouveau s’enfuir dès que nous nous approcherons d’un peu trop près.

— Donc, bien que nous ne les pourchassions pas, ils se satisfont pour l’instant de notre comportement. » Geary loucha sur son hologramme comme si cette mimique pouvait lui permettre d’y repérer des pièges cachés. « Rien ne nous menace sur notre trajectoire, n’est-ce pas ?

— Strictement rien, sauf si leur technologie en matière de mines furtives a subitement fait des pas de géant. »

Ce qui n’était nullement exclu si les extraterrestres avaient de nouveau prêté directement assistance aux Syndics, s’aperçut brusquement Geary. Mais, d’un autre côté, ces derniers n’auraient en aucun cas pu prévoir que la flotte de l’Alliance adopterait cette trajectoire précise dans l’espace, ni semer des mines tout du long, alors pourquoi s’ingéniaient-ils à l’attirer dans cette direction ?

Rione revint sur la passerelle alors qu’il y réfléchissait encore. « Nous croyons qu’ils se sont servis de ce commandant en chef pour nous inciter à les attaquer, lui apprit Geary. Qu’en pensez-vous ?

— C’est une conjecture qui en vaut une autre, dit-elle en s’asseyant, tandis que le sénateur Sakaï se levait du fauteuil mais restait à côté. Pourtant le rapport de forces, du moins ce que nous en savons, ne laisse aucune chance de succès à cette tactique. Je m’attendais certes à ce que leurs leaders tergiversent assez longtemps, mais il s’agit là de tout autre chose… ils cherchent à s’assurer que nous restions obnubilés par cette flottille. Y aurait-il dans ce système quelque chose dont ils voudraient détourner notre attention ? »

Gearv étudia son hologramme en gardant cette perspective à l’esprit puis pointa du doigt : « Je m’attendais à voir ce cuirassé et ces trois croiseurs lourds piquer vers la flottille pour joindre leurs forces aux siennes. Mais ils se contentent d’attendre sur place, alors qu’elle s’en est passablement rapprochée.

— Ils sont tout près d’un point de saut, fit remarquer Desjani. Celui de Mandalon. Mais je vois mal pourquoi les Syndics assigneraient un cuirassé et trois croiseurs lourds à la garde d’un simple point de saut. Peut-être attendent-ils que des renforts en émergent et que la flottille les y rejoigne à leur arrivée.

— Ce n’est pas exclu. » Geary se massa la nuque en s’efforçant de comprendre ce que manigançait l’ennemi. « Ils envisagent peut-être de nous combattre ultérieurement, auquel cas l’attente de ces renforts expliquerait ce comportement. Si la flottille syndic cherchait uniquement à fuir, elle aurait déjà emprunté le portail de l’hypernet ou piqué droit sur un point de saut.

— Corrigez-moi si je me trompe, mais un cuirassé et trois croiseurs lourds de plus ne changeront pas grand-chose à un rapport de forces qui joue en leur défaveur, déclara Rione. Et, à moins que notre Renseignement ne mette complètement à côté de la plaque, ils ne peuvent pas non plus s’attendre à recevoir de très copieux renforts. Quelque chose nous échappe encore, quelque chose qu’ils cherchent à nous cacher. » Elle examina l’écran qui lui faisait face en secouant la tête. « Leur direction est encore au pouvoir parce qu’elle est prête à tout pour le conserver. Elle sait que vous avez vaincu ses flottilles à plusieurs reprises. Que les défenses fixes de ce système sont incapables de triompher d’une flotte. Nous avons vu le traquenard qu’ils avaient préparé au cas où nous aurions émergé par le portail. Il était mortel, méticuleusement préparé, mais, sous le commandement de l’amiral Geary, la flotte a échappé à son anéantissement plus d’une fois. Quel est donc leur atout caché, celui que les dirigeants syndics comptent abattre si tous leurs autres stratagèmes échouent à arrêter un homme qui les a si souvent déjoués ?

— Madame la coprésidente, les senseurs de la flotte ne sont peut-être pas infaillibles, répondit Desjani en faisant montre d’une patience exagérée, mais ils ont scanné maintes fois ce système. Affirmer que nous savons tout ce que les Syndics y détiennent ne serait pas faire preuve d’une trop grande assurance. Ils ont tout misé sur l’embuscade qui devait nous détruire au portail de l’hypernet.

— Je suis au fait des relevés des senseurs. » Rione fixa son écran. Son ton resta distant. « Quelque chose nous échappe, répéta-t-elle. Tous mes instincts me soufflent que les Syndics devraient avoir prévu une garantie, une autre police d’assurance, au cas trop probable où Black Jack Geary réaliserait encore un miracle. »

Le regard de l’intéressé se reporta de Rione sur Desjani, tandis que ses propres erreurs se rappelaient à lui. « Le comportement de la flottille syndic indique qu’il se passe effectivement quelque chose d’autre ici, mais, s’il s’agit d’une menace assez forte pour mettre la flotte en péril, nous ne l’avons pas trouvée. De quoi pourrait-il retourner ? »

Sakaï intervint pour la première fois dans la discussion : « Comme je l’ai déjà dit, je n’ai qu’une expérience très limitée des questions militaires, mais, en revanche, je sais contrecarrer d’éventuels adversaires en recourant à des subterfuges imprévisibles. Si ce que vous cherchez est bel et bien là, et vous semblez persuadé que nous avons vu tout ce qui s’y trouvait, alors c’est que nous n’avons pas su l’identifier.

— Le Renseignement aura peut-être repéré quelque chose. L’identification de menaces inconnues relève de sa mission. » Geary rappela le lieutenant Iger. Cette fois, l’officier du Renseignement affichait l’air malheureux d’un homme qui s’apprête à divulguer à son supérieur une information qui risque de ne pas lui plaire. « Lieutenant, auriez-vous récemment repéré dans ce système stellaire une menace dont nous n’aurions pas eu conscience jusque-là ? »

La question parut sidérer l’officier. « Non, amiral. Rien dont nous ne vous ayons fait part. Nous avons entré tout ce que nous avons pu trouver sur des menaces potentielles dans les systèmes de combat de la flotte. Mais j’allais précisément vous appeler après une triple vérification de notre analyse du réseau syndic. Il se passe visiblement quelque chose d’étrange. »

Ben voyons ! Une étrangeté de plus ! « En l’occurrence ?

— Concernant la localisation du Conseil exécutif syndic. » Iger fixa son propre écran en fronçant les sourcils. « Nous avons identifié un site bénéficiant d’une priorité de premier plan dans le réseau syndic.

— Sur quelle planète ? demanda Geary.

— Ce n’est pas une planète, amiral. Mais un petit groupe de vaisseaux syndics proche du point de saut pour Mandalon. »

Le regard de Geary se reporta sur son écran. « Il serait sur ce cuirassé ?

— Oui, amiral. C’est notre déduction. Comme je l’ai dit, nous contrôlions notre analyse quand…