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1° Faire la paix avec Napoléon, en prenant toutes les sûretés convenables;

2° Établir la régence et proclamer Napoléon II;

3° Rappeler les Bourbons[176].

Les gens qui avaient l’honneur de se trouver à côté des souverains alliés se dirent: «Si nous faisions faire la paix avec Napoléon, il nous a jugés, nous resterons ce que nous sommes et peut-être nous fera-t-il pendre; si nous faisons rappeler un prince, absent depuis vingt ans et dont le métier ne sera pas facile, il nous fera premiers ministres[177].» Les souverains ne purent pas se figurer que les vertus qui remplissaient leurs cœurs fussent si étrangères à des Français. Ils crurent à leurs protestations en faveur de la patrie, nom sacré que ces petits ambitieux prodiguaient au point d’en ennuyer leurs illustres auditeurs.

Après deux heures de conversation: «Eh bien, dit l’empereur Alexandre, je déclare que je ne traiterai plus avec l’empereur Napoléon.» Les imprimeurs Michaud, qui se trouvaient aussi du Conseil d’État, coururent imprimer la déclaration suivante qui couvrit les murs de Paris…

Les personnes auxquelles leur étonnement n’ôtait pas leur sang-froid, remarquèrent que le roi de Rome n’était pas exclu par cette affiche[178].

Pourquoi, se disaient ces factieux, ne pas se donner la peine d’assembler le Corps Législatif qui, après tout, est la source de tout pouvoir légitime, et ce sénat, composé de l’élite de la nation et qui a erré, non pas faute de lumières, mais par excès d’égoïsme? Soixante égoïstes rassemblés ont toujours plus de pudeur que six. D’ailleurs, il y avait peut-être dix citoyens dans le sénat. On ne fit qu’une cérémonie de ce qui aurait dû être une délibération; de là, la campagne de Waterloo.

Si Napoléon, par une boutade de despotisme, n’eût pas renvoyé le Corps Législatif, rien de ce qui a eu lieu n’arrivait. Si le Corps Législatif, que la conduite de MM. Laîné et Flaugergues venait d’illustrer, se fût trouvé rassemblé, l’esprit éminemment sage qui décida du sort de la France, aurait eu l’idée de le consulter.

Chapitre LXXII

Napoléon se replie sur Fontainebleau

Napoléon, ayant su le mouvement de l’ennemi, arrivait à Paris de sa personne. Le 30 mars à minuit, il rencontra à Essonne, à mi-chemin de Fontainebleau, un des plus braves généraux de sa garde (le général Curial) qui lui apprit la fatale issue du combat. «Vous vous êtes conduits comme des lâches.» — «Sire, nous étions attaqués par des troupes trois fois plus nombreuses que nous et qui étaient animées par la vue de Paris. Jamais des troupes de Votre Majesté ne se sont mieux battues.» Napoléon ne répliqua pas et fit tourner les chevaux de sa calèche vers Fontainebleau. Là, il rassembla ses troupes.

Le 2 avril, il passa la revue du corps de Marmont, duc de Raguse, qui avait évacué Paris, le 31 mars au soir, et était alors campé à Essonne. Ce corps formait l’avant-garde et était à peu près le tiers de son armée. Marmont l’assura de la fidélité et de l’attachement de ses troupes qui étaient en effet au-dessus de la séduction; mais il oublia de répondre pour leur général. Napoléon avait le projet de marcher sur Paris et d’attaquer les Alliés. Il fut successivement abandonné de la plupart de ses serviteurs, particulièrement du prince de Neuchâtel, sur le défaut duquel il plaisanta fort gaîment avec le duc de Bassano. Enfin il tint un conseil de guerre, et, prêtant l’oreille pour la première fois à ce que le maréchal Ney, le duc de Vicence et ses serviteurs les plus dévoués lui dirent du mécontentement général que son refus de faire la paix avait excité en France, il abdiqua en faveur de son fils, et, le 4 avril, il envoya Ney, Mac Donald et Caulaincourt porter cette proposition à l’empereur Alexandre.

Chapitre LXXIII

Marmont[179]

Comme ces généraux traversaient les avant-postes de l’armée française et s’arrêtaient pour faire contresigner leurs passeports par Marmont, ils communiquèrent à ce maréchal l’objet de leur voyage. Il parut confus et dit quelque chose, entre ses dents, de propositions à lui faites par le prince Schwarzenberg et auxquelles il avait prêté l’oreille en quelque manière. Mais, ajouta-t-il aux envoyés que cette parole avait frappés de stupeur, ce qu’il apprenait changeait la question et il allait mettre fin à ses communications séparées. Après quelques moments, un des maréchaux rompit le silence et dit qu’il serait plus simple que lui, Marmont, vînt avec eux à Paris et qu’il se joignît à eux dans les négociations dont ils étaient chargés. Marmont les accompagna en effet; mais dans quel dessein! c’est ce que les mouvements postérieurs de son corps d’armée montrèrent.

Les maréchaux le laissèrent avec le prince Schwarzenberg et allèrent remplir leur mission auprès d’Alexandre qui les envoya au sénat. Ce prince n’avait pas encore de plan arrêté et ne songeait pas aux Bourbons. Il ne s’aperçut pas qu’il était entre les mains de deux intrigants dont l’un surtout, Talleyrand, ne cherchait qu’à se venger[180].

Quand l’officier, qui avait accompagné les maréchaux aux avant-postes de l’armée, revint à Fontainebleau et rapporta que Marmont était allé avec eux à Paris et qu’il l’avait vu caché, dans le fond de leur voiture, tout le monde montra de la surprise et quelques-uns du soupçon. Mais Napoléon, avec sa confiance ordinaire dans l’amitié, répondit que, si Marmont les avait accompagnés, il était sûr que c’était pour lui rendre tous les services qui étaient en son pouvoir. Pendant l’absence des négociateurs, on rassembla à Fontainebleau un conseil de guerre composé de tous les généraux de l’armée. Il s’agissait de décider ce que l’on ferait si la proposition des maréchaux était rejetée. Souham, qui commandait en second le corps de Marmont, fut appelé comme les autres. Souham, qui était informé de l’intelligence secrète de Marmont avec l’ennemi, craignit d’être fusillé en arrivant à Fontainebleau et que tout ne fût découvert. Au lieu de se rendre à Fontainebleau comme il en avait l’ordre, il fit avancer son corps d’armée dans la nuit du 5 avril jusque dans le voisinage de Versailles. Par ce mouvement, il se mit au pouvoir des Alliés qui occupaient cette ville et laissa les troupes de Fontainebleau sans avant-garde. Les soldats de Souham ignorant ses instructions, obéirent sans défiance. Ce ne fut que le lendemain matin qu’ils découvrirent avec désespoir le piège dans lequel ils étaient tombés. Ils voulurent massacrer leurs généraux, et il faut convenir qu’ils auraient donné un exemple utile au monde. Si l’un des colonels ou généraux avait eu un peu de ce caractère, si commun autrefois dans les armées de la République, il pouvait tuer Souham et ramener l’armée à Essonne.

Il est inutile d’ajouter que la défection du corps de Marmont, dans ce moment critique, décida du sort de la négociation confiée aux maréchaux. Napoléon, privé du tiers de sa petite armée, ne fut plus un objet d’appréhension pour les Alliés. Le traité de Fontainebleau fut signé le 11.

Nous nous sommes arrêtés un instant sur ces détails parce que la trahison du maréchal Marmont envers son ami et son bienfaiteur n’a pas été bien comprise. Ce n’est ni sa défense, ni sa capitulation de Paris, qui méritent une attention particulière, c’est sa conduite subséquente qui transmettra son nom à la postérité.

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[176]

Plus bas dans la déclaration d’Alexandre, la Biographie dit qu’il y avait qu’il reconnaîtrait et garantirait la constitution que la nation française se donnerait. D’après cet exemple et celui de l’article de la capitulation de Paris relatif à Ney, bien fou le peuple qui se fiera à la promesse d’un roi. Si l’empereur Alexandre eût garanti la constitution du Sénat, il n’aurait pas eu l’alarme qui finit par hasard à Waterloo.

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[177]

L’s est comique. Tous en voulaient tâter.

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[178]

De Pradt, p. 69.

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[179]

Ce chapitre est encore traduit mot à mot du №54 de l’Edindurgh Review. Sans doute le personnage inculpé a une justification à faire entendre.

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[180]

Voir la véridique histoire du mois d’avril 1814 par M. de Pradt.